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espagnole, littérature.

Publié le 06/05/2013

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espagnole, littérature. 1 PRÉSENTATION espagnole, littérature, littérature écrite en castillan, la principale langue de l'Espagne, depuis le XIe siècle et jusqu'à nos jours. 2 LE MOYEN ÂGE La littérature espagnole médiévale traite essentiellement de thèmes chrétiens, mais elle est marquée également par l'influence et la richesse des cultures islamique et juive, alors en pleine expansion. 2.1 Premières oeuvres littéraires Les plus anciennes oeuvres littéraires en castillan qui nous soient parvenues sont de courts poèmes lyriques appelés kharjas et datant des années 1150. Apparaissent ensuite les épopées, composées par les juglares, les ménestrels espagnols, et chantées sur les places des villages et dans les châteaux. Nourrie d'influences germaniques, arabes et surtout françaises, cette poésie épique n'en diffère pas moins de ses modèles par sa thématique, dont la particularité est de préférer aux sujets mythiques ou anciens le traitement d'événements historiques récents. Les principaux sujets abordés dans ces poèmes narratifs sont en effet les rivalités contemporaines entre les seigneurs castillans et les autres seigneurs, mais davantage encore les luttes menées contre les occupants maures, depuis le début du VIIIe siècle, par les chevaliers des différents royaumes chrétiens de la péninsule Ibérique. Le choix de ces sujets manifeste une nette inclination des auteurs pour le réalisme dans la représentation, inclination qui deviendra plus tard une des principales caractéristiques de la littérature espagnole. Le plus ancien témoignage conservé de l'art des juglares est une épopée anonyme appelée Poème du Cid (Cantar de mío Cid, v. 1140). Subtil chef-d'oeuvre de l'art narratif, ce poème conte les mésaventures et les triomphes de Rodrigo Díaz de Bivár, chef de clan connu sous le nom de Cid Campeador, qui se distingue par son courage lors des luttes de la Reconquista, la « reconquête « des territoires occupés par les maures. Particulièrement remarquable pour la vigueur de la description des personnages, le Poème du Cid exalte les vertus de courage, de loyauté et de sérénité. 2.2 Épanouissement de la littérature 2.2.1 Métier de clergie Au XIIIe siècle, des érudits commencent à remanier la vie des saints, des légendes édifiantes et des récits plus anciens issus de la culture latine, pour en faire des poèmes en langue castillane. Cette activité poétique, nommée « métier de clergie « dans la littérature espagnole, est essentiellement le fait des monastères, et se caractérise par le respect très strict des règles de prosodie, que les juglares avaient ignorées. L'un des plus éminents parmi ces auteurs, Gonzalo de Berceo (v. 1198apr. 1264), est aussi le premier poète espagnol dont nous connaissons le nom. En transformant en poèmes les histoires pieuses, il sait leur conférer une ferveur et une fraîcheur nouvelles. 2.2.2 Essor de la prose érudite Sous l'impulsion du roi Alphonse X le Sage, la Castille devient l'un des premiers pays d'Europe à développer une importante littérature en prose. Des juristes, des historiens, des traducteurs et des érudits spécialisés en diverses matières travaillent en effet sous l'autorité directe du roi, avec le projet ambitieux de compiler l'ensemble des connaissances du temps. La cour de Castille est à l'époque un lieu de rencontre pour les savants de toutes confessions, musulmans, juifs ou chrétiens ; elle met donc tout naturellement à la disposition des chercheurs des connaissances issues de ces trois cultures. Le partage du savoir et le choix d'un travail collectif favorisent la pénétration de la culture orientale en Europe occidentale. Cette prose castillane, façonnée sous Alphonse X, et dont la visée est principalement didactique, atteint sa maturité artistique dans les écrits de don Juan Manuel (1284-1348), neveu du souverain, qui rédige un recueil de contes moraux, le Comte Lucanor (1335). Le premier véritable roman de chevalerie espagnol, le Chevalier Cifar, paraît lui vers 1305. 2.2.3 Transition vers la poésie du Siècle d'or La poésie de Juan Ruiz, archiprêtre de Hita (1290 ?-1350 ?), figure parmi les grandes réussites de la littérature espagnole. Sa thématique -- idéaux chevaleresques, vertus guerrières -- et son écriture -- figures de style et autres procédés liés à l'oralité -- sont encore celles du Moyen Âge, mais la force et la sensibilité qui s'en dégagent préfigurent celles des écrivains du Siècle d'or. Son Livre de bon amour (1330, augmenté en 1343) est un recueil de poèmes écrit à la manière d'une autobiographie satirique et humoristique ; il y associe presque toutes les formes traditionnelles de l'art poétique médiéval. 2.3 Affirmation de la littérature espagnole 2.3.1 Poésie et romancero Au XVe siècle, la production littéraire espagnole connaît un essor considérable, grâce en particulier à quelques figures remarquables : les poètes Iñigo López de Mendoza, marquis de Santillana, Juan de Mena (1411-1456) et surtout Jorge Manrique qui, dans son élégie Stances sur la mort de son père (1476), exprime à la perfection l'acceptation chrétienne de la mort. C'est à cette époque que les histoires extraites des épopées sont assemblées en romanceros, recueils de courts poèmes assez semblables à des ballades, qui se chantent avec un accompagnement instrumental. Après des changements successifs, le romancero trouve sa forme définitive et sa thématique s'élargit aux événements contemporains. 