former d'autres, conformes à son bon état ; jugements que d'aucuns, par ignorance, qualifient de vrais, alors que, pour ma part, je prétends que les uns sont meilleurs que les autres, mais nullement plus vrais.
Publié le 22/10/2012
Extrait du document
«
198 PLATON PAR LUI-MÊME
-S.
Mais alors, Protagoras, nous aussi, nous disons
ce
qui semble vrai à un homme, ou plutôt à tous les
hommes, quand nous disons qu'il n'en est aucun qui
ne s'estime en certains domaines plus savant que les
autres, en d'autres domaines moins savant que
d'autres; pas un, tout au moins dans les périls
extrêmes, quand ils se déchaînent dans les guerres, les
maladies,
ou sur mer, qui ne considère comme des
dieux ceux qui contrôlent chacune de ces situations ;
s'il voit
en eux ses sauveurs, c'est uniquement parce
qu'ils sont supérieurs en savoir.
A vrai dire, toutes les
affaires
humaines sont pleines de gens en quête de
maîtres et de chefs, pour eux-mêmes, pour les autres
animaux et pour leurs travaux, et pleines, d'autre part,
de gens qui estiment qu'ils sont capables d'enseigner,
capables de commander.
Et en tout cela, que dire
sinon que les hommes eux-mêmes pensent qu'il y a
parmi eux science et ignorance?- T.
Rien d'autre.
-S.
Et ils pensent que la science, c'est la pensée
vraie, et l'ignorance, l'opinion fausse?- T.
Bien sûr!
- S.
En ce cas, Protagoras, que ferons-nous de ton
discours ? dirons-nous que ce que les hommes pensent
est toujours vrai, ou bien que c'est tantôt vrai, tantôt
faux? dans les deux cas, la conséquence c'est qu'ils ne
jugent pas toujours vrai, mais également vrai et faux.
Examine en effet, Théodore, si toi, ou l'un des disci
ples
de Protagoras, vous êtes disposés à prétendre
qu'il n'y a personne à regarder quelqu'un d'autre
comme ignorant et jugeant faux.
- T.
On ne peut y
croire, Socrate.
-S.
C'est pourtant la conséquence
nécessaire de la thèse qui soutient que l'homme est la
mesure de toutes les choses.
- T.
Comment cela?
-S.
Lorsque après avoir formé un jugement dans ton
esprit, tu m'exprimes une opinion sur quelque chose,
admettons que, selon la thèse de Protagoras, pour toi
cette opinion soit vraie; mais faut-il admettre que
nous, les autres, nous ne pouvons être juges de ton
jugement, à moins de juger toujours que ton opinion
est vraie? n'y a-t-il pas plutôt des milliers d'opposants
qui opposent leurs opinions aux tiennes et pensent.
»
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