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La Tour rouge à Halle, Ernst Ludwig Kirchner

Publié le 24/01/2013

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La Tour rouge à Halle, Ernst Ludwig Kirchner, 1915 La Tour rouge à Halle est l'une des oeuvres les plus célèbres de fameux peintre et graveur allemand Ernst Ludwig Kirchner. Daté de 1915 elle est aujourd'hui conservée au Museum Folkwang à Essen. Cet oeuvre de 120 x 90.5 cm est une peinture à l'huile signée par l'artiste. En effet nous pouvons remarquer dans une bandelette orange en bas à gauche du tableau « E L Kirchner 15 ». Cet admirable paysage urbain révèle une fascination de la part de l'artiste pour la vie citadine, idée qu'il partage avec le groupe Die Brücke dont il est l'un des fondateurs. Ce groupe d'artistes met également en avant la puissance de la couleur par le biais de couleurs vives et pures. Ils prônent l'expression de la subjectivité de la pensée de l'artiste, et font leur première exposition à Berlin en 1910. Nous sommes ici à la veille de la première guerre mondiale où il règne une grande instabilité sociale, politique et économique. Nous retrouvons donc dans ces oeuvres une atmosphère pesante et inquiétante. Nous allons tout d'abord étudier l'oeuvre d'un point de vue historique, puis sous un angle iconographique et enfin nous intéresser à l'aspect stylistique. Nous allons dans un premier temps aborder l'oeuvre de manière historique afin de la contextualiser, et de cerner le travail et la pensée de l'artiste. Expressionniste nait en 1880 à Aschaffenburg, Kirchner peint à ses débuts des paysages et des portraits. Mais une fois arrivé à Berlin en 1911 il se lance dans la représentation d'images urbaines telle que des rues, des ponts ou des cafés. Comme la plus part des artistes de ce groupe il a suivis des études d'architecture, ce qui explique peut-être ce gout pour la représentation urbaine. Ces oeuvres n'ont pas pour but le réalisme, mais tendent plutôt à le déformer à travers une critique sociale. Il est également influencé par le Moyen-Age allemand, les oeuvres de Rembrandt et l'art japonais. Il s'intéresse en outre à la gravure sur bois basée sur l'influence de l'art primitif et évolue vers une simplification des traits. Il réalise par ailleurs une gravure sur bois dans laquelle il inscrit, en parlant de Die Brücke : « Est des nôtres quiconque exprime, sans détour et en toute authenticité, ce qui suscite en lui le pouvoir créateur ». Pour cela Kirchner adopte le dessin rapide qui permet l'expression des émotions et ne s'impose aucune règle afin de laisser libre court à son inspiration et sa conscience subjective. Il est donc considéré comme un artiste engagé, ce qui lui vaudra des critiques de la part des conservateurs. Emil Nolde contrairement à ses derniers, déclare que « Des toiles inoffensives ou candides ont rarement de la valeur». Kirchner connait son heure de gloire aux alentours des années 1911, mais souffre des souvenirs qu'il garde de la guerre. Quand le nazisme domine l'Allemagne il est considéré comme dangereux pour la jeunesse allemande et se fait confisquer 639 de ses oeuvres. L'artiste ne s'en relèvera jamais et mettra fin à ses jours le 15 juin 1938 en Suisse. Nous allons, dans un second temps construire une analyse iconographique basée sur la description et l'interprétation. Nous devons tout d'abord préciser qu'il y a une incohérence entre le titre et l'oeuvre elle-même, car nous sommes certes en présence d'une tour, qui est le sujet principal de l'oeuvre. Mais en revanche nous ne trouvons pas de rouge dans la peinture. En effet la tour se place au centre de l'oeuvre et est au milieu de ce qui semble être une place. Notre regard est attiré par cette route orangée qui part du fond droit du tableau, contourne la tour en se rapprochant de nous et s'éloigne de nouveau vers le fond gauche de la peinture. La tour est peu travaillée à l'exception de la base où l'on observe des arcades et une balustrade. Nous pouvons remarquer un bus qui emprunte cette route dans laquelle il se confond, dût au fait qu'ils sont de la même couleur. Puis au second plan on observe une église entourée de bâtiments que l'on peut définir comme des immeubles. Ces bâtiments sont épurés et semblables les uns aux