Devoir de Philosophie

Maupassant, Boule de Suif - Fiche de lecture 

Publié le 10/12/2010

Extrait du document

maupassant

 1. Biographie de Guy de Maupassant

   2. Résumé détaillé de « Boule de Suif «

   3. Les idées de « Boule de Suif « - thèmes

   4. Le style de Guy de Maupassant

 

1. Biographie

 

Maupassant naît le 5 août 1850, soit à côté de Dieppe, soit à Fécamp chez sa grand-mère maternelle. Il passe son enfance à Fécamp. Le climat familial est loin d’être bon, sa mère étant névropathe et son père très faible.

 

Il ira au Lycée Napoléon à Paris, puis en pension dans une institution ecclésiastique à Yvetot. Il passe ses vacances à Fécamp. A cette époque, cette station était fréquentée par beaucoup d’artistes célèbres dont Courbet, Monet, Offenbach et quelques autres. Maupassant est sportif et bon nageur.

 

Suite à une frasque, il est renvoyé de son école et terminera sa rhétorique à Rouen. Deux hommes vont l’aider pour ses premiers écrits : un certain Bouillet, conservateur de la Bibliothèque Municipale de Rouen, et Gustave Flaubert, ami de la famille de sa mère, née Le Poitevin.

 

Maupassant réussit son bac et est inscrit à la faculté de Droit de Paris. En juillet 1870, il est mobilisé dans l’intendance à Rouen. Il participera à la campagne de l’Eure, mais la défaite met fin à cette triste expérience. Cette époque servira à  inspirer de nombreux contes et de nombreuses nouvelles, dont « Boule de Suif «

 

Il entre dans l’administration d’abord à la Marine, puis à L’instruction Publique. En 1880, Flaubert pousse Maupassant à publier. Ce seront un recueil de poèmes et six nouvelles, dont « Boule de Suif «. Le succès est grand et il devient célèbre. Mais à la mort de Flaubert en juin 1880 il ralentit dans son travail. Des ennuis de santé vont le pousser à faire des séjours à Antibes et Cannes, mais il achète, en 1883, la maison « Guillette « à Etretat. De 1883 à 1890, il fera aussi plusieurs voyages en Afrique du Nord, mais il continue à publier au travers des quotidiens « La maison Tellier «, « Les contes de la Bécasse « etc. En 1883 sort son premier roman « Une vie « et en 1885 ce sera « Bel ami « puis en 1887 « Le Horla « et « Pierre et Jean «

 

Son frère cadet devient fou et décède en novembre 1889. De son côté, Maupassant est atteint d’une syphilis qui évoluera en paralysie générale. En janvier 1892 il tente de se suicider et est interné dans une clinique à Passy. Après de longues souffrances, il meurt le 6 juillet 1893.

 

2. Résumé

 

Nous sommes en 1870 et l’armée française est en pleine déroute. Des bruits courent que les Prussiens seraient en passe d’occuper Rouen. Maupassant décrit cette armée en débandade, ainsi que les petits groupes de francs-tireurs qui se poussent du col, font les fanfarons, et tentent de faire croire qu’à eux seuls ils vont continuer le combat…Le peuple est effaré, habitué qu’il est aux victoires et non aux défaites. Tous les commerces sont fermés et les bourgeois attendent avec anxiété l’arrivée des premières troupes ennemies.

 

Les Allemands arrivent et les ordres claquent dans une langue « inconnue et gutturale « Tout le monde craint la nouvelle autorité qui va s’installer. Mais l’occupation est aussi une installation et les vainqueurs vont s’installer chez les vaincus. Les « occupés « soignent les occupants avec l’espoir d’en tirer quelques avantages. Le tout sera de ne pas montrer ce type de comportement à l’extérieur ! Et puis, voilà que l’occupant exige de l’argent… Comme la région est plutôt riche, elle paye mais, comme le dit Maupassant : « … ils étaient riches d’ailleurs. Mais plus un négociant normand devient opulent et plus il souffre de tout sacrifice, de toute parcelle de sa fortune qu’il voit passer aux mains d’un autre. «

 

