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ACTE V, SCÈNES 4, 5 ET 6 (DON JUAN, SGANARELLE, PUIS UN SPECTRE EN FEMME VOILÉE, PUIS LA STATUE DU COMMANDEUR)

Publié le 17/01/2022

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Molière écrivain a été jugé sévèrement par La Bruyère, Fénelon, Vauvenargues. Voici ce que dit Fénelon : « En pensant bien, il parle souvent mal; il se sert des phrases les plus forcées et les moins naturelles... J'aime bien mieux sa prose que ses vers... Mais, en général, il me paraît, jusque dans sa prose, ne parler point assez simplement pour exprimer toutes les passions. » Reconnaissons que Molière n'est pas toujours à l'aise dans le maniement des notions abstraites, que ses métaphores manquent de cohérence, que ses phrases sont parfois lourdes, mal construites, encombrées de conjonctions.

« Don Juan est, selon l'expression de Jean Roussel (Le Mythe de Don Juan), un « personnage comédien ».

Ses attitudes relèvent perpétuellement du jeu.

Jeu du séducteur (les paysannes), goût du costume et dutravestissement (l'échange de vêtements), rôle de « l'ami » devant Monsieur Dimanche, rôle du « repenti » enfin(dès l'acte I, sc.

31 qui l'amène à adopter, à l'acte V, celui de l'hypocrite, « le meilleur de tous les personnages qu'on puisse jouer aujourd'hui »,dit-il explicitement (V,2).

Cette esthétique de lamétamorphose fait de Don Juan un artiste, uncomédien, dont le pouvoir de séduction sur sespartenaires rejoint celui de l'acteur sur lespectateur.

On sait qu'il ne faut pas le croire,mais il fait qu'on le croit : « il ne faut jamaiscroire les monsieux », mais « vous faites que l'onvous croit » lui dit Charlotte à l'acte II, scène 2.L'étymologie grecque suggère d'ailleurs cerapprochement : hypocrite ne veut-il pas dire « acteur » dans la tragédie et la comédie antiques? Ce thème du travestissement et du masque, quiprend la forme d'une réflexion sur l'illusiondramatique, relève de l'esthétique baroque, trèssensible dans toute la pièce. Une figure prométhéenne Dans cette perspective, il est logique que DonJuan, comédien perpétuel, achève sa carrièredans les flammes de l'Enfer.

Au xvIle siècle eneffet, l'Église continue de mettre au ban de lasociété ceux qui font profession d'acteurs, en lesfrappant d'excommunication.

Plusfondamentalement, Don Juan, le contestataire quibafoue les règles sociales, morales et religieuses,appelle une vengeance, non point humainecomme Tartuffe, mais divine, car son défi estessentiellement d'ordre métaphysique et religieux.En refusant les commandements de Dieu (lepremier, croire en Dieu ; le quatrième, honorer sesparents ; le cinquième, ne point tuer ; le sixièmeet le dixième, ne point commettre d'adultère et nepas convoiter la femme d'autrui), il s'exposedirectement au châtiment divin.

Or il estremarquable que ce châtiment se manifeste en lapersonne du Commandeur.

Comme on l'a vu,celui-ci représente non seulement l'homme qu'il atué pour lui arracher sa fille (version du mythequ'ignore curieusement Molière), mais aussi l'ordresocial, et en dernier la figure du Père, sublimée enDieu.

La disparition du libertin rétablit ainsi l'ordredu monde, trop longtemps altéré.. »

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