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Le Vieillard Et Les Trois Jeunes Hommes - La Fontaine

Publié le 02/10/2010

Extrait du document

fontaine

 

Livre onzième, Fable VIII 

 Le Vieillard et les Trois Jeunes Hommes. 

 Cette fable n'a pas la perfection qu'on admire dans plusieurs autres, si on la considère comme apologue. On peut dire même que ce n'en est pas un, puisqu'un apologue doit offrir une action passée entre des animaux, qui rappelle aux hommes l'idée d'une vérité morale. Ici la vérité se montre sans voile : c'est là chose même et non pas une narration allégorique. Mais si on considère cette fable simplement comme une pièce de vers, elle est charmante et aussi parfaite pour l'exécution, qu'aucun autre ouvrage sorti des mains de La Fontaine. 

 Au vers1,on remarque une ouverture : octosyllabe qui présente une action simple et tranquille. 

- Ponctuation forte, point à la fin du vers, qui installe le lecteur dans un univers serein. 

 

 Au vers 2, Réaction brutale sous forme d’alexandrin. 

- Le discours des jeunes gens est provoqué par un spectacle qu’ils jugent incongru (v. 1). 

- V. 3. Le narrateur prend implicitement parti en faveur du vieillard : « jouvenceaux «. 

- V. 4. Discours indirect libre. 

V. 5-12 : longue tirade des « jouvenceaux « (8 vers). 

V. 13-27 : plus longue tirade du vieillard (15 vers). 

V. 13. Vivacité d’esprit du vieillard : répétition quasiment littérale de leur dernière phrase, avec négation -> sens de la répartie. 

V. 14. Pause à l’hémistiche, qui augmente l’intensité de sa parole. 

V. 26-27 Il conclut par deux octosyllabes qui reprennent le même rythme sec et rapide du début de son discours (v. 12-13) et font aussi écho au premier vers, octosyllabe décrivant son action (« un octogénaire plantait «). 

V. 28-34 : récit de la mort des trois jeunes hommes. 

V. 35-36 : révélation finale 

 Etudier l’énonciation. 

 

• V. 1 et 3. Opposition de termes : « jouvenceau « / « octogénaire « -> met en avant la jeunesse des personnages, ce qui va rendre leur discours d’autant plus insolent. 

• Discours direct, indirect et indirect libre (v. 4) se mêlent -> vivacité des débats et des exclamations de leur conversation. 

• Modalités exclamatives (v. 2) et interrogatives (v. 6, 8-9) -> questions rhétoriques soulignant l’inutilité des efforts du vieillard alors que la mort est si proche. 

• V. 2 : première remarque des jouvenceaux formulée de manière impersonnelle -> le vieillard est écarté de la conversation. 

• V. 4 : même effet, produit par l’emploi de « il « (discours indirect libre) -> à nouveau, les jouvenceaux, complices, maintiennent le vieillard hors de la conversation. 

• V. 6 : « fruit « est compris par les jeunes hommes dans son sens le plus concret ; 

• V. 24 : le même terme (« fruit «) est repris par le vieillard avec cette fois une connotation poétique. 

• V. 10 et 11. Modalité injonctive (« ne songez … qu’à «, « quittez «) -> impertinence pleine de mépris. 

• V. 13. Négation (« il ne convient pas «) -> le vieillard réfute les arguments des jeunes hommes. 

• V. 16-17. « Vos jours (…) les miens (…) également «, « nos (…) pareils « ->à l’opposition « nous « / « vous « (v. 9 et 12), le vieillard répond par une mise à égalité : nous sommes tous également soumis au destin. 

 {text:soft-page-break} Arguments du personnage : 

 Vers 8-9. Questions rhétoriques qui sous-entendent que le vieillard est trop âgé pour pouvoir rien entreprendre. 

 V 10-11 modalités injonctives qui condamnent le vieillard à ne plus être ni dans le présent, ni dans l’avenir, mais à évoquer le passé ; la mention des « erreurs passées « évoque une mort proche et les derniers sacrements. 

 

V. 15-17. Nous sommes tous soumis au destin. 

- Argument prolongé par les questions en vers 18-20. 

• V. 22-23. Question rhétorique, non dépourvue d’humour, qui rappelle en écho la question cruelle des jeunes hommes (v. 8-9). 

