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Le sonnet

Publié le 23/02/2013

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Le sonnet Définition générale Le sonnet est un poème à forme fixe, constitué de 14 alexandrins répartis en deux quatrains et un sizain (ou deux tercets). Il est importé d'Italie1 au XVIème siècle, rendu célèbre par Pétrarque2 dans ses Canzoniere. Il a ensuite été introduit en France par les poètes de la Pléiade3 et l'Humanisme qui ont développé une poésie érudite et raffinée, marquée par la littérature antique. La forme du sonnet est à nouveau très utilisée au XIXème siècle et apparaît, selon Baudelaire et Mallarmé comme la manière d'accéder à un idéal littéraire. -> Le sonnet est ainsi l'une des rares formes poétiques qui ait connu une réelle pérennité, puisqu'elle traverse toute l'histoire de la poésie française, du seizième au vingtième siècle (avec, par exemple, les Sonnets pour une fin de siècle d'Alain Bosquet, 1980). Particularité de sa forme Identifiable par son inscription sur la page (quatre groupements de signes, séparés par des blancs4), le sonnet se définit, dès l'origine par ses contraintes. Il se compose de quatorze vers distribués en deux quatrains et deux tercets, soit deux ensembles pairs puis impairs, qui en réalité n'en composent que deux, pairs : un huitain et un sizain. En effet, dans la mesure où une strophe se définit par un système clos de rimes, un tercet ne peut être considéré comme une strophe mais c'est le sizain qui l'est. Forme-sens, le sonnet est fondé sur une stricte bipartition à la fois formelle et sémantique, entre deux systèmes de groupes de vers (l'un pair, pour les quatrains), l'autre combinant l'impair et le pair (un groupe de trois est multiplié par deux), pour les tercets eux-mêmes, ce qui produit un changement de rythme. -> On a donc un double parallélisme de strophes homologues, entre lesquelles peut s'établir un rapport d'opposition, l'antithèse étant la figure maîtresse du sonnet. Conséquences pour son étude A- Trois lieux du poème doivent être particulièrement examinés - l'attaque (premier vers), le retournement (ou volta) des vers 9 et 10, au centre du sonnet (le passage des quatrains aux tercets étant souvent le moment d'une forte articulation logique). le dernier vers (ou pointe, concetto). Remarque sur l'importance de cette chute (de la pointe finale) dans le sonnet : - selon Banville : « Le dernier vers du Sonnet doit contenir un trait - exquis, ou surprenant, ou excitant l'admiration par sa justesse et par sa force. « - Lamartine disait qu'il doit suffire de lire le dernier vers d'un sonnet car un sonnet n'existe pas si la pensée n'en est pas violemment et ingénieusement résumée dans le dernier vers. 1 Le mot français est emprunté à l'italien sonetto, provenant lui-même de l'ancien provençal sonet, petite chanson (fin du XIIe siècle). 2 Pétrarque, érudit, poète et humaniste italien, est passé à la postérité pour la perfection de sa poésie qui met en vers son amour pour Laure dans ses Canzoniere. 3 La Pléiade est le nom d'un groupe de sept poètes de la Renaissance, dont Ronsard et Du Bellay sont les plus connus. Ils participent à l'enrichissement de la langue française et abordent dans leurs poèmes aussi bien des thèmes antiques que politiques ou personnels. Il sont considérés comme une constellation poétique, par allusion aux sept filles d'Atlas que Zeus changea en colombes pour les soustraire au géant Orion, avant de les placer parmi les constellations. 4 Les blanc n'ont pas toujours été présents et les sonnets de Louise Labé, par exemple, ne séparent pas les strophes, se contentant d'un simple retrait typographique pour le premier vers de chacune. B- L'étude des quatrains Les quatrains sont construits en général sur les mêmes rimes, disposées dans le même ordre (rimes embrassées, suivant le schéma ABBA), ce qui leur assure leur cohésion et leur autonomie par rapport au sizain. Chaque quatrain est fermé sur lui-même : selon Aragon, les quatrains sont les miroirs d'une même image ou « miroirs l'un de l'autre «, la rime étant « l'écho qui parle à l'écho «, et « deux fois se réfléchit «. C- L'étude des tercets Les tercets sont prosodiquement dépendants l'un de l'autre : le premier formant une unité incomplète, en suspens de rime (et de sens), qui ne trouvera sa résolution que dans le second tercet après l'intervalle du blanc (dont il faut rappeler qu'il n'existe typographiquement qu'à partir du XIXe siècle). Le groupement impair de tercet entre en contradiction avec les rimes, associées deux-à-deux, selon un schéma variable. Deux combinaisons apparaissent au seizième siècle : - CCD / EDE : un distique5 à rimes plates, suivi de quatre rimes croisées = forme attribuée à Peletier du Mans et appelé ainsi le sonnet Peletier (ou « sonnet français «). Il fait par ailleurs alterner les rimes féminines et masculines. - CCD /EED : un distique à rimes plates, suivi de quatre rimes embrassées = appelé à tord sonnet italien ou parfait alors que son schéma de rimes ne se rencontre pas en Italie, ce type de sonnet est aussi dit marotique car c'est le schéma qu'utilise Marot, introducteur du sonnet en France, pour se démarquer du sonnet pétrarquiste. C'est ce schéma que vont adopter Ronsard et Du Bellay. Ronsard y a notamment aussi ajouté l'alternance des rimes féminines et masculines. -> Ce dernier schéma reproduit à la fin du poème le modèle des deux quatrains, comme une réponse aux questions qu'ils posent : la structure antithétique entre quatrains et tercets n'exclut pas un réseau de correspondance, fût-ce sur le mode de la symétrie inversée. Bonus - histoire littéraire Au seizième siècle, les sonnets se présentent sans titre, mais numérotés, ce qui fait de chacun un fragment à la fois autonome et dépendant de l'ensemble où il s'inscrit : l'indice numérique situe chaque sonnet dans un contexte, en fait un élément indissociable d'une série. Ce qui est lié à une conception particulière de l'écriture poétique : chaque sonnet est une prouesse renouvelée, à partir d'un schéma commun, un exercice de virtuosité dans lequel rivalisent les poètes. Le cadre formel contraint à organiser le discours en parallélisme, analogies, oppositions. Par exemple c'est ainsi que Du Bellay oppose le présent au passé, Rome à la France, son propre sort à celui des autres, en particulier Ronsard, le poète de cour par excellence. Chez celui-ci, le sonnet est souvent construit sur une comparaison (« Comme on voit sur la branche... «), selon une articulation analogique (« comme « / « ainsi «) qui fait des quatrains une proposition subordonnée, des tercets la principale, les premiers posant le comparant, le second le comparé. ->-> La longévité du sonnet peut ainsi s'expliquer paradoxalement par son système contraignant de règles ; selon Baudelaire, « parce que la forme est contraignante, l'idée jaillit plus intense «. La rigueur du cadre formel accentue encore l'intensité de l'émotion au lieu de la brider. 5 Un distique est la réunion de deux vers (ou le fragment d'une oeuvre), formant un ensemble complet par le sens, par exemple une maxime

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