2.3.2 Littérature érudite et chevaleresque La littérature satirique et historique s'épanouit particulièrement dans l'Espagne du XVe siècle. Les monarques Ferdinand V et Isabelle Ire la Catholique encouragent durant leur règne (1474-1504) l'étude des humanités ; le savant le plus en vue de l'époque est d'ailleurs un grammairien et lexicographe, Antonio de Nebrija (ou Lebrija), qui rédige la Grammaire de la langue castillane (1492). C'est à cette époque également que le roman de chevalerie espagnol le plus célèbre et le plus imité, Amadis de Gaule, est remanié et publié dans sa forme définitive par García Rodríguez de Montalvo en 1508. Ce récit inspire au XVIe siècle de nombreux romans de chevalerie de même style. 2.3.3 Théâtre : la Célestine La Comédie de Calixte et Melibée de Fernando de Rojas, plus connue sous le titre la Célestine, s'impose comme une oeuvre majeure. Éditée pour la première fois à Burgos en 1499, cette pièce -- que sa réputation place juste après le Don Quichotte de Cervantès -- influence durablement la littérature espagnole. À l'origine, la Célestine est un récit dialogué combinant des éléments narratifs et dramatiques ; cette double nature lui vaut de n'être adapté à la scène qu'au XXe siècle. Les sources littéraires de cette oeuvre sont également doubles -- latines et médiévales --, mais les idées de l'auteur qui y sont exprimées diffèrent déjà profondément de la religiosité du Moyen Âge. La Célestine relate, dans le cadre réaliste d'une ville anonyme d'Espagne, l'histoire de deux amants de noble naissance, Calixte et Mélibée, qui ont recours aux services d'une prostituée du nom de Célestine pour favoriser leur amour. La vie de ces trois personnages finit par s'entremêler inextricablement jusqu'à les conduire à leur perte. Jamais auparavant la littérature espagnole n'a présenté la tragédie de l'existence avec une telle connaissance de la nature humaine et un tel réalisme psychologique. La maturité artistique et la virtuosité stylistique dont fait preuve l'auteur de la Célestine constituent un modèle précieux pour les écrivains espagnols du Siècle d'or, période qui débute peu après sa publication. 3 LE SIÈCLE D'OR Avec l'accession au trône du roi Charles Ier (voir Charles Quint), l'Espagne passe sous la domination des Habsbourg, elle y reste jusqu'en 1700, date de la mort de Charles II. Au cours du XVIe siècle, c'est-à-dire au coeur de son Siècle d'or, l'Espagne prend le contrôle d'une grande partie de l'Europe en même temps qu'elle établit son empire colonial sur le Nouveau Monde. Le XVIIe siècle est en revanche une période de déclin, qui s'achève par l'arrivée au pouvoir d'une nouvelle dynastie, les Bourbons (1700). 3.1 Influence d'Érasme Durant cette période, les écrivains espagnols sont guidés par les mêmes idées philosophiques et artistiques que celles qui circulent alors dans la Hollande, l'Italie ou la France de la Renaissance. L'influence majeure est celle du savant et humaniste hollandais Érasme. Les oeuvres de ses disciples espagnols, parmi lesquels le philosophe Juan Luis Vives (1492-1540) et le théologien Juan de Valdés, font d'ailleurs l'objet de nombreuses traductions dans toute l'Europe. Le même succès accueille les oeuvres de leur contemporain, le moine franciscain, écrivain et historiographe Antonio de Guevara y de Norona. Les disciples d'Érasme dominent la vie littéraire espagnole, rédigeant de nombreux dialogues humanistes, ainsi que des écrits historiques. Les historiens les plus importants du Siècle d'or sont Diego Hurtado de Mendoza (1503-1575) et le jésuite Juan de Mariana de la Reina (1536-1624). 3.2 Thèmes et styles poétiques 3.2.1 Poésie pastorale La poésie pastorale, fiction idyllique relatant la vie quotidienne et les coutumes de bergers de fantaisie, prospère également durant le Siècle d'or. Les thèmes et la tonalité particuliers de cette poésie, associés aux formes poétiques italiennes -- le sonnet, le huitain, le canzone, le tercet et les vers non rimés --, sont utilisés pour la première fois de façon systématique en Espagne par les poètes Juan Boscán Almogáver (v. 1490-v. 1550) et Garcilaso de la Vega. Ce dernier n'est pas seulement un novateur sur le plan stylistique mais aussi un poète lyrique soucieux d'exprimer des émotions authentiques. 3.2.2 Poésie de la Contre-Réforme Les innovations ne supplantent pas complètement les traditions établies : anciennes et nouvelles formes poétiques coexistent durant tout le XVIe siècle. Par ailleurs, la vie religieuse espagnole connaît un nouvel essor vers le milieu du XVIe siècle, en raison notamment de l'inquiétude ressentie par les catholiques espagnols face à la Réforme. La conséquence la plus tangible, sur le plan littéraire, en est la création d'un nouveau style poétique mieux à même de véhiculer l'idéologie de la ContreRéforme, plus apte à exprimer des attitudes spirituelles rigoureuses, bien éloignées de celles de la poésie pastorale. Le premier auteur important de cette poésie catholique est un grand érudit, le moine augustinien Luis de León, connu aussi sous le nom de Fray Luis de León et dont les poèmes mystiques mêlent la dévotion chrétienne et le culte de la beauté, l'amour de la nature et la quête de la sérénité. Un contemporain de Fray Luis, le carme Juan de Yepes y Álvarez, plus connu sous le nom de saint Jean de la Croix, compose ce que de nombreux lettrés considèrent comme les poèmes les plus intenses et les plus lumineux de la langue espagnole, dans lesquels il s'efforce d'exprimer l'ineffable expérience mystique de l'union de l'âme avec Dieu (Nuit obscure, 1578). Autre grand poète de cette époque, Fernando Herrera annonce, par son style baroque, l'ère suivante de la littérature espagnole. 