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Le Roman Doit-Il, Selon Vous, Privilégier L'Imagination Ou Décrire Fidèlement La Réalité ?

Publié le 30/09/2010

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Le roman existe depuis des siècles, on attribue son apparition au moyen âge. Romans de chevalerie, de capes et d’épées, fantastiques, naturaliste, de science-fiction, ses thèmes sont aussi variés que les périodes phares de l’histoire qu’il a traversées durant tous ces siècles. Cependant, ce qui subsiste est le fait qu’il tend toujours entre l’imaginaire et la réalité. 

Un romancier doit-il donc privilégier l’aspect imaginaire ou réaliste dans ses livres ? 

Pour répondre a cette question nous étudierons dans une première partie le fait que l’auteur privilégie l’imaginaire et la fantaisie dans ses romans, puis dans un second point nous verrons si celui-ci doit plutôt s’accrocher aux mœurs de la société et la décrire fidèlement pour enfin aborder la question des frontières entre plus ou moins ambigus entre ces deux mondes. 

 

Généralement, la lecture a pour but de se divertir, de s’évader, de nous invite dans un nouvel univers pour nous arracher de notre quotidien. On peut alors dire que l’imaginaire dans les romans est un moyen pour le lecteur de voyager dans un autre monde. C’est le cas par exemple dans le livre de Boris Vian, L’écume des jours, qui a d’ailleurs été classé à la dixième place des cents meilleurs livres du XXème siècle. Dans son avant-propos, l’auteur essaie de nous intriguer, grâce à des leçons de vie contradictoires avec celles que l'on apprend habituellement. Par exemple, dès la première phrase, l'auteur nous conseille de juger avant de connaître. Boris Vian semble donc vouloir provoquer par cette déclaration, mais aussi par son livre. Aussi, Vian introduit son œuvre, qui sera "vraie puisque imaginée". Il s'oppose aux écrivains réalistes et préfère travailler son imaginaire. Tout au long de l’œuvre on remarque ceci, les épisodes s’enchaînent, comme à moitié ancré dans la réalité avec des référence à des Jazzmans réels et connus, et à moitié se déroulant dans un monde absurde, où tout se déroulerait à l’envers, mais de façon anodine, comme si le fait de voir une souris parler ou de mourir d’un nénuphar dans les poumons sont des choses normales.

A l’image de L’écume des jours et de tant d’autres romans du même genre, l’imaginaire est un moyens de pouvoir critiquer sans pour autant être condamné par la censure, comme par exemple le faisait Jean de la fontaine dans ses fables ; il utilisait des animaux pour critiquer la politique et les mœurs de l’époque. Transposé dans le monde du roman, l’auteur Georges Orwell utilisa le même procédé dans La ferme des animaux, où l’histoire est une critique intégrale de l’URSS et du Stalinisme. Les événements se déroulant dans La Ferme des animaux ainsi que ses personnages sont inspirés de l'histoire de l'Union soviétique. Orwell l'écrit de façon explicite grâce à l’utilisation des animaux ; on peut citer comme exemple le fait que le cochon Napoléon représente Staline, les autres personnages sont souvent associés à des concepts génériques : M. Frederick, avec son nom a consonance Allemande représente Hitler et l’Allemagne nazie,  M. Pilkington est lui l’incarnation de Churchill. Le parallèle avec les événements qu’à vécu l’URSS est frappant : en 1939, à l’arrivée de la Seconde Guerre mondiale Staline ne s’allie pas avec un camp précis, il n’arrive pas à choisir entre l’Allemagne et l’Angleterre. Dans le livre, Napoléon ne sais pas à qui vendre les planches de bois : à M. Frederick ou à M. Pilkington ? Puis l’Allemagne envahit la Russie, ce qui est représenté par l’attaque de M. Frederick, s’en suit la bataille du Moulin à vent. Après quelques défaites, les Russes finissent par repousser l’envahisseur : certes plusieurs animaux sont tués, le moulin est détruit, mais les animaux décrochent la victoire.

 

Mais au 19ème siècle les auteurs délaissent l’imaginaire présent dans les romans de chevalerie ou de capes et d’épées pour se focaliser sur le réel, les mœurs de la société, pour la dépeindre ou même la critiquer. 

 

 

Dans le roman expérimental, Emile Zola écrit « L'imagination n'est pas la qualité maîtresse du romancier «. Pour les écrivains de son époque, la « mode « était plutôt à la réalité, les auteurs peignaient fidèlement la société de leur époque, comme nous la présente Zola dans la série des Rougon-Macquart où il parle de toutes les catégories sociales, de la haute bourgeoisie aux familles les plus pauvres. Quand le septième tome de la série, L’assommoir, fut sortit, Zola déclara que c’était « le premier roman sur le peuple, qui ne mente pas et qui ait l'odeur du peuple «. Dedans il y décrit le monde ouvrier ravagé par l’alcoolisme et la misère. Les gens de l’époque l’ont jugés cru et provoquant, mais Zola n’a fait là que décrire la réalité, il voulait montrer aux classes supérieures, celles qui ont les moyens de lire, ce que sont les conditions de vie dans le milieu ouvrier, ce que la majorité des lecteurs ne connaissait pas. Par cette série de romans, Zola voulait souligner les différences aberrantes entre les personnes les plus aisées et les plus pauvres. Il voulait dénoncer les défauts d’une société mal organisée en peignant tour à tour ses acteurs, le plus fidèlement possible. 

