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Axël

Publié le 30/03/2013

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Jusqu'à la fin de sa vie, Villiers de l'IsleAdam travailla son texte, récrivant les scènes qu'il jugeait imparfaites. Ce n'est qu'après sa mort, en 1893, que ce drame fut représenté sur scène, grâce aux efforts et au soutien de Mallarmé et de Huysmans. Après la première représentation, un critique écrivit: « C'est là un poème philosophique dramatisé et dialogué qui perd à se voir réalisé par des moyens scéniques. « Villiers était conscient de ce fait, affirmant que la lecture solitaire convenait mieux à son drame que la représentation scénique.

« Huysmans, qui s'occ upa de la publication posthume d'Axë l, ne fut guère tendre à l'égard de l 'œuvre .

Dans une l ettre à un ami, il écrit : « Axël du pauvre Villiers fait ici un terrible fo ur.

C'est bien mauvais, on peut se le dire, tout de mêm e, le mépris général est excessif.

» Après avoir enfermé l' Archidiacre dans le caveau du château, Sara s'enfuit EXTRAITS L' Archidiacre veut obliger Sara à s'engager dans la voie religieuse Ma fille, vous êtes une lamp e dans un tombeau : je veux vous raviver pour !'Espérance.

Vanité que la vie sans prière! La vingt-t roisième année de vos jours s'est accomplie; ce qu'ilfaut , pour vous secou­ rir, c'est l'o nction, -c'est l'onction! et que vous soyez toute à Dieu, qui pacifie les cœurs inquiets.

Certes, selon les hommes, je devrais admettre que vous êtes libre de nous quitter; mais selon Di eu, moi, qui ai charge de votre âme, puis-je vous laisser rentrer dans le monde, seu le, riche et aussi belle, au milieu de ces tentations (dont je n'ignore pas les séduisantes violences, non plus que le désenchantement mortel) ? - Ai-je le droit , alors que vous m'avez été confiée, de ne pas agir, en cette circonstance, pour le mieux de votre bonheur réel, incapable que vous êtes de le discerner ?-L'expérience des voluptés conduit au désespoir : plus tard, malgré votre volonté, vous seriez sans force pour reve­ nir ; je dois le prévoir pour vous.

Quoi ! le vertige vous guette au bord du gouffre et je n'aurais pas le droit de vous préserver de son attirance ! Mon abstention serait une faiblesse proditoire dont vous saurie z me demander compte au dernier jour.

-Ne point vous retenir quand vous voulez vous plonger dans les ténèbres ! sans direc­ teur, nifamille ! et avec l'esprit ardent que je devine sous vos paupières baissées? Non ! non.

Vous ne sauriez vous conduire, là-bas, selon Dieu.

-Je vais donc vous offrir à Lui ce soir même.

Oui, cette nuit.

La mort seule permet de préserver l'amour absolu Sara.

- Axël, Axël, m'oublies-tu déjà, pour des pensées divines ? ...

Viens, voici la terre ! viens vivre ! Axël, froid, souriant et sca ndant nettement ses paroles.

- Vivre ? Non, -notre existence est remplie, - et sa coupe déborde ! Quel sablier comptera les heures de cette nuit ! L'avenir ? ...

Sara, crois en cette parole : nous venons del ' épuiser.

Toutes les réalités, demain, que seraient-elles, en compa raison des mirages que nous venons de vivre ? A quoi bon monnayer, à l'exemple des lâches humains, nos anciens frères, cette drachme d'or à l'effigie du rêve -obole du Styx-qui scintille entre nos mains triomphales ! La qualité de notre espoir ne nous permet plus la terre.

Que demander, sinon de pâl es reflets de tels instants , à cette misérable étoi l e, où s'attarde notre mélancolie ? La Terre, dis-tu ? Qu 'a-t-e lle donc jamais réalisé, cette goutte de fange glacée, dont ! 'H eure ne sait que mentir au milieu du ciel? C'est elle, ne le vois-tu pas, qui est devenue l'illusion! Reconnais- l e, Sara: nous avons détruit, dans nos étranges cœurs, l'amour de la vie -et c'est bien en RÉALITÉ que nous sommes devenus nos âmes ! Accepter, désormais, de vivre, ne serait plus qu'un sacrilège envers nous-mêmes.

Vivre ? les serviteurs feront cela pour nous.

« Toutes les réalités , demain, que seraient­ elles, en comparaison des mirages que nous venons de vivre ? » NOTES DE L'ÉDITEUR ils auraient sans doute cédé à la tentation "par l'or et par l'amour".

Cette lucide philosophie du désespoir est un refus de tout compromis et une noble tentative pour défendre les droits du rêve.

Il s'ag it de conserver à tout prix la dignité humaine telle que Villiers la conçoit, fût-ce en sac rifi ant la vie elle-même.

» Préface d'Axël , dans Œuvres complètes de Léon Bloy, grand ami de Villiers, écrivait peu après la mort de celui-ci : « Oui, depui s Isi s jusqu'à Axël, il [Villiers] a eu ce rêve de la Femme infiniment belle, aussi forte que les colonnes des cieux, omnisciente autant que Celui qui siège s ur les Chérubins, une Femme qui sera it Dieu ! » La Résurrection de Villiers de l'Isle-Adam, dans Œuvres complètes, Mercure de France, 1965.

«La leçon d' Axël reste donc intacte : puisque le monde ne peut jamais nous donner la satisfaction idéale dont nous rêvons, nous n'avo ns qu 'à le quitter.

Dure vérité, à laquelle Axël et Sara n'accèdent qu'après avoir appris, au cours de leur s ascétiques étude s, que seule la réa lité spirit uelle existe : sans cette prépara tion, Villiers de l'Is le-Adam , Gallimard, 1986.

1 Goldner I Sipa-lcono 2 dessin de J.

Schnorr von Carolsfeld.

1820 3 dessi n de Ferdinand Olivie r, 18 18 4 des s in de Karl Blechen.

1823 VILLI ERS DE L'IS LE-ADAM 04. »

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