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Le risque de liquidité des émetteurs d'obligations sécurisées

Publié le 27/02/2008

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Le risque de liquidité des émetteurs de Covered Bonds

 

 

 

En 2009, le marché des Obligations Sécurisées de Banque (OSB), les Covered (Bank) Bonds, atteignait 2.400 Mds€ (2.300 Mds€), avec une fraction croissante appuyée sur des risques immobiliers (71% contre 66 % en 200x ?). Ce marché et sa pérennité sont importants pour le financement de l’économie, principalement du secteur public et des actifs immobiliers résidentiels ou commerciaux et il est également déterminant pour assurer le financement des banques en Europe, qui l’ont utilisé massivement comme source de funding depuis le début de la crise. La qualité du collatéral, un environnement juridique dérogatoire, particulièrement contrôlé et protecteur, la neutralisation des risques de transformation et le recours de premier niveau sur le groupe bancaire qui les émet, sont quatre fondements qui ont convaincu les investisseurs d’accroître leur exposition sur le risque bancaire.

 

(intertitre) Un risque de liquidité plus qu’un risque de crédit

Dans l’attente de la réouverture du marché de la titrisation, c’est sur ce segment des OSB que se sont concentrés les efforts des autorités nationales et communautaire.

ü  C’est sur cette analyse que la BCE a engagé une politique d’investissement direct sur les OSB en juin 2009 qui s’est achevé en 2009.

ü  Ce sont également sur ces bases que les pouvoirs publics et les banques dans l’Union se sont attachés à améliorer leurs cadres nationaux respectifs, notamment sur la couverture du risque de liquidité[SL1] .

ü  La crise de la dette souveraine et les engagements en matière de soutien par l’Union des Etats membres les moins bien notés a un impact fort sur les OSB, tant le spread de ces passifs sécurisés est corrélé à plus de 95% avec celui des Etats où ils sont implantés.

Seuls sont éligibles au refinancement par obligations sécurisées, y compris dans les modèles purement conventionnels, des actifs au risque faible ou modéré que sont les prêts immobiliers (souvent les prêts au logement) et les prêts au secteur public, dont l’analyse de risque est relativement normée. Toutefois, ces actifs sont également très fortement corrélés à l’évolution des économies sous jacentes. Le principal risque reste celui de liquidité. Il est ainsi un élément déterminant de l’approche de la qualité et de la stabilité des émetteurs d’OSB et ce, d’autant que c’est ce risque qui, combiné à une prise de risque de crédit hors d’Europe, est l’une des causes majeures de l’intervention des pouvoirs publics au cours de ces dernières années.

 

(intertitre) La crise, révélateur de business models fragiles

La crise de liquidité est à l’origine de la fragilisation de certains établissements de crédit spécialisés émetteurs d’OSB. L’abondance de liquidité dans le marché et l’écrasement des rendements a conduit au développement de modèles économiques basés sur la transformation des maturités (voir encadré[SL2] ). Les revenus provenant de cette transformation a constitué, pour l’essentiel, la stratégie de développement de grands établissements spécialisés publics ou privés (d’Europe du Nord ?), à défaut d’un business model plus établi. C’est la gestion défaillante de ce risque qui est l’une des causes majeures des difficultés rencontrées en dehors de France par de grands acteurs bancaires.

L’interruption brutale du fonctionnement du marché du financement à court terme a révélé d’importantes positions de transformation, qui n’ont pu être financées faute de prêteurs confiants. Il faut probablement reconnaître que, parmi d’autres, les banques françaises et leur superviseur ont su éviter de développer ces modèles appuyés sur un risque de transformation et de liquidité. En effet, l’utilisation des OSB par les banques françaises, prêteurs spécialisés ou banques universelles, s’est inscrite à la fois dans un schéma d’encadrement strict du risque de liquidité et de fermeture des impasses, et de financement de la croissance organique de leur base de clientèle propre.

Ce sont dans le même temps les OSB qui ont été l’instrument de gestion et de sortie de crise pour les banques européennes en générant la liquidité longue à des coûts plus supportables que ceux de la dette chirographaire. Au début de l’année 2009, les groupes bancaires français ont rouvert le segment en Europe après le succès de la SFEF[1], qui peut être vue, dans sa construction, comme une gigantesque obligation sécurisée de banque de place, la garantie de l’Etat appuyant des obligations gagées par les créances des banques sur l’économie française et européenne.

 

(intertitre) Une évaluation spécifique pour les OSB

Les actifs de couverture des banques sont granulaires : les profils d’amortissement, la duration des actifs comme leur indexation de taux sont diverses, contrairement à des souches d’obligations sécurisées qui sont généralement in fine et taux fixe pour les émissions benchmark et des placements privés. La performance des actifs peut être affectée par l’évolution du risque de crédit des emprunteurs éligibles (de l’immobilisation, au sinistre partiel ou total) et de la valeur du gage. Elle est également affectée par l’évolution des taux d’intérêt : par exemple, le remboursement anticipé place la banque en risque de réemploi des fonds reçus si le débours actuariel n’est pas couvert. En somme, les actifs de couverture sont en risque sur deux principaux points :

- leur génération propre de cash flow,

- la capacité de l’émetteur à détenir suffisamment de collatéral éligible et peu risqué en réserve ou, à défaut, la capacité de la banque-mère à assurer, sur ses propres forces, la solvabilité et la liquidité de son émetteur d’OSB.