Mais les romans réalistes ont aussi un autre rôle, c’est d’instruire le lecteur. Grâce à certains romans, il est possible au lecteur de voyager d'un continent à l'autre sans se déplacer de chez soi, et d’apprendre les modes de vie des pays étrangers à une époque où tout cela était inconnu et que seulement les plus riches pouvaient se permettre d’entreprendre des très long voyages pour jouer les explorateurs. Ces romans permettaient aux lecteurs de pouvoir s’ouvrir au monde, d’enrichir leurs connaissances, le roman réaliste a alors un but pédagogique, l’auteur enseigne ce qu’il a appris, raconte ce qu’il a vécu. Le roman réaliste est aussi un moyen pour les sociétés actuelles d’être un témoin historique des mœurs de l’époque, une façon de s’instruire hors des livres d’histoire. On peut citer en exemple le roman Les Misérables de Victor Hugo qui décrit les rues de Paris notamment à travers le personnage de Gavroche qui apparait alors comme l’archétype du gamin de Paris.

 

Mais les limites entre le réel et l’imaginaire sont des fois floues, on trouve trop souvent d’inventions dans le réel ou de réel dans l’imaginaire.

 

Le roman peut sembler un « miroir de la société «, le vrai tableau de la réalité, mais le « vrai « n'existe pas vraiment. Il y a toujours le philtre de la sensibilité de l'auteur qui ne peut pas être objectif, à travers le récit on perçoit son état d’esprit, son opinion sur le sujet dont il parle. L’auteur prend partie pour un personnage, essaye de la favoriser, et ainsi ne dépeint alors pas vraiment la réalité au sens propre. L’écrivain Maupassant, qui se défendait comme un auteur naturaliste, avait une vision négative des femmes, il était extrêmement misogyne. Pour lui, la femme est souvent soit une prostituée, soit une personne perverse, une personne très intéressée cherchant à exploiter l'homme, soit alors une « pondeuse «, mot que l’écrivain employait. Par exemple, dans Une famille il écrit : « C'était une mère, enfin, une grosse mère banale, la pondeuse, la poulinière humaine, la machine de chair qui procrée sans autre préoccupation dans l'âme que ses enfants et son livre de cuisine «.     

Les romans ont très souvent un point commun, qu’ils dépeignent une histoire réelle ou imaginaire, c’est la vraisemblance, le fait de comporter des indices de temps, de situation ou de lieu qui nous rapportent à la vie réelle, à ce qu’il s’est ou pourrait se passer. En effet, un roman qui privilégie l'imagination comporte aussi des éléments qui renvoient à une réalité connue. La série Harry Potter de J.K.Rowling est un bon exemple : l’histoire se passe à moitié dans la vie réelle, en Angleterre, l’auteur y insère d’ailleurs nombre de références aux rues de la ville, aux noms des bâtiments, mais elle se passe aussi  à moitié dans un monde parallèle, fait de sorciers et d’école de magie. Mais ce qui est le plus frappant c’est l’amitié entre les trois personnages principaux - Harry, Hermione et Ron - qui peut renvoyer le lecteur à une expérience vécue. Aussi, les leçons de vie qu’apprend le héros au fil des tomes peuvent très bien être appliquées dans notre société, quand le vieux sorcier dit à Harry "La seule chose qu'il faut craindre, c'est la crainte elle-même" par exemple. Un autre point commun inéluctable est le dépaysement : les romans parlant de robots d’Isaac Asimov provoquent un effet de dépaysement. Mais les romans qui parlent de façon réaliste de l'alcoolisme dans le milieu ouvrier ou de la misère dans les rues de Paris peuvent dépayser tout autant.

 

On ne peut donc pas dire d’un roman qu’il est totalement réel ou parlant d’une histoire totalement imaginaire. L’auteur n’est jamais entièrement objectif, et pour cause, il donne plus ou moins sa position vis-à-vis de l’histoire ou d’un personnage. De plus, quel que soit le genre du roman, aucun roman ne raconte l’histoire du lecteur : tous les romans, qu'ils soient réalistes ou fantastiques, l’emmènent dans un monde différent qu'ils lui font découvrir.

Qu'ils décrivent un monde imaginaire ou réaliste, tous les romans ne traitent-ils pas finalement de la condition humaine ? 

 

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