Devoir de Philosophie

Madame Bovary, Chapitre 5 partie 1

Publié le 11/02/2013

Extrait du document

bovary
Commentaire composé de : Madame Bovary, 1857, Flaubert, Partie I, chapitre 5 De : « Il était donc heureux...« à : « ...comme un enfant qui se pend après vous.« Flaubert est un écrivain du XIXème siècle. Il appartient au mouvement réaliste créé par Balzac mais est aussi influencé par le romantisme. Madame Bovary, 1857, est une de ses principales oeuvres. Sa rédaction a été longue, 5 ans, mais les analyses y sont donc plus profondes et subtiles. Dans ce passage, Emma et Bovary viennent à s'installer à Tostes. C'est notre première vision du couple. On peut donc se demander en quoi ce passage est-il original et intéressant pour la suite du récit. Pour répondre à cette problématique, nous nous intéresserons à l'image d'un bonheur parfait puis aux indices nuançant cette vision du bonheur. Flaubert étant un écrivain réaliste influencé par le romantisme, ses descriptions sont donc très proches de la réalité avec une touche de romanesque. Il nous donne l'image d'un bonheur parfait grâce à deux principaux moyens : les pensées de Charles et la description de scènes intimes. Tout d'abord, le bonheur de Charles semble n'être possible que par la rupture avec son passé. On le voit grâce à la très forte antithèse entre avant/après Emma. Cette antithèse occupe une place majeure dans ce passage. Elle est mise en valeur par la focalisation interne sur Charles et la présence de discours indirect libre. On distingue l'évocation du passé avec «Jusqu'à présent «. On remarque aussi que Flaubert fait correspondre trois phrases avec trois époques de la jeunesse de Charles : le collège (« son temps de collège «), ses études (« plus tard «) puis son premier mariage avec la veuve (celui-ci est, d'ailleurs, déprécié comme le montre la comparaison « comme des glaçons «). De plus, on observe que les phrases sont de plus en plus courtes, ce qui met l'accent sur les actions négatives à Charles et fait paraître sa vie comme un échec. Néanmoins, Charles valorise lui-même son présent avec la conjonction «Mais «, l'anaphore de «à présent « ainsi que le champ lexical du bonheur (« adoré «, « aimer «, « bonheur «, « félicité «). Outre l'antithèse passé/présent de Charles, l'image de la félicité de celui-ci est aussi donnée par l'expression de son bonheur. En effet, le lyrisme de Charles traduit son enthousiasme. Il nous dévoile sa joie avec des énumérations (« un repas en tête-à-tête «,...) ainsi qu'un rythme ternaire (« son peigne «, « son fichu «, ...). De plus, il est satisfait comme le montre « l'esprit tranquille « et « à ses narines «. Enfin, Flaubert insiste sur la complète sérénité de Charles avec des hyperboles (« sans soucis de rien «, « la continuité de son bonheur «, « pour la vie «) et l'adverbe « continuellement «. Pour finir, l'image de ce bonheur parfait est décrite à travers deux principales scènes intimes : celle du réveil puis celle du balcon. La première est présentée grâce à la première expression de la phrase « Au lit, le matin, côte à côte «. La dimension intime est créée par les vêtements de Charles (« sa chemise entr'ouverte «, « son foulard «), l'émerveillement et la fascination de celui-ci devant la beauté de sa femme, et particulièrement ses yeux. En effet, le champ lexical de l'oeil est présent (« ses yeux «, « ses paupières «, « son oeil «) et l'allitération en [s] donne une impression de douceur à Emma (« vus de si près ... émail «). De plus, cet échange de regards est assez poétique. On y trouve un jeu sur les couleurs (« noirs «, « bleus «) et un sur le lumière (« des couches ... s'éclaircissant «) ainsi qu'une métaphore (« émail «). Charles voit l'oeil d'Emma comme un miroir lui réfléchissant son image.La scène du balcon est moins intime que celle du réveil : on se trouve à l'extérieur, à la vue de tous. On y observe un changement de point de vue qui transforme le jugement de Charles en un jugement assez objectif. On distingue aussi des imparfaits itératifs qui nous font penser que cette scène