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Balzac : Les Chouans

Publié le 09/09/2014

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Mais surtout il faudra faire étudier le motif du destin qui est la vraie structure de l'oeuvre — et dont Claudie Bernard rappelle parfaitement les articulations n. 2, p. 252. À cet égard, une réplique placée en plein centre du texte est exemplaire : « [...] apercevant les cadavres étendus sur la paille, elle s'écria en frissonnant : — La foi d'un gentilhomme ! ah ! ah ! ah ! Après ce rire, qui fut affreux, elle ajouta : — La belle journée ! — Oui, belle, répéta-t-il, et sans lendemain « (p. 252). L'expression de Marie, « la foi d'un gentilhomme «, est un rappel sarcastique du serment que lui avait fait Montauran p. 223, fonctionnant par analepse thématique donc, et dramatisée par la modifica­tion du contexte d'énonciation (ou scénographie). Par contre la formule ironiquement antiphrastique « la belle journée «, terminée par Montauran (« sans lendemain «), est une prolepse dont l'importance est attestée par le titre même du troisième et dernier chapitre (« Un jour sans lendemain «) : le partage de son énonciation entre les deux amants désormais irrémédia­blement séparés est comme un filtre d'amour fatal échangé pour mieux conduire à la fin.

Étude

EXPLICATIONS DE TEXTES

Balzac déplaît parfois à certains lycéens — et à d'autres... —à cause de ses fameuses descriptions, jugées longues, ennuyeuses, laborieuses, etc. S'il n'est pas bon de limiter les explications de textes à ces pages précises, qui pourraient effec­tivement laisser en mémoire des plus négligents des élèves une

fâcheuse impression de déjà-vu, il serait peut-être également trop facile de ne pas vouloir aborder de front la principale caractéristique stylistique de ce romancier. Une étude plus précise pourrait être proposée pour un texte, quand deux ou trois autres pourraient être envisagés de façon complémentaire, et plus rapidement, pour faire réfléchir sur les motivations de pareille énonciation.

1. Pp. 78-79 [depuis « Cet inconnu, homme trapu «, jusqu'à « une longueur double de celle des fouets ordinaires «] : le portrait de Marche-à-terre.

Introduction : Placé en début de récit, quand l'action n'a pas encore vraiment commencé, ce texte se propose comme une unité précise correspondant à un genre codé : le portrait d'un personnage secondaire. Secondaire, en effet, parce que la grossièreté et la trivialité de l'objet décrit l'inscrivent tout de suite du côté des créatures pittoresques qui agiront autour des héros plus nobles, plus crédibles ou plus respectables : il faudra attendre encore plusieurs dizaines d'années pour que « les misé­rables « aient droit d'entrée comme acteurs principaux dans la grande littérature. Le lecteur sait donc tout de suite qu'il va avoir affaire à un morceau de bravoure stylistique, accumulant notations extraordinaires et analogies sémillantes pour suggérer des effets remarquables. Balzac s'inscrit dans cette tradition, 

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« partira, très simplement, d'une comparaison entre les différents titres qu'a pris ce roman historique : Le Gars, puis Les Chouans ou la Bretagne il y a trente ans -ces titres étaient ceux auxquels pensait Balzac durant la rédaction du texte en 1828 ; Le Dernier Chouan ou la Bretagne en 1800 (titre de la première édition parisienne, en 1829), et enfin Les Chouans ou la Bretagne en 1799 (titre actuel, à partir d'une nouvelle édition, assez pro­ fondément remaniée, en 1834).

D'un titre à l'autre, la pers­ pective générale se modifie, se précisant ou s'élargissant : pas­ sage du particulier remarquable (Le Gars, Le Dernier Chouan) au collectif plus flou (Les Chouans) ; passage du ponctuel anec­ dotique (Le Gars) à l'allégorique culturel (Les Chouans OU la Bretagne); passage d'une énonciation idiolectale patoisante à valeur poétique et historique (Le Gars) à une énonciation bana­ lisée par le discours des historiens (Les Chouans); passage d'un marquage déictique de l'Histoire (la Bretagne il y a trente ans) à une notation datée, avec une modification d'un an qui déplace l'intérêt historique et romanesque du nouveau siècle vers l'ancien, la charnière ne s' envisageant plus de la même façon comme ouverture ou comme fermeture (la Bretagne en 1800/en 1799).

De la même façon, on comparera la conclusion du roman dans l'édition de 1829 à la conclusion de 1845, précisément ajoutée par Balzac selon sa pratique de correction envisagée sur l'édition Fume.

L'exercice sera simple, puisqu'il n'y a pas ici réécriture -contrairement à ce que fit Balzac pour l'agonie de madame de Mortsauf dans Le Lys dans la vallée, gommant les blasphèmes sacrilèges pour plaire à un lectorat pudibond et édulcorant ainsi le sens de sa fiction 1 - mais addition : en 1829 le roman se termine sur les mots «loyaux ennemis» (p.

439) ; c'est valoriser ainsi la dimension romanesque, à valeur roman­ tique aussi, des personnages héroïques et admirables.

L'His­ toire est écrite par des figures d'exception qui ont des destins d'exception, et cette clausule rapide et engagée suggère la fin 1.

Cf Balzac, Le Lys dans la vallée, Le Livre de Poche n° 1467.. »

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