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hugo 3 poemes analyse

Publié le 08/05/2014

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hugo
VICTOR HUGO (1802- 1885) "Fonction du poète", Les Rayons et les Ombres (1840) Dans cette composition, formée de 6 dizains contenant des vers octosyllabiques (rimes : A-A-B-B-C-C-D-E-E-D), Victor Hugo expose ses idées sur la fonction du poète. Le poème commence avec le mot « Dieu » , figure centrale dans cette nouvelle conception de la poésie. C'est Dieu qui veut que, dans les temps « contraires », c'est-à-dire dans les temps de crise, chacun contribue à faire avancer la société, y compris le poète. Ce dernier doit s'occuper des problèmes de la société, et s'il ne le fait pas, il mérite une punition divine (« malheur »), il deviendrait un poète qui s'isole dans un désert (métaphore de l'abandon de la société par le poète), un « penseur qui se mutile », car il a choisi volontairement de ne pas s'occuper des problèmes des autres dans sa poésie. Il a donc « mutilé » sa pensée, il l'a amputée. Ce verbe, qui normalement s'applique à l'aspect physique, sert ici à représenter quelque chose de mental, comme la « cité » représente la vie sociale que ce poète veut abandonner à son sort. Par contraste, on peut déjà comprendre comment doit se comporter un vrai poète : il doit se sentir impliqué par les problèmes de la société, il doit s'engager et utiliser la poésie également pour traiter les sujets sociaux et servir ainsi la société : c'est la volonté de Dieu et il faut donc la respecter. Dans la deuxième strophe, Hugo reprend le thème du poète investi d'un pouvoir divin, « pareil aux prophètes », celui de voir l'avenir, de l'illuminer, avec la torche, la lumière, qu'est la poésie. Il est considéré par les gens comme « l'homme des utopies », car ils ne comprennent pas ce qu'il dit, mais lui, fidèle à la consigne que lui a donnée Dieu, continue à penser et à créer de la poésie, insensible à toute forme de critique. Dans le troisième dizain, Hugo nous montre la différence entre le poète tel qu'il le conçoit et le peuple : « Il voit, quand les peuples végètent. » : le peuple est sans réaction, il est veule, passif, car la situation est très précaire, mais le poète « voit» le futur (« Les choses qui seront un jour. ») Même si on se moque de lui, il continue à penser et à offrir des visions que la foule ne comprend pas encore et que certains critiques superficiels ou hypocrites ne peuvent pas comprendre ou admettre ouvertement. Dans la quatrième strophe, Hugo s'adresse directement au peuple et lui demande d'écouter le poète, défini comme « rêveur sacré » car ce qu'il sait lui vient de Dieu  (« Dieu parle à voix basse à son âme"). Il est donc un intermédiaire entre Dieu et les autres hommes. Grâce à Dieu qui a touché son âme, il peut connaître le futur et rendre ainsi moins obscur le présent des hommes. Il possède également la douceur, la sensibilité des femmes pour réussir à ressentir et à exprimer les malaises du peuple. Dans la cinquième strophe, Hugo représente les difficultés que le poète rencontre dans la vie de tous les jours (« les épines, l'envie et la dérision ») et malgré tout, il continue à penser, à partir de la tradition, représentée également par les « ruines » au-dessus desquelles le poète s'abaisse pour justement cueillir la tradition, la base pour construire la nouvelle culture. La strophe s'achève sur une métaphore, un symbole : la poésie est un arbre ayant des racines (le passé), un tronc (le présent) et un feuillage (le futur). Hugo veut par là nous dire que l'on ne doit pas faire table rase du passé. Au contraire, la poésie doit tenir compte de la tradition, même si, à travers le don de la prophétie, elle est même déjà projetée vers le futur. Dans la dernière strophe, on reprend le thème de la lumière de la poésie qui est en