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la révolte est-elle un fait ponctuel ou participe-t-elle de l'essence de la jeunesse ?

Publié le 08/02/2014

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LA SYNTHÈSE Le plan détaillé est rappelé entre crochets pour vous aider mais il ne doit en aucun cas figurer sur votre copie. Il faudra donc soigner les introductions et les conclusions partielles ainsi que les transitions entre les différentes parties et sous-parties afin de guider le correcteur. [Introduction] Depuis le romantisme au XIXème siècle, la jeunesse ne cesse d'être associée à l'idée de révolte. C'est même un cliché : être jeune, c'est être opposé à tout ce qui est institutionnalisé, validé par les générations précédentes. Le corpus proposé reprend cette idée et lui apporte de nombreux éléments de nuance. L'extrait de La Confession d'un enfant du siècle d'Alfred de Musset confirme cette image en décrivant justement cette génération, écrasée entre un passé trop lourd avec lequel elle ne sait si elle pourra rivaliser dans un avenir incertain. La révolte de Mai 68 ne partage qu'en partie les mêmes causes : la jeunesse française vivait alors une période faste et avait échappé à la guerre. C'est davantage la peur de l'avenir qui l'a motivée que le poids du passé ou la fadeur du présent, comme le montrent Laurent Joffrin et Michel Winock. La célèbre photographie de Che Guevara est d'ailleurs emblématique : elle rappelle à elle seule l'association entre la jeunesse et la révolution. Les choses ne sont pourtant pas si simples et on peut s'interroger : la révolte est-elle un fait ponctuel ou participe-t-elle de l'essence de la jeunesse ? Après avoir analysé l'état d'esprit de la jeunesse, nous verrons quels sont les éléments qui l'influencent. [I. Une jeunesse désenchantée ?] C'est un lieu commun que le corpus bouscule un peu : la jeunesse n'est pas forcément désenchantée. [A. La jeunesse : un âge difficile ?] L'extrait du roman d'A. de Musset, La Confession d'un enfant du siècle, publié en 1836, brosse le portrait de la jeunesse romantique. Pour elle, le présent est chaotique, et elle est écrasée entre le poids d'un passé glorieux et un avenir incertain. L'état d'esprit naturel du romantique est la mélancolie. Mais le présent n'est pas toujours impossible à vivre : Laurent Joffrin, dans son essai Mai 68, publié pour les vingt ans des événements, rappelle que les années 1960 ont été une époque facile, marquée par une 1 forte croissante et par la consommation. C'est même à cette période d'insouciance qu'a pu émerger l'adolescence. Michel Winock, dans un article publié dans L'Histoire, intitulé «La révolution a-t-elle eu lieu ? «, le confirme mais souligne les affrontements simultanés à l'étranger, ce que rappelle aussi la photographie de Che Guevara, chef révolutionnaire en Amérique du Sud, prise par Alberto Korda en 1960. [B. Un avenir incertain] Ce n'est pas donc pas tant le présent qui pose problème à la jeunesse que l'avenir. M. Winock l'explicite : si les jeunes des années 1960 vivent une époque heureuse, cela ne les empêche pas d'être inquiets pour leur avenir, même s'ils vivront mieux que leurs parents, et ce quel que soit le présent. L. Joffrin montre aussi que les « baby-boomers « sont nés comme une promesse d'avenir dans une période de reconstruction, tandis qu'A. de Musset dit bien que les romantiques sont nés pour la guerre et la conquête et qu'ils se retrouvent démunis. Leur avenir est d'autant plus difficile à porter que leur passé les met au défi de mieux faire et de trouver une forme de revanche, ce qui n'est pas le cas des « babyboomers «. La jeunesse est donc l'âge des contradictions : elle peut être difficile ou facile à vivre, rien n'y fait, elle est une période de questionnement et de peur de l'avenir. Le corpus nous montre que ce n'est pas sans raison. [II. Les raisons du désenchantement] Plusieurs éléments peuvent expliquer cette défiance. [A. Des événements fondateurs] On constate, tout d'abord, le poids d'événements fondateurs. Les romantiques, dans le texte d'A. de Musset, comme les « babyboomers « dans le texte de L. Joffrin, sont nés pendant la guerre. Ils ont grandi pendant les campagnes napoléoniennes. Ils partent donc dans la vie avec le poids d'un passé chargé et d'une revanche à prendre. Les « baby-boomers « naissent dans l'effervescence de la libération des prisonniers, puis de la victoire et grandissent dans la période de la reconstruction. Ils seront néanmoins épargnés par l'histoire et Mai 68 est rattaché en partie, pour M. Winock, aux événements et aux soulèvements qui ont lieu à l'étranger, notamment en Amérique du Sud et que symbolise Che Guevara. 