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PORPHYRE (234-305) C'est par gloutonnerie que les hommes refusent la raison aux animaux

Publié le 19/10/2016

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PORPHYRE (234-305)

C'est par gloutonnerie que les hommes refusent la raison aux animaux

Et du moment que les animaux acquièrent des arts, et des arts propres aux hommes - ils apprennent à danser, à tenir les rênes, à lutter dans un combat singulier, à marcher sur un fil, et puis encore à écrire et à lire, à jouer de la flûte et de la cithare, à tirer à l'arc et à aller à cheval -, iras-tu encore contester qu'ils ont ce qui va recevoir, quand tu vois en eux ce qu'ils ont reçu?  Où le reçoivent-ils, si la raison en qui les arts se réalisent n'est pas là antérieurement ? Car non seulement ils n'entendent pas notre langage comme un bruit confus, mais ils perçoivent la différence entre les signes, ce qui ne peut venir que d'une intelligence raisonnable. Mais, disent-ils, ils sont malhabiles à ces activités humaines. - Mais les hommes non plus n'y sont pas tous habiles : sinon les concours n'auraient pas de sens ni pour les gagnants ni pour les perdants. - Mais, disent-ils, ils ne délibèrent pas, ne tiennent pas assemblée, ne rendent pas la justice. - Tous les hommes, dis-moi, le font-ils donc ? Beaucoup ne passent-ils pas aux actes avant de délibérer ? Et comment pourrait-on démontrer qu'ils ne délibèrent pas ? Nul n'en peut fournir un indice, tandis que les études particulières qu'on a faites sur les animaux démontrent le contraire.  Quant aux autres objections que l'on débite contre eux, ce sont autant de vieilleries : «Ils n'ont pas de villes », dit-on. - Mais les Scythes n'en ont pas non plus, dirai-je, eux qui vivent dans des chariots, ni les dieux. Ils disent encore : « Il n'y a pas de lois écrites chez les animaux. » Mais les hommes n'en eurent pas non plus tant qu'a duré leur bonheur. C'est Apis, dit-on, qui le premier institua des lois en Grèce, quand le besoin s'en fit sentir. C'est donc par gloutonnerie que les hommes refusent la raison aux animaux : mais les dieux et les hommes divins les respectent autant que les suppliants.

De l'abstinence, Paris, © Les Belles Lettres, vol. III, p 169-171.

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