quelque sorte associée à celle de Dieu. Cette lumière va tout inonder et arriver à tous les hommes, qu'ils soient riches (« Louvre ») ou pauvres (« chaumière »). La poésie est donc présentée comme populaire : c'est « l'étoile qui mène à Dieu rois et pasteurs ! » : on reconnaît facilement la référence à l'épisode biblique de la Nativité du Christ, avec les rois mages et les pasteurs qui sont guidés par la comète vers la grotte où est né Jésus pour lui rendre hommage. Cette naissance fut annoncée par les prophètes. De la même manière les poètes (prophètes) annoncent l'arrivée d'un avenir meilleur et guident, avec la lumière divine de leurs poésies, le peuple vers Dieu. On peut ainsi dire que le cercle se referme : Dieu communique ses pensées aux poètes qui les transcrivent sous forme de poèmes ; et les hommes, destinataires de ces poèmes, sont ainsi reconduits vers Dieu, pour le vénérer, le contempler, le prier. (DIEU ? POETE ? HOMMES ? DIEU). Hugo dans cette composition est conscient d'appartenir à ce type de poète. La force de l'inspiration qu'il ressent est donc d'origine divine et lui permet de parler des problèmes qui affligent l'humanité et de guider cette dernière vers l'avenir et aussi vers Dieu lui-même, qui donc est considéré comme créateur de l'univers, mais aussi comme inspirateur de la grande poésie. "Clair de lune", Les Orientales (1829) : Victor Hugo raconte ici un épisode de la lutte entre les Grecs et les Turcs : les Turcs ont mis encore vivants des Grecs dans des sacs et les ont jetés dans la mer. Ce poème fit scandale à l'époque : on n'admettait pas alors qu'on parle de sujets si violents, si cruels, si macabres dans la poésie. Hugo se défendit en disant que « en poésie, tout a droit de cité ». Le poème se compose de 5 quatrains aux rimes embrassées : A - B - B - A Dans la première strophe, on a la personnification de la lune : elle joue avec les flots comme ferait un enfant : ce sont les reflets de la lune sur la mer. Le poète nous donne une impression de paix, de sérénité à tout le cadre. Toute la description de cette strophe est fondée sur l'impression du calme, du jeu de la lune sur la mer, les ondes et la sultane qui observe ce petit tableau. Dans la deuxième strophe, le poète nous apprend que cette sultane, enfin libre (elle a pu se mettre à la fenêtre), joue de la guitare en contemplant la mer. A l'improviste, elle entend quelque chose d'étrange : « Un bruit sourd frappe les sourds échos » (noter l'allitération en « r »)   et se demande ce que c'est. A partir de là, son monologue intérieur est transcrit au discours indirect libre, laissant ainsi le doute sur la personne qui se pose les questions (est-ce la sultane ? est-ce le poète ?). La première hypothèse est qu'il pourrait s'agir d'un vaisseau turc, « tartare » (exotisme) venu de l'île grecque de Cos : le bruit insolite serait celui des rames (à noter encore l'allitération en « r » du dernier vers).  Le jeu des hypothèses continue dans la troisième strophe : il s'agit peut-être de cormorans qui vont jouer au fil de l'eau qui poétiquement « roule en perles sur leur aile ». Troisième et dernière hypothèse, la mois réaliste, celle d'un djinn, c'est-à-dire un génie maléfique de la mythologie arabe, qui détruirait les créneaux de la tour (là aussi, à noter l'allitération en « r « ). La quatrième strophe commence par une question qui en quelque sorte est la question dominante : qui fait du bruit ? mais Hugo y a ajouté un élément exotique en faisant référence au harem, le sérail des femmes. Le reste de la strophe annonce la conclusion : on refuse les trois hypothèses exprimées précédemment (données d'ailleurs dans un ordre différent : cormorans, djinn, vaisseau). Toute la strophe est caractérisée par l'allitération en « r » qui donc a ici la fonction d'exalter le bruit mystérieux que la sultane a observé. On