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Les traits identitaires des communautés juives de la diaspora (Ier-Ve siècle ap. J.-C.)

Publié le 17/11/2013

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 Les traits identitaires des communautés juives de la diaspora (Ier-Ve siècle ap. J.-C.) Le mot grec diaspora signifie « dispersion ». Il apparaît dans la traduction grecque de la Bible hébraïque, dite Bible des Septante, effectuée à Alexandrie à partir du IIIe siècle avant J.-C. Le mot désigne alors la situation des communautés juives établies hors de Judée, et ces communautés elles-mêmes. Les causes historiques de cette dispersion ont pu être violentes ou pacifiques - simples migrations de communautés favorisées par la stabilité politique et économique des royaumes hellénistiques et de l'Empire romain qui leur succède. La diaspora juive n'acquiert son caractère absolument traumatique qu'avec la destruction du Temple de Jérusalem et l'annexion de la Judée par les Romains, en 70 après J.-C ;En effet, le phénomène « diasporique » repose avant tout sur des facteurs d'ordre culturel. De quelle manière la période s'étirant du Ier-Ve siècle ap. J.-C a été une période de transition du judaïsme conduisant a l'avènement du judaïsme rabbinique? Nous analyserons dans un premier temps en quoi le temple fédérait les croyances, ainsi que les conséquences de sa destruction; Puis dans un deuxième temps nous analyseront la transition du judaïsme sacerdotale au judaïsme rabbinique. Plus encore que d'un seul Dieu, le judaïsme d'avant 70 est, au moins depuis les réformes du roi Josias (640 à 609 avant notre ère), la religion d'un seul Temple : celui de Jérusalem, capitale de la Judée. Reconstruit en même temps que les murailles de la ville à l'époque perse ; re-consacré par les Maccabées suite à « l'abomination de la désolation » - après que le roi grec Antiochos IV a tenté d'helléniser de force la Judée ; somptueusement restauré par Hérode à l'époque de Rome, le Temple organise la vie juive, à Jérusalem, en Judée et dans toute la diaspora. Pour les Judéens il est naturellement le centre de toute leur vie religieuse, spirituelle et rituelle : il n'est de culte qu'au Temple et aucun sacrifice sanglant (zebah), aucune oblation végétale (minha), ne peuvent être consacrés et offerts en aucun autre lieu. Enfin pour les Juifs des diasporas plus lointaines, le Temple demeure au c?ur de leur adhésion au judaïsme. Même s'ils ne s'expriment plus qu'en grec et sont incapables de lire la Bible en hébreu, les Juifs de la diaspora se définissent par rapport au Temple. Compte tenu de cette centralité du Temple il est assez naturel que ceux qui sont en charge de son fonctionnement rituel et cultuel, les prêtres, constituent aussi une aristocratie sacerdotale et la classe dirigeante de la nation judéenne. Le sacerdoce est en effet généalogique (il ne concerne que les descendants supposés d'Aaron et de Pinhas) et héréditaire. Quand la fumée retombe sur les ruines de Jérusalem dont le Temple a été détruit, on mesure alors tout ce que le judaïsme doit élaborer pour définir une continuité, sans le Temple, sans les sacrifices et sans la classe sacerdotale, qui constituaient les trois piliers d'un fonctionnement quotidien et régulier du système. Comment rester juif sans le Temple et sans la Terre Sainte? C'est la question cruciale qui s'est posée aux rabbins de l'époque de la Michna et du Talmud. Leur réponse fut une profonde réforme du Judaïsme afin de garantir sa survie et sa pertinence dans des conditions nouvelles. En restant fidèle à la Torah, dont une partie dès lors ne concerne pas la vie en Terre Sainte ; en substituant de nouveaux rites au culte du Temple. Ainsi, les trois sacrifices ordinaires pratiqués quotidiennement au Temple furent désormais remplacés par trois prières quotidiennes. Des lieux de réunions furent créés, où ces prières étaient récitées en commun, et surtout, où la Torah était lue en public et commentée. On les appelait Beth Haknesseth, littéralement « maison de réunion », terme qui, traduit en grec par synagogos donna le mot synagogue. Lorsque ces lieux étaient plus spécifiquement voués à l'étude et faisaient fonction d'écoles, on les appelait Beth Hamidrach, « maison du commentaire ». Le rôle de la synagogue dans la vie quotidienne devient donc l'institution centrale du judaïsme ; lieu destiné à la prière publique et à d'autres activités religieuses et communautaires qui a servi de prototype pour des institutions analogues dans le christianisme et l'islam. D'après les historiens, les exilés se retrouvaient de temps en temps, ainsi que chaque shabbat, pour se consoler de la perte de leur terre, pour étudier les Ecritures, et pour prier. Vers la fin du 1er siècle ap. J.-C.Là où ils vivaient, les Juifs avaient leur synagogue et cette institution allait être vitale pour la survie du peuple après la destruction du Temple et pour la reconstruction de la vie juive. Certains rites du Temple furent transférés à la synagogue pour assurer la continuité, tandis que d'autres furent expressément interdits afin de souligner la distinction entre les deux institutions. La prière remplaça le sacrifice, et on fixa des offices correspondant aux offrandes communautaires régulières qui ne pouvaient plus être apportées au Temple. Dans ce contexte nouveau, les rabbins pharisiens donnaient aux juifs qui le souhaitaient des conseils sur les conduites à adopter, en vue d'une adaptation sociale qui ne contredisait pas pour autant les préceptes de la Torah. Les formes et les rites instaurés à cette époque ont perduré jusqu'à ce jour. A la différence du Temple, où les rites se déroulaient sous l'égide des prêtres à l'intérieur du Sanctuaire, la seule condition nécessaire au fonctionnement de la synagogue est un minyan de dix juifs adultes, et tout juif pouvait présider aux offices. Ainsi, le passage du Temple à la synagogue a marqué une transformation historique du rôle de l'individu dans le rite. Sous l'égide des rabbins pharisiens, on assiste à une véritable démocratisation du culte juif dans lequel chaque individu compte à part égale, contrairement au culte du temple institutionnalisé comme incultes de caste (les cohanim et leviim). Devenus les référents de communautés minoritaires dans un environnement païen, les rabbins se rapprochèrent des groupes sociaux les plus populaires en les invitant souvent à une souplesse religieuse qu'imposaient les situations où il n'était plus possible de respecter certains interdits La Halakha et la Aggadah accordent toutes deux une importance singulière à la synagogue. On considère que toutes les synagogues participent de la sainteté du Temple. On les voit comme des parties extraterritoriales d'Erets Israël. En diaspora, l'appartenance à une synagogue reste un des moyens principaux d'identification juive, et de nombreux Juifs se retrouvent, même s'ils n'assistent pas régulièrement aux offices antérieurs. C'est ainsi cette période qui célèbre l'avènement du judaïsme rabbinique qui perdure jusqu'à aujourd'hui.

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