3.2.3 Poésie baroque La poésie baroque, qui se caractérise par la prolifération de procédés rhétoriques (et notamment de métaphores) élaborés pendant tout le XVIe siècle, connaît son apogée au XVIIe siècle. Le meilleur exemple de poésie baroque est l'oeuvre, devenue emblématique, du poète Luis de Góngora y Argote. C'est à partir du nom de cet auteur qu'est créé le terme de « gongorisme «, utilisé pour désigner de façon générale le style baroque espagnol. On a souvent, par le passé, reproché à Góngora l'obscurité et la préciosité extrême de la plus grande partie de sa poésie ; mais de nos jours, on s'accorde à le reconnaître comme l'un des maîtres de la poésie lyrique de son pays ( Solitudes, 1613-1614). Le poète, prosateur et satiriste Francisco Gómez de Quevedo y Villegas, créateur du conceptismo (« conceptisme «) -- style d'écriture privilégiant le trait d'esprit et le paradoxe --, est lui aussi une figure importante de la littérature baroque espagnole ; ses oeuvres sont remarquables tant par leur esprit que par la profondeur des sentiments qu'elles expriment. 3.3 Prose religieuse Plusieurs mystiques et ascètes produisent des oeuvres en prose tout à fait intéressantes durant les deux derniers tiers du XVIe siècle. Parmi eux, le dominicain et prélat Luis de Granada (1504-1588) manifeste dans ses écrits à la fois son ascétisme et un amour profond de la nature. Sainte Thérèse d'Ávila, carmélite et mystique, crée, elle, une nouvelle symbolique pour exprimer ses expériences mystiques ; ses traités ont la spontanéité et la fraîcheur de la conversation familière ( le Livre des demeures, 1577). Mais le plus grand théologien du Siècle d'or est sans doute le philosophe scolastique et jésuite Francisco Suárez, disciple de saint Thomas d'Aquin, qui écrit en langue latine des textes théologiques tels que De divina gratia (« la Grâce divine «). 3.4 Nouvelles formes narratives Vers 1550 apparaissent plusieurs nouvelles formes narratives : le roman pastoral, le roman maure et le roman picaresque. 3.4.1 Roman pastoral et roman maure Le roman pastoral, qui conte sur un mode idyllique les amours de bergers idéalisés, a fleuri précédemment en Italie et au Portugal. La version espagnole de cette inspiration champêtre s'incarne d'abord dans la Diane (1559), succès considérable dû à un poète d'origine portugaise, Jorge de Montemayor. Le roman maure est en revanche une invention espagnole, qui emprunte certains thèmes littéraires aux siècles précédents, mais dont le style relève des règles d'écriture contemporaines ; il consiste à présenter sous forme de romans les épisodes des guerres contre les Maures qu'on trouve auparavant dans les contes de chevalerie. Le premier exemple de ce genre nouveau est un petit livre anonyme, l'Abencérage (1598). Maures ou pastoraux, ces romans ont pour trait commun l'exagération, que ce soit dans le sens d'une idéalisation (comme c'est le cas dans les romans pastoraux) ou d'une amplification plus neutre de certains traits de l'âme humaine (le courage, la trahison, etc.). 3.4.2 Naissance du roman picaresque Par contraste, le roman anonyme Lazarillo de Tormes (1554) offre une représentation réaliste de la société, à travers le récit presque autobiographique (la narration est conduite à la première personne), souvent comique, des mésaventures d'un jeune vagabond qui va de maître en maître, toujours déçu par eux, pour tenter d'échapper à la faim. Cette oeuvre est le premier et l'un des meilleurs romans du genre picaresque, qui s'épanouit au début du XVIIe siècle. Guzmán de Alfarache (1599 pour la première partie, 1603 pour la seconde), de Mateo Alemán, et l'Histoire de la vie du filou don Pablo (1626), de Francisco Gómez de Quevedo y Villegas, sont parmi les plus remarquables romans picaresques espagnols. Le genre, dont l'immense succès dépasse bientôt les frontières espagnoles, va exercer une influence majeure sur le roman européen du XVIIIe siècle. 3.4.3 Don Quichotte À mi-chemin entre la vision réaliste du roman picaresque et la représentation idéalisée de la littérature bucolique ou chevaleresque, les oeuvres de Cervantès, en particulier le roman Don Quichotte (1605 pour la première partie, 1615 pour la seconde), proposent une image contrastée de l'humanité. Cervantès entreprend sans doute Don Quichotte avec l'intention d'écrire une histoire amusante et satirique, en réaction contre l'engouement de son époque pour les romans de chevalerie. Fou et sage, grotesque et admirable, Don Quichotte est un personnage qui, par sa nature complexe, donne l'illusion tout à fait convaincante de son humanité. Émouvant, il l'est aussi par ses efforts pour conjuguer le monde de ses rêves et celui de la réalité à laquelle il est confronté. Les préoccupations prosaïques de son valet, le comique Sancho Pança, contrastent et tempèrent les illusions du maître. Cette oeuvre foisonnante offre non seulement un tableau complet et véridique de la société espagnole, mais présente aussi une gamme étonnamment variée de thèmes et fourmille de trouvailles d'écriture. L'influence de Don Quichotte s'étend bien au-delà des frontières de l'Espagne et bien avant dans les siècles suivants : chaque période de la culture européenne semble avoir voulu en donner sa propre interprétation ; chaque pays y trouve un modèle pour inventer de nouveaux types de récit. Plus tard, Cervantès écrit douze courts récits, picaresques et drôles, qui constituent les Nouvelles exemplaires (1613), et un roman de chevalerie plein de fantaisie, les Travaux de Persilès et Sigismonde (posthume, 1617), l'un des chefs-d'oeuvre de la prose baroque espagnole. 