arrive à la dernière strophe qui met fin au mystère et révèle le drame historique des grecs enfermés vivants dans des sacs et jetés dans la mer : « Ce sont des sacs pesants, d'où partent des sanglots. » : des hommes sanglotent dans les sacs. On pourrait voir « se mouvoir dans leurs flancs comme une forme humaine. » : donc plus de doutes ! dans ces sacs il y a des hommes qui bougent et qui sanglotent, parce qu'ils savent que la mort va arriver : la punition infligée par les Turcs aux Grecs est rendue dans toute son horreur. Le poème se termine par la reprise du premier vers (« La lune était sereine et jouait sur les flots. ») qui cette fois n'est pas insérée dans un cadre idyllique, mais dans un cadre dramatique. Il acquiert donc toute autre valeur en fonction du contexte nouveau qui s'est crée tout au long de la narration. En conclusion, on trouve beaucoup d'éléments romantiques dans ce poème : le clair de lune (un topos romantique), le jeu des contrastes (sujet apparemment idyllique/drame final ; beauté de la nature et cruauté de l'acte accompli par les turcs), l'exotisme (sultane, turc, Cos, tartare, sérail, djinn), l'envie de liberté (la sultane enfin libre) , la personnification de la nature (le lune qui joue avec les flots) ; la fantaisie rendue également par les questions et les tentatives de réponses, la dernière surtout avec l'évocation du djinn. Victor Hugo dénonce, à travers un paysage magnifique, merveilleux, et une lune pure qui "brille sur les flots" la cruauté des Turcs vis à vis des Grecs, qui cherchaient simplement leur indépendance... Ainsi nous présente-t-il, à travers le regard de la sultane, un bruit, qui au départ est assimilé à un bruit anodin de la nature, et qui devient, à la fin du poème, le bruit de sacs jetés dans l'eau, et où sont enfermés des Grecs... On peut aussi y voir un appel implicite de Victor Hugo en faveur de l'indépendance grecque. Ici une animation en Flash que j'ai réalisée avec ce poème : http://www.webalice.it/loryuno/mes-creations/flash-swish/hugo-lune/ "Demain, dès l'aube", Les Contemplations (1856) : Victor Hugo écrit ici un de ses poèmes les plus célèbres : il y évoque le quatrième anniversaire de la mort de sa fille Léopoldine, qui est morte noyée dans la Seine le 4 septembre 1843. Il l'écrit le 4 octobre 1847, mais la date du 3 septembre 1847, veille du quatrième anniversaire, l'insère d'une façon plus significative dans ce culte du souvenir et exalte l'idée de l'attente de cette rencontre physique et spirituelle avec sa défunte fille. Cette pièce nous raconte en trois strophes le pèlerinage annuel qu'il effectuait chaque année du Havre jusqu'au cimetière de Villequier. Ce petit poème est composé de 3 quatrains d'alexandrins, avec des rimes croisées (A - B - A - B). Hugo commence de façon insolite : trois indications temporelles, la première plus vague « demain » et les deux suivantes qui se réfèrent à l'aube, avec un enjambement pour mettre en relief le projet du départ « je partirai. ». A partir de là, apparaît pour la première fois l'apostrophe à sa fille, qui n'est pourtant jamais nommée dans la composition : « Je sais que tu m'attends. » Léopoldine ne répond pas, mais elle est présente, comme destinataire de cette composition, un véritable hommage à la mémoire de cette jeune fille prématurément disparue. Hugo, lui aussi est au centre de cette composition, par la répétition du pronom sujet « Je » : « J'irai (?) J'irai (?) Je ne puis (?) ». Léopoldine attend son père et lui, il le sait, comme il sait qu'il ne peut pas rester loin d'elle : l'attente est donc réciproque, désirée et profonde. Dans le deuxième quatrain, Hugo insiste sur l'idée de la communion entre lui et sa fille. Il sera concentré sur l'idée de sa fille : il ne pensera qu'à elle de façon si exclusive qu'il ne sera pas attiré par la nature et aura, durant son voyage à