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Le Désir Peut-Il Nous Rendre Heureux ?

Publié le 05/12/2010

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L'opinion la plus répandue est que le désir ne peut nous rendre heureux, puisqu'il est la conséquence d'un manque dans notre existence. Or on peut aussi penser que le désir mène au Bonheur, puisqu'il peut en résulter une certaine satisfaction, et un sentiment de plénitude. Le désir mène-t-il alors au bonheur, ou bien empêche-t-il de l'atteindre ?

 

On peut voir que le désir est insatiable, on est jamais réellement contenté, puisque dès qu'on obtient satisfaction à nos caprices, l'esprit se détourne de leur objet, et la force du désir est reportée sur un autre objet. Prenons un enfant qui voudrait qu'on l'aide à faire ses devoirs. Dès qu'on lui aurait prodigué de l'aide, il désirerait toujours plus, c'est-à-dire, qu'on fasse ses devoirs à sa place. Cet enfant désire, en fait, toujours quelque chose de plus grand que ce qu'il ne peut déjà obtenir. C'est dans la nature de l'Homme d'agir de cette manière. A. Schopenhauer, dans Le Monde comme volonté et comme représentation, (1818), écrivait « Mais le désir est-il rempli, aussitôt il en advient de lui comme de ces morceaux goûtés par nous et qui cessent d'exister pour notre sensibilité, dès le moment où nous les avalons. « Cela signifie bien qu'une fois nos vœux exaucés, ils disparaissent, comme ils étaient apparus, de notre esprit, on en récolte donc même pas l'extrême satisfaction auxquels ils auraient dû donner cours. J-J.Rousseau, dans La Nouvelle Héloïse, (1761), disait « On jouit moins de ce qu'on obtient que de ce qu'on espère «. En fait, le désir procure une illusion de Bonheur qui s'évanouit ne fois le désir contenté. 

On peut alors en déduire, comme E. Kant (dans les Fondements de la Métaphysique des mœurs - 1785), qu'il y a une impossibilité pour l'être humain de déterminer le réel objet de nos désirs. On désire, pour désirer, sans vraiment désirer quelque chose en particulier, du moins, cet objet change sans cesse, puisque le désir paraît être insatiable, ou impossible, et sa force infinie.

Le désir est un état de manque. Le manque est un trouble de l'âme, donc le désir créé un trouble de l'âme (contraire à l'ataraxie), et est donc contraire au plaisir, au bonheur, si l'on suit la philosophie d'Épicure dans sa Lettre à Ménécée, (IVème et IIIème siècle avant notre ère). Le désir nous rend alors malheureux.

 

Un désir accompli pourrait pourtant nous emplir de joie et de satisfaction, pas tant pour l'objet acquis que pour le fait et la façon de l'avoir acquis. On pourra être  particulièrement satisfait d'avoir conquis une femme, par la manière dont ça aura été réalisé, et le fait même d'avoir réussi à la conquérir, alors que ça paraissait impossible au début. La femme en elle-même pourra être délaissée après, le seul fait de l'avoir conquise étant en soi un exploit pour soi-même. Il en ressortira une certaine fierté, après cet acte. On pourra dire que le but en soi, n'est pas d'avoir la chose qui nous manquait, mais la façon et le fait de l'avoir obtenue, alors que c'était/ ça paraissait impossible au premier abord. On peut dire que le désir est une sorte d'objectif, de but suprême, un idéal ; Cela pousse donc l'Homme -en général- à se surpasser pour obtenir ce qu'il désire.

Cléanthe pensait « être riche, c'est être pauvre en désirs «. Cette phrase signifie qu'en ayant peu de désirs, on est sûr de pouvoir tous les satisfaire, et d'être absolument comblé. Le contentement est la vraie richesse. Si l'on désire seulement quelques choses, il sera plus facile de toutes les satisfaire que s'il y en avait énormément. 

 

Que le désir rende heureux, ou pas, de toutes façons, il est humain, et on ne peut y remédier. Le désir, on l'a dit, créé un manque, et ne peut donc pas totalement rendre heureux, mais il faut subir quelques malheurs dans la vie, pour réellement apprécier la valeur du bonheur. J-J.Rousseau disait dans La Nouvelle Héloïse, (1761) que « Vivre sans peine n'est pas un état d'homme ; [que] vivre ainsi c'est être mort. «, l'Homme est fait pour subir le malheur, car c'est quand on est malheureux qu'on se rend compte qu'on a été heureux.(« la partie la plus heureuse de notre existence est celle où nous la sentons le moins. « A. Schopenhauer, Le Monde comme volonté et comme représentation, 1818). C'est au moment où on se retrouve sans travail, qu'on réalise qu'on a été un jour heureux. 

L'Homme est d'ailleurs fait de projets, il ne vit jamais à l'instant présent, mais pense toujours à l'avenir : « Ainsi nous ne vivons jamais, mais espérons de vivre, et, nous disposant toujours d'être heureux, c'est inévitable que nous le soyons jamais. « écrivait B. Pascal, dans ses Pensées, (1669). Il vit donc dans l'illusion, puisqu'il rêve toujours à un ailleurs, à un futur, différent donc de ce qu'il vit au moment présent, or le bonheur, c'est l'instant présent : « Carpe Diem « (« cueille le jour « = vit au jour le jour), Horace.

De plus, on se rend également compte avec J-J.Rousseau (dans La Belle Héloïse), que le désir est inévitable, tout homme est condamné à désirer, il ne peut faire autrement : « Celui qui pourrait tout sans être Dieu […] il serait privé du plaisir de désirer ; toute autre privation serait plus supportable. « D'ailleurs, tout le monde désire, même ceux qui ne le pensent pas : les moines par exemple, veulent vivre à l'écart de la société, enfermés, en communion avec la nature, avec dieu. Certes ils ne désirent pas la même chose qu'un Homme « normal «, mais ils désirent l'ascèse, c'est à dire, ils aspirent à ne rien désirer. Cela reste une sorte de désir. Cela correspond à une sublimation de leur part, puisqu'il transfèrent leurs désirs sur l'ascèse.

De plus, l'Homme est soumis selon S. Freud à trois pressions de provenance différente : celles venant du Ça, celles venant du Surmoi, et celle venant de la Réalité. Ces trois « instances « ont chacune leurs  propres désirs vis-à-vis de l'individu, celui-ci doit donc faire compromis, pour convenir à chacune d'entre elles. Seulement, chaque « instance « n'est donc pas complètement contentée, on est donc jamais complètement heureux, mais on ne peut rien y faire.

 

Pour conclure, on peut voir que d'un côté le désir est un obstacle au bonheur, d'un autre côté, il le contente, mais que de toutes manières, c'est indéniable, on ne peut y échapper.

 

Salomé Appéré, TL1

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