autres. Et enfin au dernier plan nous pouvons contempler un ciel très sombre qui rappelle celui de la nuit. Au milieu de ce dernier se trouve un nuage épais au ton gris blanc qui occupe une grande partie de l'espace. Autour de ce dernier il se dessine une auréole bleu claire qui créer une zone de lumière dans cette oeuvre très sombre. Nous devons à présent interpréter ces éléments. Pour commencer l'oeuvre est vide de toute représentation humaine (hormis le bus), un lieu désert, inquiétant et froid. Ensuite, la tour peut être considérer comme le symbole de l'orgueil humain qui voudrait se passer de Dieux. En effet si l'on se réfère à la bible et à la tour de Babel alors nous nous remémorons l'épisode où Dieux confond les langues afin d'empêcher les hommes d'atteindre leur but. Soit, celui d'atteindre Dieux. Par ailleurs si nous nous référons au Moyen-Age, chaque ville comptait une tour qu'elle défendait et tentait de rendre plus grande et plus belle que celle des rivaux. Il y a visiblement ici un lien étroit avec la guerre dans laquelle est plongée l'Allemagne à cette époque, car la tour peut faire référence à la rivalité qu'il règne entre l'Allemagne et les autres puissances. Ou bien elle peut représenter la folie humaine, et l'émancipation de l'autorité de Dieux que l'Homme démontre en entreprenant cette guerre. Puis le nuage est un symbole intriguant, il se situe dans le ciel, lieux où l'Homme ne peut se rendre. Il est insaisissable et permet parfois de cacher un élément. Il y a donc là visiblement une part de mystère dans cette oeuvre qui est représenté par le nuage. Et enfin l'incohérence du titre montre sans doute un sentiment d'incompréhension de l'artiste face aux évènements qui se succèdent à cette époque. Et pour finir dans un troisième et dernier temps nous allons nous intéresser à l'analyse stylistique de l'oeuvre. Tout d'abord le paysage est pris dans un cadrage de biais dans lequel il place au centre, le sujet principal, c'est-à-dire la tour. L'effet de profondeur est créé par la route qui grossit en arrivant vers nous et s'affine en s'éloignant. Le point de fuite et relativement haut ce qui nous donne l'impression d'être minuscule face à cette ville qui s'impose à nous et cette tour qui se dresse en son centre. En revanche les proportions ne sont pas toutes respectées, mais cela est dût au style de l'artiste qui ne cherche pas à représenter la réalité mais l'impression que la réalité lui laisse. Ainsi nous ressentons une sorte de colère dans ses traits. En effet ces traits sont durs et peu précis ce qui nous laisse une impression de brouillon, bien que nous puissions tout de même clairement distinguer chaque élément. Cette subjectivité de l'artiste se ressent également dans la couleur et la lumière. D'une part les couleurs bleu et orange sont des couleurs opposées sur la palette chromatique. Cela entraine donc un contraste qui donne de la vigueur et de la force à l'oeuvre. D'autre part la lumière n'est pas directe et faible, malgré le nuage qui produit tout de même une zone de clarté. Etant donné que la lumière est faible, les jeux d'ombres le sont aussi. On observe un mélange entre des traits peu précis et l'utilisation des aplats de couleurs. Ce qui nous montre une fois de plus la volonté de ne pas représenter la réalité. Dans cette oeuvre nous avons relevé un point essentiel, celui d'émanciper la peinture du réelle. A travers cette dernière Kirchner expose donc l'idéologie de l'expressionisme. Car au-delà d'être un mouvement l'expressionisme est un état d'esprit qui veut s'affranchir d'un modèle esthétique en explorant tous les domaines de la création. En effet cette oeuvre antinaturaliste se définit ainsi par son manque d'exactitude dans les traits, l'absence de jeux d'ombres et de lumières, et les disproportions. Nous pourrions alors sur ces critères rapprocher cette oeuvre de La nuit étoilée de Van Gogh. En effet elle aussi se définit par une exagération des traits, une inexactitude dans les proportions et en enfin cette volonté de ne pas représenter la nature. Bibliographie : BLISTENE Bernard (dir), Une histoire de l'art du XX°, Edition Beaux-Arts, 2009 http://www.larousse.fr/encyclopedie/personnage/Kirchner/127543

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