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partie III commentaire composé rabelais/ frère jena des entommeures

Publié le 29/02/2012

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rabelais

Partie III :

Derrière le rire, satire du clergé et

Des guerres de religion et

Vision de l’Homme au XVIème

 

A/Satire des moines et des guerres

                               B/Vision humaniste de l’Homme

 

Derrière l’aspect comique et grotesque développé tout au long du texte, se cache une véritable satire du clergé et des guerres de religion. Dans le premier paragraphe, Rabelais se moque gentiment des moines en associant un nombre impressionnant de qualités, souvent inhabituelles pour un moine car attribuées la plupart du temps à un chevalier ou à un gentilhomme, au frère Jean des Entommeurs : « jeune, galant, frisque, de hait, bien à dextre, hardi , aventureux, délibéré, haut, maigre, bien fendu de geule, bien avantagé en nez, beau dépêcheur d’heures, beau débrideur de messes, beau décrotteur de vigiles ». Dans le second paragraphe, les moines sont ridiculisés par l’énumération d’une série de termes récités à la manière d’une incantation, qui eux-mêmes sont extraits d’une parodie des modulations du plain-chant : « ini, nim, pe, ne, ne, ne... ». La phrase « jusques ès dents en matière de bréviaire » montre une image de la parole divine qui n’est plus mise au service de la Foi mais au service de la guerre de religion. La Bible devient alors une sorte « d’arme de défense » qui permet aux chrétiens de commettre des atrocités « au nom du Christ », comme l’approuve l’utilisation par frère Jean des Entommeurs du « bâton de la croix qui était de cœur de cormier, long comme une lance, rond à plein poing, et quelque peu semé de fleurs de lys, toutes presque effacées » contre ses ennemis. L’enfilade des termes se rapportant à la violence est un contraste saisissant entre le pacifisme prôné par les dogmes religieux et la violence du combat : « ès uns écrabouillait la cervelle, ès autres rompait bras et jambes, ès autres délochait les spondyles du col.... » jusqu’à la ligne 64. Même lorsqu’un ami se rend, frère Jean des Entommeurs ne bronche pas et le frappe : « si quelqu’un de sa vieille connaissance lui criait : Ha ! frère Jean, mon ami, frère Jean, je me rends ! » et « Et soudain lui donnait dronos ». De plus, il attaque les soldats par surprise ce qui est contraire au Code de la Guerre : « il choqua donc si roidement sur eux, sans dire gare, qu’il les renversait comme porcs, frappant à tort et à travers, à la vieille escrime ». Les moinetons, eux-mêmes, n’hésitent pas à achever les blessés et les mourants, ce qui montre l’atrocité de la guerre : « Adonc, laissant leurs grandes capes sur une treille au plus près, commencèrent égorgeter et achever ceux qu’il avait  déjà meurtris ». Rabelais réprouve également la crédulité des soldats qui pensent trouver leur salut dans des invocations aux saints : « les uns criaient : « Sainte Barbe ! », les autres « Saint Georges ! », les autres « Sainte Nitouche ! », les autres « Notre-Dame de Cunault, de Lorette, de Bonnes Nouvelles... ». Les uns se vouaient à Saint Jacques ; les autres au saint suaire de Chambéry... ». L’aspect superficiel de la vie des moines est critiquée grâce au jeu de mots : « service divin » et « service du vin ». Cela révèle le train de vie parfois indécent et luxueux que menait la plupart des moines à l’époque grâce aux dons des fidèles. L’apostrophe « vous-même, monsieur le prieur » implique ainsi directement le prieur claustral. De plus, frère Jean des Entommeurs compare un homme « noble » à un homme qui apprécie le bon vin et non à un homme qui y verrait le sang du Christ : « jamais homme noble ne hait le bon vin : c’est un apophtegme monacal ». Nous retrouvons ainsi la présence de la polémique sur la place de l’Eucharistie dans la religion : faut-il, comme les protestants, considérer l’Eucharistie comme un simple acte de mémoire du sacrifice du Christ ou faut-il au contraire, comme les catholiques, la considérer comme l’action de rejouer la Cène par la Transsubstantiation, c’est-à-dire la conversion du pain et du vin en corps et sang du Christ, afin de s’en imprégner dans tout le corps ?...

La description chirurgicale du combat entre un homme et treize mille six cent vingt-deux hommes témoigne de l’atrocité de la guerre qui ressemble plus à un massacre sans pitié qu’à un combat entre des hommes : « cervelle », « spondyles du col », « démoulait les reins », « fendait les mandibules », « décroulait les omoplates », « sphacelait les grèves », « dégondait les ischies », « débezillait les faucilles », « arête du dos », « commissure lambdoïde » ou encore « fondement ». Or, le fait que cet « horrible spectacle » soit perpétré par un moine est assez dégradant quant à l’image de la religion. L’inégalité en nombre et en armes correspond aussi à une caricature de l’Armée de Charles Quint qui fut battue par une poignée d’hommes. Rabelais critique ainsi la stupidité de la guerre.

Cet extrait nous apporte au final la vision humaniste de la société de Rabelais. On remarque que la majeure partie du texte est portée sur le corps morcelé ce qui fait référence aux dissections du corps humain à la Renaissance. En effet, l’Homme est au centre de tous les intérêts. Les humanistes veulent ainsi avoir connaissance de chaque partie du corps humain et s’attachent aux sciences abstraites et concrètes. Mais, en réalité, ces derniers ne prônent pas la violence gratuite puisqu’ici même s’ils pillaient, les soldats ne s’attaquaient pas directement aux moines mais à leurs biens. Nous avons ici une vision contradictoire de l’Homme qui est à la fois capable de zèle et de courage pour se défendre et à la fois capable de commettre les pires atrocités...

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