L'honnête homme.

   L'honnête homme répond à un idéal mondain. Ses qualités en font avant tout un homme de bonne compagnie. De la culture, du cœur, du goût, de l'esprit, mais pas de fanfaronnade, de pédantisme, de manières affectées ou autoritaires.    Allant plus loin, le chevalier de Méré, véritable apôtre de l'« honnêteté «, considère que la distinction des manières exige la distinction de l'âme et fait de l'honnêteté « la quintessence des vertus «. (Discours sur l'Honnêteté). L'idéal mondain devient ainsi un idéal moral.    Sévère, Clitandre, Philinte réalisent cet idéal. Sont ridicules, sinon blâmables, dans Molière : les petits marquis, Trissotin, Vadius,... et Alceste ; dans La Bruyère : Acis, Arrias, Hermagoras...    L'honnête homme a néanmoins été parfois vivement critiqué. Son idéal mondain a été jugé superficiel. Tel Egésippe, l'honnête homme est « propre à tout «, c'est-à-dire qu'il oc n'est propre à rien «. — Son idéal moral est jugé dangereux par Pascal qui souligne son appartenance foncière au monde : « Vous vous perdrez en honnête homme «. ( Troisième discours sur la condition des grands). « Le moi est haïssable : Vous, Miton, le couvrez ; vous ne l'ôtez pas pour cela «. (L'honnêteté masque un libertinage réel). « Il n'y a que la religion chrétienne qui rende l'homme aimable et heureux tout ensemble. Dans l'honnêteté, on ne peut être aimable et heureux ensemble «. Il se peut même que dans la pratique les qualités morales de l'honnête homme aient été franchement illusoires. De là la sévérité des jugements de La Bruyère : « L'honnête homme tient le milieu entre l'habile homme et l'homme de bien, quoique dans une distance inégale de ces deux extrêmes « — « La distance qu'il y a de l'honnête homme à l'habile homme s'affaiblit de jour à autre et est sur le point de disparaître «. (XII-55).