3.5 Essai et conceptismo Le développement du genre de l'essai dans la littérature espagnole est considérable au XVIIe siècle. Parmi les meilleures illustrations du genre, citons Entreprises politiques (1640) de Diego Saavedra y Fajardo (1584-1648), qui dresse le portrait du souverain chrétien idéal, mais aussi les Songes (1627), essai satirique de Quevedo y Villegas qui présente une série de fantasmagories destinées à stigmatiser les vices de la société. C'est en revanche sous la forme d'un roman allégorique et philosophique, l'Homme détrompé (1651-1657), que Baltasar Gracián choisit d'affirmer la vanité de toute expérience humaine autre que l'effort intellectuel. Toutes ces oeuvres, essais ou romans, ressortissent d'un style appelé conceptismo (« conceptisme «) -- l'un des avatars de l'écriture baroque --, inventé par Quevedo y Villegas et dans lequel les idées sont condensées en phrases extrêmement concises. Figure d'une grande importance dans l'histoire littéraire espagnole, Quevedo y Villegas analyse avec brio les moeurs politiques, économiques et sociales de l'Espagne. Ses ouvrages politiques comme la Politique de Dieu (1626) et la Vie de Marcus Brutus (1632-1644) ne sont qu'un aspect d'une oeuvre en prose qui compte aussi des textes ascétiques, philosophiques et burlesques. Obsédé par la grandeur du passé et la décadence du présent, Quevedo écrit beaucoup sur la désillusion ; sa poésie, d'inspiration amoureuse aussi bien que politique ou satirique, n'en est pas moins riche et variée. Il s'illustre en outre avec un égal bonheur dans la veine classique et dans la veine populaire. 3.6 Théâtre 3.6.1 Diversité des styles et des influences Durant le Siècle d'or espagnol, le théâtre est, chronologiquement, le dernier genre littéraire à parvenir à maturité. Les meilleures oeuvres écrites en ce domaine dans les premières décennies du XVIe siècle sont les pièces lyriques du poète et dramaturge portugais Gil Vicente, le père du théâtre portugais, dont une partie de la production est rédigée en espagnol. Les saynètes comiques de Lope de Rueda (v. 1500-1565) et celles de Cervantès figurent également en bonne place parmi les oeuvres théâtrales de cette époque. Un certain nombre de pièces, enfin, sont des imitations des comédies italiennes de la Renaissance. La tragédie classique est pour sa part représentée par Juan de la Cueva de Garoza, inspirée de thèmes antiques ou de sujets médiévaux. Il faut citer également Guillén de Castro y Bellvís, autre auteur dramatique important du Siècle d'or, dont la pièce la plus connue, les Enfances du Cid (1618), a inspiré Corneille pour son Cid (1637). 3.6.2 Lope de Vega et la comedia espagnole Aucun écrivain, tous genres confondus, ne représente mieux le génie de l'Espagne que le poète Lope de Vega. Toutes les productions de cet homme de lettres raffiné, qui a influencé Corneille et Molière, sont admirées pour leur perfection technique et pour la variété des procédés mis en oeuvre. Il s'illustre dans la poésie, dans le roman, mais on lui doit surtout de nombreuses pièces de théâtre, empreintes d'un charme et d'un franc-parler populaires. La comedia espagnole, définie et perfectionnée par Lope de Vega, est une pièce en trois actes qui mêle le comique et le tragique. Écrite en vers et organisée en structures métriques diverses, la comedia ne suit pas les règles de la construction dramatique classique. Dynamique et poétique, plutôt que psychologique ou philosophique, ce genre est conçu pour plaire à toutes les classes sociales, des plus instruites aux moins lettrées. Si les pièces de Lope de Vega sont extrêmement variées par leur thématique et le cadre de leur action, elles ont cependant des caractéristiques communes : éléments historiques (extraits le plus souvent des anciens romanceros), environnement rural, thématiques de l'apprentissage de la vie et de la recherche de l'identité (recherche vécue le plus souvent à travers l'amour et les rivalités). Environ cinq cents de ses pièces nous sont parvenues, mais il en a composé certainement beaucoup plus. Fuente ovejuna (Font-aux-Cabres, 1619), le Chevalier d'Olmedo (1620-1625) et le Châtiment sans vengeance (1631) sont les plus remarquables. Certains aspects de la comedia sont remaniés par les meilleurs des disciples de Lope de Vega, comme Tirso de Molina, dont la pièce le Trompeur de Séville (v. 1625) est constitutive du mythe de Don Juan, puisqu'elle est la première oeuvre littéraire à évoquer ce légendaire héros espagnol. Autre disciple de Vega, Juan Ruiz de Alarcón y Mendoza donne un contenu moral à ses comédies de moeurs courtoises. 3.6.3 Calderón et la comedia philosophique Le théâtre du Siècle d'or trouve son expression la plus aboutie dans les oeuvres de Pedro Calderón de la Barca, généralement considéré comme le plus grand poète dramatique de la période baroque. Ses pièces, à la structure complexe et symétrique, manifestent une cohérence encore absente dans les oeuvres de Lope de Vega. Calderón est l'auteur d'un des chefs-d'oeuvre les plus connus du théâtre espagnol, une comedia philosophique et religieuse intitulée La vie est un songe (v. 1633), où il montre au spectateur le caractère éphémère de l'existence pour l'inciter à se tourner vers le divin comme ultime recours. Calderón, dont la pensée est proche de l'esprit de la Contre-Réforme, est aussi le maître incontesté de l'un des genres les plus intéressants du Siècle d'or, celui des autos sacramentales, courtes pièces religieuses utilisant l'allégorie (le Grand Théâtre du monde, v. 1645). On lui doit aussi une pièce historique, l'Alcalde de Zalamea (1636), qui constitue l'exemple parfait d'un drame rural centré autour d'une affaire d'honneur. Parmi les auteurs dramatiques directement influencés par Calderón, citons Francisco Rojas-Zorrilla et Agustín Moreto. 4 XVIIIE ET XIXE SIÈCLES Au XVIIe siècle s'est amorcé le déclin politique et économique de l'Espagne et, vers la fin de ce siècle, l'activité artistique, à son tour, régresse. Ce phénomène se poursuit durant la guerre de Succession d'Espagne (1701-1714) et pendant le règne des premiers Bourbons (1700-1759). L'écrivain espagnol le plus remarquable de la première moitié du XVIIIe siècle est le moine bénédictin, critique et érudit Benito Jerónimo Feijoo y Montenegro (1676-1764). Champion de la liberté, de la raison et de la connaissance scientifique, il écrit des essais contre l'obscurantisme de ses contemporains. 