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Jeremy BENTHAM (1748-1832) Les droits, les obligations et les délits sont des créations de la loi

Publié le 19/10/2016

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Jeremy BENTHAM (1748-1832)

Les droits, les obligations et les délits sont des créations de la loi

Dans un corps de loi tout roule sur des délits, des droits, des obligations, des services. Il faut donc se faire des idées claires de ces termes abstraits, et pour cela il faut savoir comment ces différentes notions se sont formées, et quels sont leurs rapports réciproques. Montrer leur génération, c'est montrer leur nature.

On peut aisément imaginer une époque où les hommes existaient sans connaître des lois, des obligations, des délits, des droits : qu'y avait-il alors ? Les personnes, les choses, les actions : les personnes et les choses, les seuls êtres réels ; les actions, qui n'existent que dans un instant fugitif, dans un moment donné, qui périssent en naissant, mais qui laissent une postérité nombreuse.

Parmi ces actions, les unes produisaient de grands maux, et l'expérience de ces maux donna naissance aux premières idées morales et législatives. Les plus forts voulurent arrêter le cours de ces actions malfaisantes, et pour cela ils les transformèrent en délits. Cette volonté, revêtue d'un signe extérieur, reçut le titre de loi.

Ainsi, déclarer par une loi que tel ou tel acte est prohibé, c'était ériger cet acte en délit. Assurer aux individus la possession de tel ou tel bien, c'était leur conférer des droits. Ordonner aux hommes de s'abstenir de tous les actes qui pouvaient nuire à la jouissance de tels ou tels autres, c'était leur imposer une obligation. Les assujettir à contribuer par tel ou tel acte à la jouissance de leurs semblables, c'était les soumettre à un service. Les idées de loi, de délit, de droit, d'obligation, de service, sont donc des idées qui naissent ensemble, qui existent ensemble, qui sont et qui demeurent inséparables.

Ces objets sont tellement simultanés que tous ces mots peuvent se traduire indifféremment les uns par les autres. La loi m'ordonne-t-elle de vous nourrir ? Elle m'impose l'obligation de vous nourrir ; elle vous accorde le droit d'être nourri par moi ; elle convertit en délit l'acte négatif que je ferais en omettant de vous nourrir ; elle me soumet à vous rendre le service de vous nourrir. - La loi me défend-elle de vous tuer ? Elle m'impose l'obligation de ne pas vous tuer ; elle vous accorde le droit de n'être pas tué par moi ; elle érige en délit l'acte positif que je ferais en vous tuant ; elle exige de moi de vous rendre le service négatif qui consiste à m'abstenir de vous tuer.

Ce n'est qu'en créant des délits (c'est-à-dire, en érigeant certaines actions en délits) que la loi confère des droits. Si elle confère un droit, c'est en donnant la qualité de délits aux diverses actions par lesquelles la jouissance de ce droit serait interrompue ou contrariée. La division des droits peut donc se rapporter à la division des délits.

Les délits, en tant qu'ils concernent un individu déterminé, peuvent se distribuer en quatre classes, suivant les quatre points dans lesquels on peut le blesser : délits contre la personne, délits contre l'honneur, délits contre les biens, délits contre la condition. On peut de même distribuer les droits en quatre classes : droits de sûreté pour la personne, droits de sûreté pour l'honneur, droits de sûreté pour les biens, droits de sûreté pour la condition.

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