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L'URSS, une collection de problèmes

Publié le 22/02/2012

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11-24 février 1988 - Les questions dites " nationales " posées en URSS aujourd'hui n'ont qu'un rapport lointain avec ce qu'elles furent dans l'empire russe, avant 1917. D'une part, les expériences et les structures socio-économiques communes, le rapprochement des niveaux de développement, les contacts culturels, les migrations et les brassages font de l'ensemble soviétique autre chose qu'une collection de particularismes ou qu'un château de cartes prêt à s'effondrer. D'autre part, les questions dites " nationales " se nourrissent de problèmes culturels, mais aussi socio-économiques, écologiques, politiques, très actuels, très modernes, et qui constituent le " coeur " même de la " perestroïka ". On peut distinguer trois grands types, plus ou moins dominants dans chaque cas :-les problèmes culturels, ethniques, linguistiques. Ils sont en apparence dominants en Transcaucasie. Arméniens chrétiens et Turcs azéris musulmans se disputent le Haut-Karabakh. Les Géorgiens revendiquent le Saïnguilo géorgien annexé à l'Azerbaïdjan. Et redoutent la " russification ". La minorité abkhaze, en Géorgie, se plaint de l' " oppression géorgienne " et réclame son rattachement à la République russe. On peut allonger la liste... Le problème culturel majeur, posé à travers toute l'URSS, est celui des positions respectives du russe et des autres langues dans l'administration et l'enseignement. Il est posé par les citoyens des diverses Républiques comme par le pouvoir central, inquiet que moins de la moitié des non-Russes ( seulement 30 % à 50 % des Centre-Asiatiques, 25 % des Estoniens) sachent parler couramment le russe, langue véhiculaire de l'Union et... langue de l'armée. Dans treize Républiques sur quinze, plus de 90 % de la population déclarent " maternelle " la langue autochtone. La proportion est plus faible en Ukraine ( 80 %) et en Biélorussie ( 74 %). C'est dans ces deux Républiques, aux langues proches, et parfois " mélangées " au russe, que la russification fait le plus de progrès. Pour y résister, des intellectuels proposent le bilinguisme obligatoire et la suppression de la liberté de choix de l'école ( les parents préférant souvent l'école russe, synonyme de promotion) -les rapports centre-périphérie, en matière socio-économique. Les plus déterminants à long terme, pour l'URSS, sont les rapports entre le Nord et l'Ouest plus développés, et le Sud qui l'est moins, notamment l'Asie centrale qui vit les conséquences écologiques et sanitaires gravissimes de la monoculture du coton. Après une période de rapprochement des niveaux de vie, l'écart se creuse de plus en plus entre les Républiques " musulmanes " et l'URSS " occidentale ", dont le peloton de tête est constitué par les Républiques baltes, précisément impatientes de mieux exploiter leurs avantages -les questions nationales sont à dominante politique, au moins pour l'instant, dans les Républiques baltes d'Estonie, de Lettonie, de Lituanie. Toutes trois ont restauré les symboles traditionnels de la souveraineté ( drapeaux, hymnes) et revendiquent autonomie économique et indépendance politique. JEAN-MARIE CHAUVIER Le Monde diplomatique, Décembre 1988

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