Certains ont des affaires importantes au Havre et voudraient s’y rendre. Ils devraient passer, sur terre, par Dieppe, puis par bateau jusqu’au Havre. Grâce à certaines influences, une diligence est autorisée à quitter la ville et dix personnes sont inscrites pour ce voyage. Malgré la nuit noire, trois hommes se reconnaissent et prétendent qu’ils ne font que conduire leur femme là-bas, alors que la réalité est autre. Ils comptent se réfugier au Havre et si l’occupant s’en approchait, ils fileraient en Angleterre. Il neige et l’on ne voit quasiment rien. Les passagers embarquent et on part enfin. Le jour se lève enfin et la neige cesse de tomber. On se regarde… Il y a là un marchand de vin et sa femme, les Loiseau et, plus dignes, le couple Carré-Lamadon. Lui, il possède trois filatures, est titulaire de la Légion d’honneur et membre du Conseil général. Viennent ensuite le comte et la comtesse Hubert de Bréville. Ce petit monde occupe le fond de la voiture. Il y a encore deux bonnes sœurs, ainsi qu’un homme et une femme. L’homme est connu, il s’agit de Cornudet « la terreur des gens respectables « dit Maupassant. Pourquoi ?... Tout simplement parce qu’il est pour la République. Et la femme ?... Elle est tout aussi connue !... Une femme de mœurs légères, mais des plus attirantes et des plus sympathiques par ailleurs. Une fois reconnue, les mots de « prostituée « et de « honte publique « vont circuler. Les femmes forment aussitôt un bloc contre elle, alors que les hommes en font autant face à Cornudet. Ils sont frères par l’argent et les biens possédés.

 

Et la diligence n’avance pas, le voyage s’éternise et ils voient le moment où l’on ne sera jamais arrivé pour le soir… La faim et la soif s’emparent des voyageurs et ils n’arrivent pas à obtenir quoi que ce soit des paysans croisés sur la route. Ceux-ci craignent une famine et entendent conserver pour eux-mêmes. Et la soif et la faim montent… Boule de Suif se penche à plusieurs reprises et passe une main sous ses jupes, elle hésite… Cornudet offre à boire à sa gourde, mais ils refusent tous. Boule de Suif se décide enfin et sort un panier de sous ses jupes. Elle dévoile une terrine qui contient deux poulets, des pâtés, des fruits, bref des provisions pour trois jours. Elle mange et les femmes la regardent avec mépris. C’est Loiseau qui craquera le premier et acceptera une cuisse qu’il mangera avec le plus ostentatoire plaisir. Alors, Boule de Suif proposera aux bonnes sœurs qui n’hésitèrent pas à accepter. Cornudet en fit de même suivi de Madame Loiseau poussée par son mari. On débouche une des quatre bouteilles du panier. Madame Carré-Lamadon va s’évanouir et se verra offrir un peu de vin par les bonnes sœurs. Boule de Suif va, humblement, insister auprès des autres pour qu’ils acceptent quelque chose et ils cèdent malgré tout leur orgueil. L’ambiance change… Comment manger les provisions de cette femme tout en refusant de lui parler ?... On alla même jusqu’à trouver cette femme « pleine de dignité « quand elle attaqua Cornudet qui s’en prenait à Napoléon III. En effet, elle estimait que c’était les républicains comme lui qui avaient précipités cette défaite !... On entra enfin dans le bourg de Tôtes et un Allemand ouvre une portière. Ils sortent… Un grand jeune homme blond les observe. Il est l’officier responsable du village. Un peu révoltés par la soumission montrée par les autres, Cornudet et Boule de Suif tentent de se montrer plus dignes. L’officier examine tous les papiers et les autorisations données par le général, puis sort sans commentaires. Mais le patron de l’auberge revient au moment de passer à table et demande qui est Mademoiselle Elisabeth Rousset. Boule de Suif répond que c’est elle et se voit ordonnée de le suivre chez l’officier. Elle refuse, mais le patron insiste en lui disant qu’elle risque, par ce comportement, de provoquer des ennuis pour ses compagnons de voyage. Tout le monde la pousse donc à accepter et elle suit l’homme. Elle revient offusquée et rouge de colère, refuse de dire aux autres de quoi il s’agit… Un autre couple est là, à table, et ne cesse de critiquer les Prussiens. Enfin, tout le monde va se coucher. Mais Loiseau, pris d’un petit désir, observe le couloir. Il voit Boule de Suif  qui se dirige vers les toilettes et Cornudet qui sort de sa chambre et qui l’attend. Il la retient lorsqu’elle revient et tente de la suivre dans sa chambre. Elle refuse obstinément ! Le matin, à l’heure du départ, les hommes ne trouvent ni la diligence préparée, ni le conducteur. Ils apprennent que le commandant a donné l’ordre de ne pas atteler. Tous les hommes voulurent voir l’officier et celui-ci confirma son interdiction malgré l’autorisation du général.