De la même manière, c’est la crise de liquidité qui a amené les agences de notation à changer profondément leur méthodologie d’analyse des émetteurs de covered bonds, essentiellement sur deux plans :

ü  Le lien entre la note de la dette sécurisée et celle de la maison mère / sponsor a été réintroduit comme élément de d’évaluation et de sécurisation.

ü  Dans le même temps, les agences ont accru les contraintes et les stress sur la valorisation et la liquidité des actifs de couverture. Du fait de la volatilité accrue des dettes souveraines, elles ont même récemment pris le chemin de l’évaluation en valeur de marché stressée des créances sur le secteur public.

La BCE de son côté a également récemment resserré la quotité de financement des créances qui constituent l’essentiel du bilan des émetteurs d’OSB.

La gestion prudente des émetteurs français

Le marché, le régulateur et l’agence de notation vont s’assurer de la qualité et de la pertinence du business model et de la robustesse du sponsor pour faire face à d’éventuelles dégradations de son actif de couverture ou à une gestion de la congruence plus ou moins agressive. Le moyen le plus sûr pour un émetteur de rassurer sur sa capacité à maîtriser ce risque est donc probablement de limiter drastiquement l’écart de duration actif/passif et de démontrer sa capacité à rendre liquide la fraction la plus élevée possible de ses actifs pour accéder à la monnaie centrale.

Le volume d’actifs mobilisables en BCE de Société Générale SCF[2] (9 600 milliards d’euros) lui permettrait ainsi dans la configuration actuelle d’assurer sa liquidité bien au-delà de 12 mois. Cette stratégie est au demeurant le reflet d’une politique générale d’utilisation des actifs du groupe Société Générale pour sécuriser sa liquidité depuis plusieurs années. La qualité de ses actifs éligibles lui donne la capacité d’avoir un accès immédiat au refinancement de banques centrales, comme la BCE, pour des volumes importants. Avec une situation de liquidité ainsi assurée pour plusieurs années, la Société Générale SCF a pu poursuivre sereinement son activité tout au long de l’année 2009 et sera en mesure de répondre en 2010 aux besoins des divers opérateurs, publics comme privés. Elle a également pris l’engagement de limiter l’écart de duration actif/ passif à 2 ans au maximum. Dans les faits, cet écart est de l’ordre de quelques mois (3 mois actuellement).

Les émetteurs français d’OSB suivent cette politique prudente de gestion de leur liquidité. La neutralisation du risque de liquidité est aidée par la qualité de nos actifs dont le risque de crédit qu’ils s’agissent de prêts au logement ou de prêts au secteur public, sont parmi les plus performants du G10.

Le resserrement du dispositif législatif et réglementaire sur les sociétés de crédit foncier et l’alignement des covered bonds structurés sur un régime légal spécifique équivalent, s’inscrivent dans un continuum engagé en 1999 avec la réforme des obligations Foncières dont nous avons fêté l’anniversaire le 25 juin de l’année dernière.

 

Pierre MENET

Directeur Général Délégué

SG Société de Crédit Foncier

 

Encadré 1 :

(surtitre) Définition

(titre) Le risque de transformation

Le principe fondamental des covered bonds est celui de la congruence des actifs et des passifs, c’est-à-dire la réduction du gap de duration actif/passif en cash et en taux. Le pool d’actifs de couverture des émetteurs d’obligations sécurisées de banques (OSB) a une maturité généralement supérieure à celles des passifs privilégiés et chirographaires qui les financent. Le principe pour se protéger de ce risque est de conserver une part de surdimensionnement à l’actif, destinée à couvrir le dernier amortissement de la dette privilégiée.

L’écart est donc couvert par la capacité de l’émetteur à générer une liquidité propre sur ses actifs, en les rendant éligibles au refinancement par des mécanismes appropriés. Concrètement, la liquidité de l’actif s’évaluera sur la capacité de l’émetteur de covered bonds à rendre éligible à un refinancement par la banque centrale, la plus importante quotité possible de ses actifs. L’objectif est de pouvoir couvrir le service de ses passifs (principal et intérêts) sur une période de 6 mois (d’après les nouvelles dispositions législatives en France et en Allemagne) à 12 mois (d’après les contraintes des agences de notation) glissants.


[1] Société de Financement de l’Economie Française, mise en place par l’Etat en 2008 pour apporter de la liquidité aux banques françaises

[2] La Société de Crédit Foncier émettrice des obligations sécurisées pour le groupe Société Générale


 [SL1]Serait-il possible de faire un petit encadré (≈500 signes sur ces nouvelles exigences de couverture de risque de liquidité ?)

 [SL2]On pourrait faire du paragraphe sur la congruence actif/passif, un encadré explicatif qui arriverait plus tôt dans le texte pour faciliter la comprehension.

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