est une habitude, un de leurs rituels amoureux. De plus, la communication entre le mari et la femme semble assez importante comme le montre l'entrelacement des pronoms (« il «/ «elle «, « elle «/ « Charles «), le chiasme (« Charles «/ «elle «/ « elle «/ « il «) et les verbes comme « elle continuait «, « il lui envoyait «, « elle répondait «. On retrouve l'influence du romantisme sur Flaubert avec le jeu des fleurs souffletées vers Charles ainsi que les habits  « légers « d'Emma (« peignoir assez lâche «) Tous ces éléments nous font donc supposer que le couple Bovary vit un amour parfait et un bonheur total. Néanmoins, certains indices introduits par Flaubert nuancent cette hypothèse. La vision du bonheur de Charles et Emma est nuancée de deux façons : les choix de point de vue et les interventions de Flaubert. Tout d'abord, on remarque que le seul point de vue en focalisation interne est celui de Charles. L'absente de celui d'Emma nous fait douter du bonheur du couple. Ensuite, Flaubert insiste sur le fait que Charles est heureux à la rupture avec son passé. De plus, son bonheur est un bonheur possessif différent de celui d'un couple qui doit être réciproque. Cela nous est montré par l'énumération où il passe d'une situation de communication (« un repas en tête-à-tête «) à un vulgaire objet (« chapeau «), la scène du réveil où il SE regarde dans les yeux de sa femme ainsi qu'à la fin du passage où l'attitude de Charles s'approche de l'idolâtrie : il a un besoin constant comme le prouve « il ne pouvait se retenir de toucher continuellement «, insisté par le rythme ternaire (« son peigne «, «ses bagues «, « son fichu «). Enfin, Charles est une présence envahissante voire étouffante : il ne la laisse pas se toiletter. Charles est donc présenté comme un homme immature et enfantin qui ne sait pas apprécier son nouveau bonheur ni le construire avec Emma. Il est plus préoccupé par ses sentiments et sa satisfaction que par les besoins et pensées de sa femme. Dans ce passage, on observe aussi différentes interventions implicites de Flaubert, ce qui permet de nuancer le bonheur du couple. Premièrement, dans la nomination des personnages. En effet on trouve des « il «, « elle «, « Charles « en abondance mais jamais de « ils « ou de « le couple « qui montreraient leur union. Cette séparation volontaire de la part du narrateur nous fait plus penser à une sorte de cohabitation qu'à un ménage.Deuxièmement, on remarque des déséquilibres dans les gestes des personnages. Par exemple, lors de la scène du balcon, Flaubert procède par juxtapositions (« Charles ... envoyait un baiser «/ « elle lui répondait par un signe «) qui donne une dimension mécanique. Celle-ci est mise en évidence par l'utilisation de phrases brèves et de l'imparfait. Enfin, on distingue un très forte opposition entre les gestes de Charles et les réactions d'Emma (« il la baisait dans le dos «/ « elle poussait un cri «,...). De plus, la proposition « à demi-souriante et ennuyée « ainsi que la comparaison « comme un enfant qui se pend après vous « déprécient Charles et révèle l'éloignement du couple. Outre ses interventions implicites, Flaubert fait aussi des commentaires ironiques et de plus en plus explicites qui dévalorisent Charles. En effet, on retrouve, lors de la scène du balcon, son côté ironique avec le jeu des pétales de fleurs destinées à Charles et qui, finalement, atterrissent dans « les crins mal peignés de la vieille jument blanche «. La dévalorisation de Charles est également construite grâce à l'énumération (« le coeur plein des félicités de la nuit,... «), à la métaphore du bovin (« ruminant « et le jeu avec Bovary) ainsi qu'à la comparaison (« comme ceux qui... «). En conclusion, ce passage est original par le choix d'un point de vue quasiment unique. De plus, il est également intéressant car il est représentatif du travail d'écriture de Flaubert et suscite beaucoup de questions concernant Emma dont nous n'avons pas accès aux pensées. On peut alors se douter que le bonheur de Charles n'est pas réciproque... GH9RN

Liens utiles