2 [B. L'énergie de la jeunesse] Enfin, fondamentalement, le corpus montre que la jeunesse est d'abord une énergie qui demande à être libérée. Les romantiques qui ont grandi à un moment de conquête sont pleins de force et d'audace, ils ont soif d'action et de conquête. En Mai 68, cela se traduit, comme l'explique M. Winock, par la politisation des étudiants et des lycéens, la mise en place de groupuscules qui vont entrer dans l'action. D'ailleurs, Che Guevara leur servira notamment d'exemple car il représente l'action et le sacrifice de sa propre vie. Son visage, sur la photographie, n'est pas sans rappeler les figures christiques de l'art pictural. [Conclusion] Que la conjoncture soit inquiétante ou pas, le corpus montre que la jeunesse est assez facilement portée à se révolter. Elle est toujours angoissée par son avenir : le passé peut y avoir sa part de responsabilité, le présent aussi. Mais c'est surtout l'indice d'une énergie qui participe de son essence et qui doit s'exprimer. L'ÉCRITURE PERSONNELLE La crise d'adolescence est un passage attendu et redouté par les parents. Les enfants qui vivent alors de nombreux changements, dans leur corps comme dans leur tête, commencent à s'affirmer par rapport aux adultes pour grandir à leur tour. Ainsi, s'opposer à ses parents, se révolter, semble être un passage obligé lorsque l'on est jeune. En effet, être adolescent amène à se positionner par rapport à un monde adulte dans lequel on envisage d'entrer. Pendant un temps important, l'enfant a observé ses parents et il exprime peu à peu une posture par rapport à ce modèle. Dans de nombreux romans, on voit par exemple s'exprimer un rejet des valeurs incarnées par le modèle parental ou familial : Hervé Bazin, dans Vipère au poing, exprime son rejet du monde bourgeois dans lequel il est né ; Annie Ernaux, dans plusieurs de ses romans, analyse l'incompréhension qui a longtemps rempli la relation qu'elle avait avec sa mère, ouvrière et inculte. Au niveau collectif, on constate que les adolescents sont de plus en plus prompts à s'opposer à la société : Mai 68 a été un mouvement social dans lequel la jeunesse et les étudiants ont joué un rôle majeur. Il y a aussi périodiquement des révoltes, même si elles sont moindres : 3 on peut penser au mouvement anti-CPE de 2006, ou encore aux « grèves « des lycéens contre la réforme des lycées pendant l'hiver 2008-2009 Cependant, si les adolescents sont prompts à se révolter contre la société, on constate aussi que cette posture ne dure pas sur le même mode tout au long de la vie. A l'âge adulte, il devient assez évident que pour changer le monde, il faut intégrer les institutions sociales. Bruno Julliard, par exemple, président de l'UNEF au moment des grèves anti-CPE de 2006, est devenu conseiller municipal de la ville de Paris pour le Parti socialiste en 2008. Plus emblématique encore, Daniel Cohn-Bendit, figure clé de Mai 68, est aujourd'hui député européen. La révolte n'est pas pour autant l'apanage de la jeunesse, mais on constate qu'elle s'exprime avec davantage de violence à ce moment de la vie. La révolte prend ensuite d'autres formes, sans pour autant disparaître. Par ailleurs, la révolte ne connaît pas les mêmes degrés et n'a pas le même sens en fonction des régimes dans lesquels elle s'exprime. Pour les étudiants et les ouvriers chinois qui se sont révoltés place Tian An Men à Pékin, il y avait un véritable enjeu politique. Si, aujourd'hui, lycéens et étudiants français sont prêts à faire la « grève«, c'est-à-dire à arrêter les cours pendant quelques jours, ils ont finalement des valeurs différentes : nul ne songe alors à renverser la République. Leurs envies sont souvent liées à un idéal de consommation : ils veulent réussir pour s'insérer dans la société. A travers leurs protestations, ils expriment l'angoisse de ne pas y arriver. Finalement, à côté des idéaux révolutionnaires et libertaires sur le plan moral des années 1960-1970, les adolescents des années 2000 font grise mine. Ils ne veulent pas changer la société, seulement s'y insérer le plus sûrement et le plus durablement possible. La révolte nous semble donc être tantôt une nécessité, tantôt une posture. Certes, la crise d'adolescence reste un moment douloureux pour de nombreuses familles, mais les rêves qui animent notre jeunesse semblent loin d'être révolutionnaires à côté de ceux de ses parents. Mais ce constat ne vaut pas pour tous les pays : les régimes totalitaires engendrent des révoltes qui n'ont rien de comparables. 4

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