4.1 Néoclassicisme Sous le règne du monarque éclairé Charles III (1759-1788), l'influence de la France apporte en Espagne de nouvelles idées sociales et politiques et des formes littéraires néoclassiques. 4.1.1 Poésie néoclassique Cette vogue du classicisme à la française, qui ne touche que les classes aristocratiques et la bourgeoisie aisée, est introduite dans la littérature dramatique par Nicolás Fernández de Moratín et reprise par son fils, Leandro Fernández de Moratín (1760- 1828), dit Moratín le Jeune, notamment dans sa pièce le Oui des jeunes filles (écrite en 1801, créée en 1806). En revanche, l'auteur dramatique Ramón de la Cruz se borne à respecter la tradition espagnole, et compose des comédies en un acte consacrées à des sujets populaires. Les néoclassiques espagnols ont cependant le tort de ne montrer souvent qu'une compréhension très limitée de l'art du Siècle d'or ; leur poésie lyrique reflète à la fois les influences étrangères et celles de certains poètes espagnols du XVIe siècle, Luis de León notamment. Ils reviendront par la suite aux formes espagnoles traditionnelles. Les oeuvres les plus durables de la littérature de cette époque sont les poèmes des Moratín père et fils, de Gaspar Melchor de Jovellanos (1744-1811), et de Juan Meléndez Valdés. 4.1.2 OEuvres polémiques José de Cadalso y Vázquez (1741-1782), également poète, compose des pièces de théâtre et des essais tels ceux que rassemblent ses Lettres marocaines (posthumes, 1789), qui offrent une vision critique de la société espagnole. Les écrits polémiques de cette sorte, évoquant les mérites de la tradition et de la culture espagnoles, sont caractéristiques de cette période. 4.1.3 Période de stagnation L'invasion de l'Espagne (1808) par Napoléon puis le régime absolutiste de Ferdinand VII (1814-1833) paralysent l'activité littéraire durant les trois premières décennies du XIXe siècle. Les meilleurs poètes de cette époque, à l'image de Manuel José Quintana, expriment des préoccupations teintées de romantisme dans des oeuvres d'une facture encore classique. 4.2 Romantisme Le Siècle d'or espagnol a contribué à la naissance et au développement du romantisme européen. L'Espagne redécouvre ses richesses nationales au début du siècle ; nombreuses sont les réécritures des comedias de Calderón et de Lope. Parallèlement, l'influence de Victor Hugo et d'Alexandre Dumas d'une part et celle de Shakespeare d'autre part préparent l'éclosion d'une production romantique espagnole originale qui ne se manifeste qu'après 1834. Le romantisme est introduit avec succès dans le théâtre espagnol par la Conjuration de Venise (1834) de Francisco Martínez de la Rosa, puis triomphe grâce au drame Don Álvaro ou la Force du destin (1835) du duc de Rivas. Aux côtés de Rivas, d'autres auteurs produisent des drames avec un succès notable : Antonio García Gutiérrez (le Trouvère, 1836 ; le Roi moine, 1837), José Zorrilla y Moral (le Savetier et le Roi, 1840 ; Don Juan Tenorio (1844). Le drame romantique espagnol, comme son homologue français, n'a cependant qu'une vie éphémère, très vite dévoyé par des oeuvres d'inspiration plus réaliste. L'esprit de révolte des romantiques s'exprime de façon privilégiée chez le poète et révolutionnaire José de Espronceda, l'un des meilleurs poètes de son temps ( l'Étudiant de Salamanque, 1840). Gustavo Adolfo Bécquer occupe une place particulière : méconnu de son temps, il sera célébré comme le poète de l'intimisme (Rimas) et du fantastique (Légendes, 1858-1864, publication posthume 1871). Les costumbristas, sorte de « portraits « campant des personnages savoureux et dépeignant les coutumes populaires avec un sens tout nouveau du pittoresque, représentent sans doute le meilleur de la prose romantique. Ce genre satirique est illustré essentiellement par les écrits de Mariano José de Larra (Articles de moeurs), à qui l'on doit également plusieurs pièces de théâtre et un roman (le Damoiseau de don Enrique le Dolent, 1834). Si ses oeuvres ne comptent pas parmi les pages les plus remarquables du romantisme espagnol, Larra reste un auteur intéressant en raison de son travail d'introspection honnête et du tourment sincère qui anime ses oeuvres. 4.3 Réalisme La seconde moitié du XIXe siècle voit l'avènement, en Espagne comme ailleurs, de la fiction réaliste. Le réalisme espagnol trouve son expression la plus aboutie dans les oeuvres de Benito Pérez Galdós. Dans une série de romans historiques intitulés Épisodes nationaux (Episodios nacionales, 1873-1912, 46 volumes), Pérez Galdós livre son interprétation de l'histoire de l'Espagne contemporaine. Il est également l'auteur de romans à thèse, où il aborde des problèmes religieux, sociaux ou politiques. Sa principale thèse, la dénonciation des maux engendrés par l'intolérance religieuse, se trouve exposée avec une grande force dans son roman Doña Perfecta (1876), mais ce sont ses peintures réalistes de la société madrilène, notamment Fortunata et Jacinta (1886-1887), Tristana (1892) et Misericordia (1897), qui constituent son oeuvre majeure. D'autres romanciers évoquent la vie régionale en Espagne : José María de Pereda (1833-1906) décrit la région de Santander ; Pedro Antonio de Alarcón et Juan Valera évoquent l'Andalousie, tandis que la comtesse Emilia Pardo Bazán dépeint la Galice. Cette dernière ainsi que le romancier Clarín adoptent les techniques d'investigation et d'écriture du naturalisme. Valera, en revanche, se différencie des autres auteurs réalistes par la préférence qu'il accorde à la beauté esthétique au détriment de la fidélité au réel. Un autre grand romancier réaliste de cette époque, Vicente Blasco Ibáñez, acquiert alors une renommée internationale. Marcelino Menéndez Pelayo (1856-1912), critique et historien de la littérature espagnole, est le contemporain éclairé de ces romanciers. 