pieds vers Harfleur l'attitude de la prière « le dos courbé, les mains croisées. ». A noter la présence de trois adjectifs au début des vers 7 et 8, «seul » «inconnu » «triste » qui insistent sur l'isolement du poète et sur sa tristesse, encore bien forte après quatre ans de deuil. Dans la strophe finale, le poète déclare qu'il verra le coucher du soleil « l'or du soir qui tombe ». les voiliers sur la mer, au loin, en direction d'Harfleur (et donc du Havre), mais il sait qu'il ne sera pas attiré par ces éléments, habituellement bien attrayants. Il ira sur la tombe de Léopoldine qui se trouve à Villequier (qui n'est pas citée dans la composition) pour y déposer un bouquet de houx vert et de bruyère en fleur, des fleurs sauvages à la mémoire de sa fille. A noter le contraste entre les rimes tombe/fleur, comme pour montrer le contraste entre la vie et la mort. Le poème est très bref, mais d'une extrême intensité. Malgré sa brièveté, on y trouve beaucoup d'éléments : une infinie douleur pour la perte d'une fille, une grande présence spirituelle, la conviction que l'au-delà existe, une introspection faite de pensées, de prières, la nature évoquée dans toute sa beauté et sa poésie, mais niée par la volonté de ne faire émerger que la force d'une communion continuelle entre un père et sa défunte fille, le tout dans un contexte où le christianisme et ses rituels filtrent toute la composition : Hugo parle avec l'âme de sa fille, qui l'attend, qui « voit » ce qu'il fait, et il se rend au cimetière pour poser des fleurs sur sa tombe, après un véritable pèlerinage qui dure du matin jusqu'au soir. Le style de Hugo mêle la simplicité et l'élégance. Le tout est d'une grande clarté et d'une grande intensité émotionnelle. Le lecteur attentif ne peut qu'être touché par la délicatesse et la profondeur de ce témoignage. ************************************************************************************* Recherches Internet : Voici des détails intéressants que j'ai trouvées sur le site suivant : http://www.univ-lehavre.fr/cybernat/pages/hugovill.htm Léopoldine s'est mariée à l'âge de 19 ans. Quelques mois plus tard il y a le drame :. « A l'occasion d'un voyage à Caudebec, Léopoldine, son mari, ainsi que deux autres personnes s'embarquent dans le nouveau voilier de Charles Vacquerie. L'embarcation, trop légère, est lestée à l'aide de pierres récoltées sur le quai. Suite à une rafale violente et soudaine l'embarcation est déséquilibrée par le mouvement des pierres dans le bateau. Les deux personnes accompagnant le couple périssent, Léopoldine ne sait pas nager et se noie sous les yeux de son mari qui, pourtant sauvé, se laisse couler dans la Seine. » Elle sera enterrée avec son mari à Villequier. Cette image google nous montre les lieux indiqués directement ou indirectement dans le poème de Hugo. D'après un calcul que j'ai fait en partant du site suivant : http://mappe.alice.it/ - volet CREA ITINERARIO). il y a 49,2 km entre Le Havre, où habite habituellement Hugo à cette époque, et Villequier, où se trouve la tombe de Léopoldine : de Villequier, il est possible de voir les bateaux au large de Harfleur, pas très loin du Havre. Probablement la distance doit être un peu inférieure, puisque V. Hugo n'a pas pris la route, mais il a tracé une ligne droite qui passe au milieu de la nature (il parle de forêt et de la montagne dans son poème). La distance effective pourrait être d'environ 40 km, ce qui est toujours une très longue distance à faire à pied. Voir aussi le site suivant : http://www.sequana-normandie.com/villequier.htm (premiers témoignages sur le drame et réactions de V. Hugo). Enfin ici une animation que j'avais faite avec le logiciel Flash au sujet de ce poème : http://www.webalice.it/loryuno/mes-creations/flash-swish/hugo-demain/ L. Diprossimo

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