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Analyses de différentes scènes de DON JUAN de MOLIERE

Publié le 04/03/2012

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Acte I, scène 1

 

Le rideau se lève sur une conversation déjà en cours : ceci donne au spectateur l'illusion de la réalité, en supprimant toute impression de temps mort. C’est un procédé que Molière a utilisé dans d'autres pièces comme “Le misanthrope” ou “Le malade imaginaire”. Pour renforcer cette illusion, on peut imaginer une mise en scène qui nous permette d'écouter les premiers propos échangés avant que le rideau ne se lève. D'emblée, l'atmosphère est celle de la comédie : l'éloge du tabac n'est qu'une tirade bouffonne, parodie d'exercices de rhétorique à la mode latine mais où Molière cernait déjà la convivialité du tabac : un plaisir d’échangre lié au plaisir de pétuner..

Cette scène constitue une scène d'exposition qui présente les personnages : on a les portraits de Sganarelle et de Don Juan, celui-ci brossé par son valet, homme du peuple : nous apprenons que le maître est jeune, marié, noble, séducteur traître et perfide (= celui qui ne tient pas sa promesse, qui manque à sa parole) ;  il a trahi la confiance d'Elvire, il l'a déshonorée, il a bafoué les liens sacrés du mariage comme l’«obstacle sacré d'un couvent« ; «enragé, diable«, il est déjà «le méchant homme« : «il me vaudrait mieux être au diable qu'a lui« ; bon comédien, il abuse de faibles femmes, étant même polygame, «collectionneur à toutes mains« (expression employée pour un cheval bon pour la monte et l'attelage). De Sganarelle, nous mesurons la lucidité, le bavardage et la «crainte«, l’«horreur«, que lui inspire son maître, qui prouvent la véracité de ses dires. Il est scandalisé par la philosophie de Don Juan qui ne croit pas à la vie après la mort mais veut, en épicurien, obtenir le bonheur sur terre tout de suite, vit dans les plaisirs. Lui, le croyant face à l’impie, met sur un même plan la religion et un ramassis de croyances populaires, ce qui discrédite la religion. L'attachement à la foi chrétienne se manifeste dans les insultes proféré : «turc« (musulman), «pourceau d'Épicure« (libertin). 

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« Après l’exposition de la situation, la poursuite de Don Juan par Elvire, grâce à une conversation entre deux confidents qui donne de l’épaisseur au personnage, Gusman disparaît et cela importe peu puisqu'il n'était qu'un prétexte. Sganarelle assure le lien entre les deux scènes et constitue une sorte de pivot : nous voyons son autre visage dans ses rapports directs avec son maître, Don Juan, dont nous avons seulement entendu parler dans la scène précédente.

Les rapports s'inversent : Sganarelle, qui dominait son interlocuteur à la scène 1, se voit dominé par Don Juan : la taille des répliques est éloquente ! Don Juan est lassé d’Elvire, sa femme légitime, et évoque « l’autre objet qui l’a chassée de sa pensée », le mot « objet » n’étant pas péjoratif mais ayant à l’époque le sens courant de «femme aimée». Sganarelle joue le rôle d’un complice qui sait cligner de l’oeil aux bons endroits, qui s’essaie, avec « se plaît à se promener de liens en liens », à un jeu de mots (avec « de lieu en lieu »). Mais Don Juan s’amuse à vouloir l’obliger à l’approuver.

Sganarelle avec son « Assurément, vous avez raison, si vous le voulez ; on ne peut pas aller là contre.

Mais si vous ne le vouliez pas, ce serait peut-être une autre affaire » révèle sa condition de valet qui ne peut que donner raison à son maître.

Valet de comédie, il est flatteur, couard, attaché à ses intérêts, a peu d’autonomie mais essaie de mettre sa responsabilité à l’abri.

Il va tout de même être invité à s’exprimer franchement et dire qu’il « trouve fort vilain d’aimer de tous côtés ».

C’est donner l’occasion à Don Juan de décrire et de justifier sa conduite de séducteur dans une tirade qu’il est intéressant de démonter : Il est d’abord un esthète, comme le montre le portrait que fait de lui Sganarelle qui indique une certaine recheche dans le costume (« une perruque blonde et bien frisée, des plumes à votre chapeau, un habit bien doré et des rubans couleur de feu ») ; à la fin de la scène, Don Juan semble mépriser Elvire parce qu’elle « n’a pas changé d’habit » et est venue « avec son équipage de campagne ».

Aussi est-ce d’abord l’attrait de la beauté qui l’anime : « la beauté me ravit partout où je la trouve » - « la belle chose que d’être mort dès sa jeunesse à toutes les autres beautés qui nous peuvent frapper les yeux ». Il a aussi le goût de la nouveauté (« tout le plaisir de l’amour est dans le changement » - «quelque objet nouveau qui vient réveiller nos désirs » - « les charmes attrayants d’une conquête à faire »), des débuts des relations (« les inclinations naissantes, après tout, ont des charrmes inexplicables »). il ne cherche que l’assouvissement d’inlassables désirs : « Il n’est rien qui puisse arrêter l’impétuosité de mes désirs » ; il ne peut « se résoudre à borner ses souhaits » ; il ne ferait que rendre «à chacune les hommages et les tributs où la nature nous oblige», se présentant comme un malheureux étalon victime de son satyriasis.

Or la conduite de Don Juan qui va sans cesse d’une femme à l’autre a pu être expliquée comme causée par son incapacité à en satisfaire aucune, par son impuissance sexuelle dont il espère toujours qu’une autre l’en délivrera. Mais on peut se demander s’il est vraiment sensuel.

Ce qui lui plaît, en fait, c’est la conquête : « On goûte une douceur extrême à réduire par cent hommages le coeur d’une jeune beauté, à voir de jour en jour les petits progrès qu’on y fait, à combattre par des transports, par des larmes et des soupirs, l’innocente pudeur d’une âme qui a peine à rendre les armes, à forcer pied à pied toutes les petites résistances qu’elle nous oppose, à vaincre les scrupules dont elle se fait un honneur et la mener doucement où nous avons envie de la faire venir...

Il n’est rien de si doux que de triompher de la résistance d’une belle personne».

Il a «sur ce sujet l’ambition des conquérants, qui volent perpétuellement de victoire en victoire» ; il se sent «un coeur à aimer toute la terre et, comme Alexandre, souhaiterait qu’il y eût d’autres mondes , pour y étendre ses conquêtes amoureuses ». Non, il n’est pas sensuel, mais plutôt sadique : «méchant homme», il recherche le plaisir qui est pimenté par le tourment d’autrui. Pourtant, il se prétend altruiste puisqu’il ne veut pas se soustraire à ces nombreuses femmes qui ont besoin de lui, à « toutes les belles qui ont droit de le charmer » : « J’ai beau être engagé, l’amour que j’ai pour une belle n’engage point mon âme à faire injustice aux autres » !. »

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