 

Que se passe-t-il ? … L’officier aurait-il l’intention d’exiger d’eux une rançon pour les laisser partir ?... A peine sont-ils réunis que l’officier envoie à nouveau l’aubergiste qui demande, tout haut, à Boule de Suif si elle n’a pas changé d’avis. Folle de rage, celle-ci répond : « …jamais, jamais, jamais ! « Et, dans sa colère, elle déclare que ce qu’il veut c’est coucher avec elle. Tout le monde est offusqué et le comte demande à tous de faire bloc derrière elle. Le lendemain tout le monde est bien abattu. Et certaines idées sont émises… Après tout, quel est le problème pour elle ?... Madame Loiseau ira jusqu’à dire tout haut qu’elle espérait bien que « cette garce là « ne les ferait pas rester une éternité…

 

Le lendemain toujours pas de départ prévu. Les femmes sont les premières à s’exciter, après tout, pour cette femme, c’est son métier !... Qu’elle le fasse et qu’on n’en parle plus !... Alors que Loiseau voudrait la livrer de force, le comte est partisan de la négociation et dit qu’il conviendrait plutôt de la « décider « La comtesse l’aborde, alors qu’elle rentre d’un baptême qui venait de se tenir dans le village, et chacune se met à lui parler gentiment. A table chacun va faire des allusions à de grands sacrifices faits par des femmes tout au long de l’histoire.

 

Le soir, le patron de l’auberge reçoit un nouveau « Non « retentissant.  La plus vieille des deux religieuses évoque le sacrifice d’Abraham avec le groupe et affirme que Dieu accepte « toutes les voies et pardonne le fait quand le motif est pur «…

 

Le lendemain matin, le comte sort avec Boule de Suif et lui parle longuement… Enfin, le midi, les choses vont se faire et chacun écoutera même le bruit des ébats au travers du plancher. Et chacun de sourire, de plaisanter, et Loiseau évoque même un petit quadrille s’il y avait eu un piano !... Enfin, tout le monde va dormir…

 

Le lendemain tout le monde est prêt et il ne manque plus que Boule de Suif. Elle paraît, troublée, triste, et s’avance vers les autres, qui s’en éloignent ostensiblement. Ils montent dans la diligence et personne ne semble même la voir ! Le voyage reprend et quelques heures plus tard, chacun sort des provisions. Boule de Suif n’a pas eu le temps d’y penser, mais elle voit clairement qu’elle n’a rien à attendre de ses voisins ! Même Cornudet et les deux bonnes sœurs l’abandonnent. Elle pense à son panier du voyage à l’aller et de grosses larmes vont couler de ses joues. Madame Loiseau dira qu’ « elle pleure sa honte « !

 

« Et Boule de Suif pleurait toujours ; et parfois un sanglot, qu’elle n’avait pu retenir, passait, entre deux couplets, dans les ténèbres. «

 

3. Les idées

 

Dans cette superbe nouvelle Maupassant veut passer plusieurs messages.

 

    - L’ennemi

 

      Il hait les Prussiens qui viennent de gagner cette guerre. Ils occupent son pays et sont les plus forts. Si, parfois, le peuple semble un rien plus résistant, il n’en va vraiment pas de même des bourgeois, des riches et des membres de la « haute «. L’officier reste poli, mais se comporte comme un potentat, alors que les autorisations sont données par un général. Mais c’est cela un occupant, un vainqueur. C’est quelqu’un qui peut tout se permettre !

 

    - Les Normands

 

      Comme dans beaucoup d’autres nouvelles, Maupassant n’hésite pas à faire passer les Normands comme des gens riches et terriblement attachés à leurs biens. Il le fera souvent.

 

    - La prostitution

 

      Il est important de noter que la prostitution est une chose que Maupassant abordera souvent dans son œuvre. Il en parlera, notamment, dans « La maison Tellier «, « Mademoiselle Fifi « et d’autres nouvelles. Il la présente comme un métier comme un autre et les prostituées seront pratiquement toujours considérées comme de bien braves femmes. J’ai aussi remarqué que souvent il met une femme juive dans un groupe de prostituées. Le bordel, dans son œuvre, est presque un endroit naturel pour les notables.

 

    - Les milieux sociaux

      Maupassant a pris soin de mettre un peu de tout dans cette diligence. Cela renforce évidemment la position qu’il veut défendre.