 

• V. 26-27. Puisque nul n’est maître de son destin il se pourrait que je vous survive. 

 Le narrateur est le lecteur de l’histoire. 

• Parole du vieillard : c’est lui qui raconte l’histoire des « jouvenceaux « sur leur pierre tombale (ce qu’il a dit, surtout aux vers 26-27, s’est réalisé). 

 • Mettre en relief la mort ridicule des trois jeunes hommes. 

- Ridicule accentué par la rapidité de cette mort : passé simple, sept vers qui constituent un sommaire par opposition avec la longueur des discours ; 

- Alors qu’ils avaient chacun de grands projets, leur mort est grotesque (v. 20), sans gloire (v. 32) ou stupide (v. 33-34). 

• Le vieillard paraît vengé de leur insolence et de leur arrogance. 

• Mais le terme « Pleurés « invalide cette idée : ce n’est pas la loi du talion qui est prôné, bien au contraire ; l’anacoluthe, insiste sur le geste généreux du vieillard ; le verbe graver fait écho au verbe planter ; il s’agit d’œuvrer pour la postérité. 

 La révélation de la fin donne à ce texte une valeur particulière. C’est comme si nous avions sous les yeux ce qui symbolise le plus concrètement la mort, une plaque sur un tombeau. 

En lisant cette fable nous regardons la mort en face. Mais la vivacité du récit évite que nous en concevions de la terreur. La Fontaine nous apprend à rester serein devant la mort grâce à la grandeur d’un sage octogénaire. Il incite ses lecteurs à ne pas suivre l’exemple des trois jouvenceaux et à réfléchir sur la fragilité de la vie. La mise en abyme met le narrateur à la fois sur le même plan que le lecteur, mais aussi que le vieillard. 

 Cette fable fait partie de l'une de celle que j'ai le plus aimé, non pas, car il n'y a pas l'utilisation d'animaux symbolique, mais plutôt car La Fontaine nous parle du destin dans toute sa forme, et que la mort peut survenir à tout moment, à n'importe quel âge, ce qui est le cas dans cette fable. Cette fable nous permet de nous remettre en question soi même, ce qui fait réfléchir le lecteur. D'un point de vue compréhension, elle est assez simple à analyser, on peut facilement retrouver des figures de styles ainsi que repérer les temps des verbes, c'est une fable qui permet de tirer beaucoup de choses de son contenu pour ainsi mieux la comprendre et par ailleurs comprendre ce que La Fontaine veut nous expliquer dans sa morale. 

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Un octogénaire plantait. 

« Passe encor de bâtir; mais planter à cet âge! « 

Disaient trois jouvenceaux, enfants du voisinage; 

Assurément il radotait. 

Car, au nom des dieux, je vous prie, 

Quel fruit de ce labeur pouvez-vous recueillir? 

Autant qu'un patriarche il vous faudrait vieillir. 

A quoi bon charger votre vie 

Des soins d'un avenir qui n'est pas fait pour vous? 

Ne songez désormais qu'à vos erreurs passées; 

Quittez le long espoir et les vastes pensées; 

Tout cela ne convient qu'à nous. 

- Il ne convient pas à vous-mêmes, 

Repartit le vieillard. Tout établissement 

Vient tard, et dure peu. La main des Parques blêmes 

De vos jours et des miens se joue également. 

Nos termes sont pareils par leur courte durée. 

Qui de nous des clartés de la voûte azurée 

Doit jouir le dernier? Est-il aucun moment 

Qui vous puisse assurer d'un second seulement? 

Mes arrière-neveux me devront cet ombrage. 

Eh bien! défendez-vous au sage 

De se donner des soins pour le plaisir d'autrui? 

Cela même est un fruit que je goûte aujourd'hui: 

J'en puis jouir demain, et quelques jours encore; 

Je puis enfin compter l'aurore 

Plus d'une fois sur vos tombeaux. « 

Le vieillard eut raison: l'un des trois jouvenceaux 

Se noya dès le port, allant à l'Amérique; 

L'autre, afin de monter aux grandes dignités, 

Dans les emplois de Mars servant la république, 

Par un coup imprévu vit ses jours emportés; 

Le troisième tomba d'un arbre 

Que lui-même il voulut enter; 

Et, pleurés du vieillard, il grava sur leur marbre 

Ce que je viens de raconter.

 

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