4.4 Génération de 1898 Dans la dernière décennie du XIXe siècle, l'Espagne entre dans une intense période d'activité créatrice. Un groupe d'écrivains -- baptisé la « génération de 1898 « -- fait alors son apparition à l'avant-garde littéraire ; parmi eux se trouvent le philosophe Miguel de Unamuno, le Galicien Ramón del Valle Inclán, le poète Antonio Machado, l'essayiste Azorín, le romancier basque espagnol Pío Baroja et le critique et dramaturge Jacinto Benavente y Martínez. Ensemble, ils cherchent à accomplir une transformation profonde des techniques et du style de la littérature espagnole. Ils sont influencés dans cette entreprise par le poète nicaraguayen Rubén Darío, chef de file du mouvement moderniste, dont le style se caractérise par une grande originalité des images, des rythmes et des rimes. Si chaque membre de la génération de 1898 possède son style propre, tous ont néanmoins en commun une position apparemment paradoxale : nationalistes, soucieux de favoriser la spécificité culturelle espagnole d'une part, ils sont d'autre part de fervents adeptes de la libéralisation et de la modernisation du pays. Les écrits d'Unamuno, en particulier ses essais et ses poèmes expriment une philosophie qui présente certains traits communs avec l'existentialisme (le Sentiment tragique de la vie, 1912). Les oeuvres de Valle Inclán traduisent, elles, une attitude artistique bien différente, qui relève d'un esthétisme cher au décadentisme et se traduit par un travail littéraire, un art d'écrire, n'ayant d'autre but que l'art lui-même ( Sonates, 1902-1905). Le paysage, l'histoire, le peuple et l'esprit de la Castille sont largement célébrés dans les poèmes de Machado (Champs de Castille, 1912) et les essais d'Azorín. Quant à Pío Baroja, auteur d'un cycle de vingt romans, les Mémoires d'un homme d'action (1918-1935), il est reconnu comme l'un des grands romanciers espagnols après Pérez Galdós. Benavente, auteur des Affaires sont les affaires (1909), reçoit le prix Nobel de littérature en 1922. 5 ÉPOQUE CONTEMPORAINE Au XXe siècle, la créativité et l'élan nouveau des lettres espagnoles initiés par la génération de 1898 sont brutalement interrompus par la guerre civile (1936-1939), qui réduit au silence -- ou contraint à l'exil -- de nombreux intellectuels. Cependant, la création littéraire reprend une certaine vigueur (notamment grâce aux littératures de l'exil) après la Seconde Guerre mondiale. Parmi les premières oeuvres du XXe siècle, la poésie de Juan Ramón Jiménez, prix Nobel de littérature en 1956, se caractérise par son lyrisme délicat et sa tentative d'atteindre à une pureté formelle absolue ( Platero et moi, 1917). L'écrivain et philosophe José Ortega y Gasset, maître de la prose espagnole, acquiert pour sa part une renommée internationale grâce au talent avec lequel il interprète l'esprit de son temps ( le Thème de notre temps, 1923). Les autres prosateurs remarquables de cette époque sont Ramón Pérez de Ayala, le romancier et essayiste Gabriel Miró Ferrer (1879-1930), Ramón Gómez de la Serna, principal représentant de l'expressionnisme en Espagne ( le Livre muet, 1910 ; Seins, 1917), Eugenio d'Ors y Rovira, les essayistes Salvador de Madariaga y Rojo (1886-1978) et Gregorio Marañón ainsi que l'homme de lettres et critique Ramón Menéndez Pidal. 5.1 Poésie 5.1.1 Génération de 1927 Une brillante génération de poètes, dite « génération de 1927 «, apparaît à la fin des années vingt et au cours des années trente. Le plus grand de ces poètes est Federico García Lorca, qui exprime mieux que personne l'esprit populaire de l'Espagne dans ses pièces (Noces de sang, 1933 ; Yerma, 1935 ; la Maison de Bernarda Alba, 1936) et ses poèmes lyriques (Romancero gitan, 1928 et 1933 ; Chant funèbre pour Ignacio Sánchez Mejías, 1934). Les autres, pour n'en citer que les principaux, sont Jorge Guillén (1893-1984), Rafael Alberti et Vicente Aleixandre y Merlo. Guillén se fait connaître par un recueil poétique d'une grande rigueur formelle, Cantique, publié pour la première fois en 1928 (augmenté en 1936, 1945 et 1950), et par une oeuvre en trois volumes, Clamor (1936-1950), regroupant des poèmes traitant de questions sociales et politiques. Opposé à Franco, Guillén prend le chemin de l'exil en 1939 ; sa poésie se fait dès lors l'écho de son pessimisme croissant. Aleixandre, lauréat du prix Nobel de littérature en 1977, exerce une influence considérable sur les autres poètes espagnols. Sa poésie, sensuelle et richement imagée, revisite l'univers surréaliste ( Ámbito, 1928 ; Ombre du paradis, 1944). Avec Antología total (1975), recueil complet de ses oeuvres, il marque son temps par la modernité de son style. 5.1.2 Génération de 1936 Un autre groupe, parfois appelé « génération de 1936 «, compte Germán Bleiberg, Carmen Conde, Luis Felipe Vivanco, Juan Panero, Leopoldo Panero, Luis Rosales Camacho, Dionisio Ridruejo (1912-1975) et surtout Miguel Hernández. Cette génération de 1936, confrontée à la censure du régime franquiste, se tourne vers un lyrisme intime et parfois vers l'expression de la foi religieuse. 5.1.3 Subjectivité et réalisme Neuf poètes dominent la génération qui succède à celle de 1936 : ce sont Rafael Morales, Vicente Gaos, Carlos Bousoño, Blas de Otero (1916-1979), Gabriel Celaya, Victoriano Cremer, José Hierro, Eugenio de Nora et José María Valverde. Hierro représente le courant de l'anti-esthétisme, qui va de pair dans son oeuvre avec l'engagement social et une certaine inquiétude pour l'avenir de l'Espagne, une préoccupation partagée par l'ensemble du groupe. La poésie de ces poètes est éminemment subjective, puisqu'elle répond à la volonté de dire les conflits entre l'individu et le monde extérieur ; ce en quoi les premiers poèmes de Blas de Otero sont tout particulièrement représentatifs. Le désir d'exprimer la réalité subjective de l'être n'exclut pourtant pas, chez ces poètes, une vision réaliste du monde : ni tragique ni désespérée, cette approche se veut plutôt sereine et religieuse, comme dans l'oeuvre de Valverde ou dans les derniers poèmes de Blas de Otero. Le groupe -- en premier lieu des poètes comme Gabriel Celaya, Victoriano Cremer ou Eugenio de Nora -- aborde aussi le genre de la poésie sociale. 