L'Image Permet-Elle De Mieux Véhiculer Un Message Que Le Texte ?

La représentation iconographie a, de tous temps, permis à ses *** de faire valoir leurs idées politiques, sociales ou bien leur prise de position en faveur d’un évènement. Les tableaux, les affiches, publicitaires ou revendicatives, sont autant de messages que nous côtoyons chaque jour et qui sont porteurs de sens, parfois plus ou moins explicites. De la même façon, nombres d’écrivains ont eu recours à l’écriture pour dénoncer des situations ou défendre des idées. Face à ces deux méthodes d’expression de la pensée, nous sommes amenés à nous poser une question ; l’image a t elle une portée plus importante que les mots lorsqu’il s’agit de défendre des idées ? Dans l’optique de répondre à cette question, nous pourrons, dans un premier temps, nous interroger sur l’efficacité de l’image, puis sur l’importance du texte pour enfin montrer que, loin d’appartenir à deux moyens d’argumentation distincts, l’image et les mots sont en fait complémentaires.

      Certes, l’image peut apparaître comme un moyen plus efficace pour transmettre et défendre des idées. En effet, cette dernière, lorsqu’elle a pour vocation de transmettre un message, s’avère plus facile à saisir pour un certain nombre de personnes qui n’ont pas nécessairement besoin de se référer à des connaissances importantes. Ainsi, quelqu’un observant l’estampe portant le nom de « Françaises devenues libres « comprendra sans grande difficulté le sens des chaînes brisées au pieds dune femme portant une pique et des habits révolutionnaires sur un fond rouge sang. Qui plus est, le sens de l’image est perçu de façon quasi-instantanée contrairement au texte qui demande une lecture approfondie et qui laisse dévoiler ses arguments au fur et à mesure de la lecture. La célèbre image représentant, par exemple, les tensions que provoquait l’affaire Dreyfus en montrant un repas dégénérant au fil de la conversation est clairement explicite : elle ne nécessite pas au lecteur de faire appel à un approfondissement de l’image qu’il a sous les yeux.

      En outre, l’image est souvent volontairement provocante pour marquer les esprits et les faire s’interroger sur les idées exposées. Cet aspect percutant de l’image peut être obtenu de différentes façons notamment la couleur et les formes représentées qui peuvent être attractives pour l’œil comme le montre l’affiche du collectif Guerilla Girls en jaune vif sur laquelle on voit allongée une femme nue à tête de gorille. L’image peut également être moralement choquante en abordant des thèmes difficiles pour les populations comme les affiches montrant des hommes au crâne enfoncé ou des femmes défigurées des suites d’un accident de voiture ou encore des enfants de pays sous-développés dont la maigreur extrême est terrifiante.

      Cependant, un texte riche peut toutefois permettre d’atteindre une cible plus large. Effectivement, le texte offre un choix plus important de techniques d’argumentation. Ainsi, les écrivains ont-ils recours à des procédés littéraires nombreux et variés pour défendre et argumenter leurs thèses comme les essais dans lesquels ils abordent personnellement des thèmes sociaux ou philosophiques à l’image, par exemple, de l’essai de Simone de Beauvoir intitulé « Le Deuxième Sexe « où l’auteur traite de la condition féminine en abordant le thème de l’éducation des jeunes filles. Les écrivains peuvent également user de moyens plus radicaux pour remédier à une situation qui leur paraît injuste comme l’a osé Olympe de Gouges, romancière et dramaturge, en éditant les « Droits de la Femme et de la Citoyenne « où elle défend les droits des femmes et leur condition, inférieure à celle des hommes. En réalité, tous les genres littéraires sont propices à l’exposition d’idées. De ce fait, Hugo s’imposa en fervent opposant à la peine de mort dans sa nouvelle intitulée « Claude Gueux « et Voltaire dénigrait avec une subtile ironie les mœurs et la politique de son temps comme le prouvent les comtes « Candide «, « L’Ingénu « ou bien « Zadig «.

      De plus, le texte peut sensibiliser le lecteur en utilisant certaines images. Les figures littéraires qui permettent à l’auteur d’insinuer ces images sont nombreuse, notamment la comparaison qui a un effet particulièrement marquant lorsqu’elle est bien utilisée. La Fontaine avait compris qu’en associant certains caractères humains à des visages animaux dans des fables telles que « Le Corbeau et le Renard « ou encore « La Cigale et la Fourmi « il pourrait pointer les défauts de ses pairs avec plus d’originalité et donc plus d’efficacité. L’écrivain utilise également des portraits visant à permettre au lecteur de se rapprocher, de s’approprier la situation ou le personnage et par conséquent, de sensibiliser l’intéressé aux idées exposées dans le récit.

      Finalement, l’image et les mots agissent en symbiose ; ils sont complémentaires.

Bien sûr, il est rare que l’image ne soit accompagnée d’aucun commentaire textuel. Effectivement, si le sens de l’image peut être parfois simple à saisir, il est quelquefois nécessaire d’avoir recours à une phrase ou un groupe de mots qui aident à susciter le déclic, à comprendre l’intégralité du message véhiculé par l’image. On peut citer en exemple l’affiche des Guerrila Girls dont les revendications pourraient être difficiles à saisir sans la phrase interrogative et les explications succinctes ; si ces phrases avaient été absentes, aurions-nous été en mesure de comprendre que le collectif aspire à une exposition massive d’œuvres contemporaines crées par des femmes ?

Oui, tous les moyens possibles sont utilisés pour convaincre le lecteur. L’écrivain, lorsqu’il tente de défendre ses idées est forcément empreint de subjectivité. Victor Hugo romança entièrement la vie de l’homme qui lui inspira la nouvelle Claude Gueux afin de le faire passer pour une victime de la peine de mort plutôt que comme l’assassin qu’il fut vraiment. De manière générale, si l’image peut faire l’objet de transformations pour répondre aux ambitions de ses créateurs, le texte peut également servir à l’auteur pour distordre la vérité et la faire apparaître différente selon ce qui l’arrange.