Devoir de Philosophie

Caravage

Publié le 10/04/2015

Extrait du document

La corbeille de fruits, de 1596, constitue un exemple important, un des premiers dans l'Histoire de l'Art, de nature morte conçue en tant que genre autonome. En rupture avec la tradition académique qui déprécie la réalité des objets, Caravage déclare qu'il n'y a aucune différence entre peindre des fleurs et peindre des personnages, ce qui fait d'une banale corbeille de fruits un sujet digne d'être représenté. La recherche de la nature vraie menée par Caravage se révèle dans la reproduction soigneusement réaliste des différentes qualités de fruits, pommes, raisins, figues, qui, baignant dans une lumière diffuse, se détachent sur un fond clair. Le tableau reproduit aussi les marques du dépérissement des productions de la nature, visibles dans la feuille recroquevillée ou dans la pomme touchée, et qui renvoient à la caducité de toute chose. Des images analogues, symbolisant le caractère éphémère et transitoire des biens terrestres, se répètent dans les tableaux appelés "Vanités" qui se répandent en Europe pendant tout le XVIIe siècle, et sont le fait essentiellement de peintres hollandais et flamands.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

En 1599, Caravage obtient une commande publique importante, grâce à l'appui de son protecteur romain, l'influent cardinal Francesco Maria del Monte. L'artiste lombard est chargé de peindre pour la chapelle Contarelli dans l'église Saint-Louis-des-Français, un cycle qui raconte trois épisodes de la vie de l'évangéliste Matthieu : la Vocation et le Martyre pour les deux tableaux latéraux, saint Matthieu et l'ange pour le panneau central. Le Caravage aborde cette confrontation importante avec un sujet d'art sacré en inventant des solutions absolument originales : l'histoire du saint n'est absolument pas idéalisée ; elle se déroule au contraire dans la réalité de milieux et de personnages quotidiens, exprimant une religiosité marquée par des valeurs morales et sociales et reflétant un message évangélique de pauvreté. La valeur formelle et symbolique attribuée à la lumière dans les oeuvres de Caravage est ici évidente : une lumière dure, aveuglante, contrastant violemment avec des ombres profondes, isole et définit les scènes et les détails. L'opposition lumière-ténèbres revient dans les conceptions de tout le XVIIe siècle comme métaphore de la dialectique salut-péché, symbole que l'on retrouve dans les oeuvres de maturité du Caravage.

Le Martyre représente le moment de l'exécution de saint Matthieu. L'épisode est décrit comme un fait divers, un assassinat auquel assiste Caravage lui-même qui se représente à l'arrière-plan, à gauche du bourreau, en faisant ressortir de l'obscurité son visage angoissé. Matthieu est allongé par terre au pied de l'autel, le flanc ensanglanté ; il vient d'être frappé par le bourreau qui le tient par le bras, tandis qu'un ange descend du ciel sur un nuage pour lui tendre la palme du martyr. Le tableau traduit très efficacement le caractère instantané, dramatique et tumultueux de l'action se déroulant dans un espace sombre et profond, déchiré par la lumière qui met en évidence les gestes et les regards apeurés des personnes présentes : à gauche, un groupe d'hommes en vêtements de l'époque; en bas, des deux côtés de la scène, les catéchumènes qui attendaient d'être baptisés par Matthieu ; à droite, l'enfant de choeur qui s'enfuit, le visage crispé dans un hurlement de douleur. La lumière atteint aussi bien le saint que son bourreau, car il s'agit d'une lumière divine, symbolisant la possibilité de rédemption qui est accordée même au pécheur. Les radiographies effectuées sur la toile ont montré sous la version actuelle deux autres versions précédentes et différentes, ce qui prouve que Caravage ne travaillait pas sur des dessins préparatoires, mais qu'il peignait d'un seul trait avec un talent magistral.

 

 

 

 

 

Liens utiles