5.1.4 Actualité poétique Dans les années 1960 et 1970 apparaissent des poètes tels que José Maria Caballero Bonald, Angel Crespo et José Gil de Biedma qui, tout en se montrant sensibles aux thèmes sociaux, se consacrent davantage à des recherches formelles et esthétiques. Dans la génération des années 1980 et 1990, on retient surtout Felix de Azua, Pere Gimferrer et Antonio Rodriguez Sarrion, poètes de la modernité, de l'expérimentation et du renouveau de la langue. 5.2 Roman Le roman est le genre le plus florissant de la littérature espagnole contemporaine ; il est extrêmement varié dans ses manifestations. Les récits de Juan Antonio de Zunzunegui, tels que l'Ulcère (1948) ou la Faillite (1957), affichent une forte influence picaresque. Max Aub (1903-1972), avec ses trois Campos, écrit en revanche en s'inspirant d'une thématique plus actuelle, celle de la guerre civile ; il se révèle par ailleurs un maître de l'humour noir dans Crimes exemplaires (1956). L'un des meilleurs romans du critique, sociologue et romancier Francisco Ayala, Morts de chien (1958), s'inscrit lui aussi dans l'actualité pour présenter une vision cauchemardesque de l'humanité. Quant aux romans la Famille de Pascal Duarte (1942), de Camilo José Cela, et Nada (1944), de Carmen Laforet, ils sont parmi les plus connus d'un nouveau type de réalisme appelé tremendismo, qui met en scène des personnages d'antihéros et insiste sur les aspects les plus sordides de la vie. Cela, lauréat du prix Nobel de littérature en 1989, est l'auteur non seulement de romans aux thèmes très divers, mais également de récits de voyage (Voyage en Alcarria, 1948). La Ruche (1951), tableau ironique et burlesque de la vie madrilène en 1942, est souvent considérée comme son meilleur roman. Avec Ignacio Agustí, et José María Gironella (né en 1917), auteur des Cyprès croient en Dieu (1953) -- saga mettant en scène des conflits familiaux symbolisant les dissensions politiques à l'origine de la guerre civile -- on revient à une forme de réalisme plus traditionnel. On doit à Miguel Delibes (né en 1920) des livres de voyage et des romans réalistes, dont Cinq Heures avec Mario (1967). La romancière Ana María Matute, dont les oeuvres mettent en scène des enfants, est connue pour des récits tels que Première Mémoire (1959) ou Les soldats pleurent la nuit (1964). Toujours dans cette veine réaliste, citons encore les Eaux du Jarama (1956) de Rafael Sanchez Ferlosio, un roman réaliste au style très original, et les romans existentiels de Juan Goytisolo, tels que Deuil au paradis (1955) et Danses d'été (1962), où l'auteur fustige la vacuité des valeurs de la société espagnole contemporaine. Les romans de Ramón Sender (1902-1982) ont été également très remarqués parmi les oeuvres de cette génération, notamment Sept Dimanches rouges (1932) et Requiem pour un paysan espagnol (1960). Sender, qui est devenu citoyen américain en 1946, témoigne dans divers ouvrages de son expérience de la guerre d'Espagne. De cette époque, on retiendra également les noms de Francisco Umbral, qui s'est illustré par des romans régionaux où les souvenirs personnels se mêlent à l'histoire sociale des années soixante, et de Juan Benet, dont l'oeuvre exigeante rompt avec le réalisme social et les formes de narration traditionnelles pour se rapprocher des expérimentations menées par le Nouveau Roman en France (Tu reviendras à Región, 1967). Plus récemment, Manuel Vázquez Montalbán s'est imposé comme l'un des romanciers les plus populaires de l'Espagne post-franquiste, grâce en particulier à ses récits policiers, qui mettent en scène le détective privé « anar « Pepe Carvalho. 5.3 Théâtre Si l'on excepte les tragédies sombres et symboliques de García Lorca, le théâtre moderne ne représente qu'une part modeste de la foisonnante production littéraire espagnole. Parmi les auteurs dramatiques importants, citons Alejandro Casona (pseudonyme d'Alejandro Rodríguez, 1903-1965), auteur d'une oeuvre théâtrale fantastique dont Les arbres meurent debout (1949) est la pièce emblématique, et Antonio Buero Vallejo, connu pour ses pièces réalistes aux accents existentiels (Histoire d'un escalier, 1949). Il faut également mentionner Alfonso Paso et Alfonso Sastre (né en 1926), auteur de el Cuervo (1957). Quant à Fernando Arrabal, créateur du « théâtre panique «, son cas est particulier puisqu'il écrit en français ; on lui doit des pièces provocantes, soulignant l'hypocrisie et la cruauté de la société, des essais politiques et un roman. 5.4 Essai Dans le domaine de l'essai, Julián Marías, disciple de José Ortega y Gasset, produit des textes remarquables peu après la guerre civile. Au nombre des plus éminents critiques littéraires et essayistes contemporains figurent, pour les premiers, Américo Castro (1885-1972), Dámaso Alonso (1898-1990) et Joaquín Casalduero, et pour les seconds, José Gaos, Pedro Laín Entralgo, José Ferrater Mora, María Zambrano, José Luis Aranguren, Francisco Ayala, Guillermo Díaz Plaja, Ricardo Gullón et Guillermo de Torre (1900-1971), par ailleurs chef de file, dans sa jeunesse, de l'éphémère mouvement ultraïste. La créativité de la littérature espagnole contemporaine, sa vitalité, sa capacité de renouvellement, indéniables, vont de pair avec l'essor actuel des cultures hispaniques à travers le monde. Voir aussi littérature catalane ; littérature hispano-américaine. Microsoft ® Encarta ® 2009. © 1993-2008 Microsoft Corporation. Tous droits réservés.

