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et régi par le cerveau, comme la connaissance elle-même ;

Publié le 23/10/2012

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et régi par le cerveau, comme la connaissance elle-même ; mais elle est le Prius de la connaissance, le noyau de notre être et cette propre force originelle qui crée et entretient le corps animal, en en remplissant toutes les fonctions inconscientes et conscientes : comprendre cette vérité est le premier pas à faire pour pénétrer dans ma métaphysique... C'est cette même volonté qui fait germer le bourgeon de la plante, pour en tirer des feuilles ou des fleurs ; bien plus, la forme régulière du cristal n'est que l'empreinte laissée par son effort d'un moment. Enfin d'une façon générale, en sa qualité de véritable et unique ccirc6ucc-rov, au sens propre du mot, c'est elle aussi qui est au fond de toutes les forces de la nature inorganique, qui se joue et agit dans leurs phénomènes variés, qui prête de la force à leurs lois, et se laisse reconnaître jusque dans la matière la plus brute sous forme de pesanteur : voilà la seconde vérité, le second pas à faire dans ma théorie fondamentale, et qui exige déjà une plus longue réflexion. Mais ce serait la plus grossière des méprises que de croire qu'il s'agit ici d'un simple mot destiné à désigner une grandeur inconnue : c'est au contraire la plus réelle de toutes les connaissances réelles qui est ici en question. C'est en effet la réduction de ce qui est tout à fait inaccessible à notre connaissance immédiate, c'est-à-dire d'une notion à nous étrangère et inconnue dans son essence, et que nous dénommons du terme de force naturelle, à ce dont nous avons la connaissance la plus exacte et la plus intime, mais qui ne nous est pourtant donné qu'au dedans de notre être propre, pour être ensuite transporté par nous aux autres phénomènes. C'est l'idée que la substance intime et originelle est identique, quant à sa matière, dans tous les changements et mouvements des corps, si variés qu'ils soient ; mais que la seule occasion d'en acquérir une connaissance précise et immédiate nous est fournie par les mouvements de notre propre corps et qu'à la suite de cette expérience nous lui devons donner le nom de volonté. C'est enfin l'idée que la force qui agit et se meut dans la nature et se manifeste dans des phénomènes de plus en plus parfaits, après s'être élevée assez haut pour que la connaissance l'éclaire d'une lumière directe, c'est-à-dire une fois parvenue à l'état de conscience de soi, nous apparaît comme étant cette volonté, cette notion dont nous avons la connaissance la plus précise et qui par cela même, loin de pouvoir s'expliquer par quelque élément étranger, sert bien plutôt elle-même d'explication à tout le reste. Elle est donc la chose en soi, autant qu'une connaissance quelconque peut y atteindre. Elle est ainsi ce qui doit s'exprimer de n'importe quelle manière, dans n'importe quelle chose au monde : car elle est l'essence du monde et la substance de tous les phénomènes. Ma dissertation sur la Volonté dans la nature est entièrement consacrée au sujet de ce chapitre et contient les témoignages de savants impartiaux sur ce point capital de ma doctrine. (Monde, III, 106-107.) 2. LIBERTÉ ET NÉCESSITÉ. LE MONDE ABSURDE ? Il s'ensuit que le monde, avec tout ce qu'il contient, semble être le jeu sans but et par là incompréhensible d'une éternelle nécessité, d'une insondable et inexorable 'Avyx77. Il n'y a qu'un moyen de supprimer ce qu'il y a de choquant, de révoltant même dans cette conception inévitable et irréfutable du monde : c'est d'admettre que tout être en ce monde, phénomène d'une part et nécessairement déterminé par les lois phénoménales, est d'autre part en soi-même volonté, et volonté absolument libre, puisque la nécessité n'existe jamais que par les formes, tout entières contenues dans le phénomène, c'est-à-dire ne résulte que du principe de raison sous ses différents aspects. Mais une telle volonté doit posséder aussi l'aséité, puisque étant libre, c'est-à-dire à titre de chose en soi, non soumise au principe de raison, elle ne peut dépendre d'aucune autre chose, pas plus dans son existence et dans son essence que dans sa conduite et dans son activité. Cette hypothèse seule permet d'introduire assez de liberté pour faire contrepoids à la fatale et rigoureuse nécessité qui régit le cours du monde. On n'a donc, à vrai dire, qu'à choisir entre deux choses : voir dans le monde une pure machine, animée d'un mouvement nécessaire, ou en reconnaître comme l'essence propre une volonté libre, dont la manifestation directe n'est pas l'activité, mais tout d'abord l'existence et l'essence des choses. Cette liberté est par suite transcendantale et coexiste avec la nécessité empirique, aussi bien que l'idéalité transcendantale des phénomènes avec leur réalité empi- tuque. L est a cette seule conamon, je 1 al montre aans mon mémoire sur la Liberté de la volonté, que l'action d'un homme lui appartient encore en propre malgré la nécessité avec laquelle elle résulte de son caractère et des motifs, et c'est là précisément ce qui fait attribuer l'aseité à son être. Il en est maintenant de même pour toutes les créatures de ce monde. — La philosophie devait réunir et concilier la nécessité la plus rigoureuse, établie de bonne foi, développée avec une intraitable logique, et la liberté la plus parfaite, poussée jusqu'à la toute-puissance : le seul moyen d'y parvenir sans choquer la vérité était de placer toute la nécessité dans l'activité et dans le fait (operari), toute la liberté au contraire dans l'existence et dans l'essence (esse). Ainsi se résout une énigme, qui ne doit d'être restée aussi vieille que le monde qu'à l'emploi de la méthode directement opposée, et aux efforts incessants entrepris pour chercher la liberté dans l'operari, la nécessité dans l'esse. Pour moi, je dis au contraire : tout être, sans exception, agit avec une rigoureuse nécessité, mais en même temps il existe et il est ce qu'il est en vertu de sa liberté. On ne peut donc rencontrer chez moi ni plus ni moins de liberté et de nécessité que dans aucun système antérieur ; et cependant ma doctrine semble pécher tantôt dans un sens, tantôt dans l'autre, selon qu'on est choqué de voir attribuer la volonté aux faits naturels expliqués jusqu'ici par la simple nécessité ou de trouver accordée à l'action des motifs la même nécessité rigoureuse qu'à la causalité mécanique. Je me suis borné à intervertir les places : la liberté a été transportée dans l'esse et la nécessité a été limitée à l'operari. Bref, le déterminisme est solidement établi : en vain depuis quinze siècles déjà s'efforce-t-on de l'ébranler, sous l'influence de certaines chimères bien connues, qu'on ne peut pas encore nommer de leur vrai nom. Mais cette théorie fait du monde un jeu de marionnettes, tirées par des fils, les motifs, sans qu'on puisse seulement découvrir de qui il doit faire l'amusement : la pièce a-t-elle un plan, c'est le fatum ; n'en a-t-elle pas, c'est l'aveugle nécessité qui la dirige. — Il n'est qu'un moyen pour se sauver de cette absurdité : c'est d'admettre que l'essence et l'existence de toutes choses est la manifestation d'une volonté réellement libre, qui se reconnaît justement là elle-même ; car, pour son acti-

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