 

      Il y a un gros marchand, riche mais parvenu, et sa femme. Il y a un gros industriel, niveau au-dessus, membre de corps constitués. Il sera plus raffiné, mais ira dans le sens des autres. Les bonnes sœurs sont discrètes, mais suivent les autres. Cornudet ne fait pas partie du même groupe que ces gens, mais il est haï pour ses opinions politiques contraires aux leurs qui sont des nantis. Il se montrera aussi ingrat parce que Boule de Suif se sera refusée à lui. Plus de patriotisme à attendre de lui pour la soutenir !...Enfin, il y a le comte et la comtesse, le milieu de la noblesse. Avec beaucoup plus de formes, ils seront aussi dans le camps des autres. Le comportement de tous est dicté par le plus pur égoïsme qui vient de leur envie de partir. Mais pourquoi lui tourner le dos ?... Tout simplement parce qu’ils veulent se démarquer d’une prostituée, aussi généreuse soit-elle. Ils sont « autre chose «… Ils sont des gens biens, eux !... Quant à l’église, elle est mise dans le même bain que les autres puisque les « bonnes sœurs « se comportent comme les autres.

 

    - Le personnage Boule de Suif

 

      Elle est d’emblée présentée par Maupassant comme une femme bien ronde, mais très attirante physiquement. Elle a un joli visage, un beau teint, et est très souriante. Elle a aussi pas mal de qualités. Il nous la montre patriote et digne, discrète et plus que généreuse. C’est une femme entière. Pourquoi avoir choisi une prostituée ?

 

      Parce que ce statut social en fait une personne tout à fait différente des autres. Cela justifie d’autant plus la demande de l’officier prussien et donne plus de raisons aux autres de la forcer à céder. Après tout, elle « ne ferait que son métier « dit Madame Loiseau. Et puis, pour eux, qu’est ce que c’est que cette moins que rien qui fait toutes ces manières ?... Mais ses qualités de cœur vont faire que le lecteur ne peut que la prendre en sympathie par rapport aux autres. Ce sont eux qui passeront pour des moins que rien !

 

    - Maupassant et le naturalisme

 

      Certains englobent Maupassant dans le mouvement naturaliste. Or, celui-ci n’envisageait pas du tout les choses ainsi. Il reprochait au naturalisme de soutenir l’idée du déterminisme, de supprimer le libre arbitre des hommes ce en quoi il n’était pas du tout d’accord avec eux.

 

      Dans « Boule de Suif « Cornudet ose bien choquer les autres en chantant des chants républicains, il ne se gêne pas pour les contredire. Qu’est ce qui l’empêcherait de soutenir Boule de Suif qui s’est sacrifiée pour tous ?... C’est un choix ! Et les bonnes sœurs, ne seraient –elles pas tenues de donner l’exemple ? Elles ne le font pas et c’est un choix. Mais il en va de même pour chaque personne de cette diligence. Si le comte avait aussi été noble de cœur, et pas que de titre, qu’attendait-il ?... Et ainsi de suite.

 

4. Le style

 

Maupassant a une très belle écriture et très précise. Il excelle à décrire des ambiances. C’est flagrant quand il décrit la petite ville qui attend l’arrivée de l’ennemi. Non seulement le temps qu’il fait crée une ambiance particulière, mais aussi les odeurs. Il en fera tout autant quand il nous décrira les difficultés du voyage.

 

Mais il est également un redoutable portraitiste. En une phrase il peut faire passer énormément de choses sur un personnage ou un groupe de personnes. Il le fait pour les Prussiens et pour les Normands.

 

Carré-Lamandon : « … homme considérable… Il était resté, tout le temps de l’Empire, chef de l’opposition bienveillante, uniquement pour se faire payer plus cher son ralliement à la cause qu’il combattait avec des armes courtoises, selon sa propre expression. «

 

Sa femme : « … beaucoup plus jeune que son mari, demeurait la consolation des officiers de bonne famille envoyés en garnison. «

 

Quant au groupe de six personnes formant le fond de la voiture, il dit : « … le côté de la société rentée, sereine et forte, des honnêtes gens autorisés qui ont de la religion, des principes. «

 

On peut, sans problèmes, qualifier sa plume « d’acide « quand il le veut ! Il ne lui faut pas beaucoup de mots pour atteindre son but !

 

« Boule de Suif « est une nouvelle qui ne compte qu’une petite cinquantaine de pages, mais son efficacité est bien plus grande !

Liens utiles