« 2.3. 2 Littérature érudite et chevaleresque La littérature satirique et historique s’épanouit particulièrement dans l’Espagne du XVe siècle.

Les monarques Ferdinand V et Isabelle I re la Catholique encouragent durant leur règne (1474-1504) l’étude des humanités ; le savant le plus en vue de l’époque est d’ailleurs un grammairien et lexicographe, Antonio de Nebrija (ou Lebrija), qui rédige la Grammaire de la langue castillane (1492).

C’est à cette époque également que le roman de chevalerie espagnol le plus célèbre et le plus imité, Amadis de Gaule, est remanié et publié dans sa forme définitive par García Rodríguez de Montalvo en 1508.

Ce récit inspire au XVI e siècle de nombreux romans de chevalerie de même style. 2.3. 3 Théâtre : la Célestine La Comédie de Calixte et Melibée de Fernando de Rojas, plus connue sous le titre la Célestine, s’impose comme une œuvre majeure.

Éditée pour la première fois à Burgos en 1499, cette pièce — que sa réputation place juste après le Don Quichotte de Cervantès — influence durablement la littérature espagnole.

À l’origine, la Célestine est un récit dialogué combinant des éléments narratifs et dramatiques ; cette double nature lui vaut de n’être adapté à la scène qu’au XXe siècle.

Les sources littéraires de cette œuvre sont également doubles — latines et médiévales —, mais les idées de l’auteur qui y sont exprimées diffèrent déjà profondément de la religiosité du Moyen Âge. La Célestine relate, dans le cadre réaliste d’une ville anonyme d’Espagne, l’histoire de deux amants de noble naissance, Calixte et Mélibée, qui ont recours aux services d’une prostituée du nom de Célestine pour favoriser leur amour.

La vie de ces trois personnages finit par s’entremêler inextricablement jusqu’à les conduire à leur perte.

Jamais auparavant la littérature espagnole n’a présenté la tragédie de l’existence avec une telle connaissance de la nature humaine et un tel réalisme psychologique. La maturité artistique et la virtuosité stylistique dont fait preuve l’auteur de la Célestine constituent un modèle précieux pour les écrivains espagnols du Siècle d’or, période qui débute peu après sa publication. 3 LE SIÈCLE D’OR Avec l’accession au trône du roi Charles I er (voir Charles Quint), l’Espagne passe sous la domination des Habsbourg, elle y reste jusqu’en 1700, date de la mort de Charles II.

Au cours du XVI e siècle, c’est-à-dire au cœur de son Siècle d’or, l’Espagne prend le contrôle d’une grande partie de l’Europe en même temps qu’elle établit son empire colonial sur le Nouveau Monde.

Le XVII e siècle est en revanche une période de déclin, qui s’achève par l’arrivée au pouvoir d’une nouvelle dynastie, les Bourbons (1700). 3. 1 Influence d’Érasme Durant cette période, les écrivains espagnols sont guidés par les mêmes idées philosophiques et artistiques que celles qui circulent alors dans la Hollande, l’Italie ou la France de la Renaissance.

L’influence majeure est celle du savant et humaniste hollandais Érasme.

Les œuvres de ses disciples espagnols, parmi lesquels le philosophe Juan Luis Vives (1492-1540) et le théologien Juan de Valdés, font d’ailleurs l’objet de nombreuses traductions dans toute l’Europe.

Le même succès accueille les œuvres de leur contemporain, le moine franciscain, écrivain et historiographe Antonio de Guevara y de Norona.

Les disciples d’Érasme dominent la vie littéraire espagnole, rédigeant de nombreux dialogues humanistes, ainsi que des écrits historiques. Les historiens les plus importants du Siècle d’or sont Diego Hurtado de Mendoza (1503-1575) et le jésuite Juan de Mariana de la Reina (1536-1624). 3. 2 Thèmes et styles poétiques 3.2. 1 Poésie pastorale La poésie pastorale, fiction idyllique relatant la vie quotidienne et les coutumes de bergers de fantaisie, prospère également durant le Siècle d’or.

Les thèmes et la tonalité particuliers de cette poésie, associés aux formes poétiques italiennes — le sonnet, le huitain, le canzone, le tercet et les vers non rimés —, sont utilisés pour la première fois de façon systématique en Espagne par les poètes Juan Boscán Almogáver (v.

1490-v.

1550) et Garcilaso de la Vega.

Ce dernier n’est pas seulement un novateur sur le plan stylistique mais aussi un poète lyrique soucieux d’exprimer des émotions authentiques. 3.2. 2 Poésie de la Contre-Réforme Les innovations ne supplantent pas complètement les traditions établies : anciennes et nouvelles formes poétiques coexistent durant tout le XVI e siècle.

Par ailleurs, la vie religieuse espagnole connaît un nouvel essor vers le milieu du XVI e siècle, en raison notamment de l’inquiétude ressentie par les catholiques espagnols face à la Réforme.

La conséquence la plus tangible, sur le plan littéraire, en est la création d’un nouveau style poétique mieux à même de véhiculer l’idéologie de la Contre- Réforme, plus apte à exprimer des attitudes spirituelles rigoureuses, bien éloignées de celles de la poésie pastorale. Le premier auteur important de cette poésie catholique est un grand érudit, le moine augustinien Luis de León, connu aussi sous le nom de Fray Luis de León et dont les poèmes mystiques mêlent la dévotion chrétienne et le culte de la beauté, l’amour de la nature et la quête de la sérénité.

Un contemporain de Fray Luis, le carme Juan de Yepes y Álvarez, plus connu sous le nom de saint Jean de la Croix, compose ce que de nombreux lettrés considèrent comme les poèmes les plus intenses et les plus lumineux de la langue espagnole, dans lesquels il s’efforce d’exprimer l’ineffable expérience mystique de l’union de l’âme avec Dieu ( Nuit obscure, 1578).

Autre grand poète de cette époque, Fernando Herrera annonce, par son style baroque, l’ère suivante de la littérature espagnole. 3.2. 3 Poésie baroque La poésie baroque, qui se caractérise par la prolifération de procédés rhétoriques (et notamment de métaphores) élaborés pendant tout le XVI e siècle, connaît son apogée au XVII e siècle. Le meilleur exemple de poésie baroque est l’œuvre, devenue emblématique, du poète Luis de Góngora y Argote.

C’est à partir du nom de cet auteur qu’est créé le terme de « gongorisme », utilisé pour désigner de façon générale le style baroque. »

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