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ClD (le) de Pierre Corneille

Publié le 20/02/2019

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corneille
ClD (le), tragi-comédie de Pierre Corneille, créée par la troupe du Marais dans les premiers jours de 1637. Elle connut un succès sans précédent, et le cardinal de Richelieu et le roi s'en firent donner représentation dans leurs palais. Elle devint immédiatement un modèle pour la création théâtrale, fit de Corneille, déjà renommé, l'auteur le plus célèbre de son temps et lui valut d'être anobli. Le Cid est resté la pièce la plus connue du théâtre tragique français du xvnc s., voire du théâtre français tout court.
 
Le sujet est emprunté à la littérature espagnole, au Cantar de mio Cid (milieu du XIIe s.) et surtout à Las Mocedades del Cid (les Enfances du Cid, 1618) de Guillén de Castro. Situé dans l'Espagne de la Reconquête, il présente une action assez complexe. Rodrigue, fils de Don Diègue qui fut jadis le plus grand capitaine d'Espagne, aime Chimène, fille de Don Gormas, qui est alors chef des armées. Les deux pères sont en concurrence pour le poste de gouverneur de l'héritier du trône, et Don Gormas frappe son rival (acte I). Pour l'honneur de sa famille, Rodrigue est obligé de le tuer en duel, et Chimène à son tour d'en demander justice au roi (acte II). Les deux
 
amoureux ont une entrevue où ils s'avouent la pérennité de leurs sentiments ; mais une invasion des Maures menace (acte III). Rodrigue prend la tête de la défense et repousse l'assaut ; Chimène pourtant réclame toujours vengeance et exige un duel judiciaire (acte IV). Rodrigue remporte ce nouveau combat, et le roi lui laisse espérer de pouvoir un jour épouser Chimène (acte V). Au dilemme de Rodrigue (se venger, c'est perdre Chimène ; ne pas se venger, c'est perdre la gloire, et donc aussi perdre Chimène) répond le dilemme de Chimène (aimer, c'est s'oublier ; haïr, c’est oublier la gloire de Rodrigue, et donc mépriser toute gloire). Ces jeux de l'amour et de l'honneur (qui transposent étroitement les rapports établis dans le roman de chevalerie entre le « roi », le « héros » et la « princesse », comme l'a montré P. Bénichou dans ses Morales du Grand Siècle, 1948) venaient à point dans une France encore chevaleresque, où les métaphores amoureuses et guerrières s'entrecroisaient continuellement, dans les salons et à la cour, partagée elle-même entre l'insouciance et le carnage.
 
La querelle du « Cid ». Comprenant que les règles sont d'abord le résultat d'une démarche pragmatique pour un meilleur théâtre, débarrassé autant de la pédanterie que des invraisemblances, Corneille a entrepris de les utiliser pragmatiquement. Le genre de la tragi comédie permettait cette approche plus souple, mais qui reste pourtant plus près de la sévérité nouvelle que des libertés baroques. Rien n'y fit, pas même l'immense succès de la pièce. Ni l'amour, ni la gloire, omniprésents, ne firent oublier aux « doctes » les actions secondaires, les divers points où se passe l'action, et la nuit qui sépare le duel du dénouement. La querelle faite au Cid, c'est la lutte contre les demi-mesures aussi prudentes soient-elles. Scudéry fit valoir que le Cid ne respectait pas la Poétique d'Aristote et péchait à la fois contre la vraisemblance et la bienséance. Corneille répondit sur un ton méprisant. Scudéry demanda l'arbitrage de l’Académie française ; Corneille ne

corneille

« l'accepta qu'avec un déplaisir évident.

On discerne à ce moment chez Richelieu, qui saisit l'occasion pour I'Académje de s'affirmer dans son rôle de contrôle de la vie lit té rai re , un certain parti pris contre Corneille, peut-être d'ailleurs, a-t-on dit, plus politique que littéraire : la pièce peut être comprise comme une apologie du duel et a une tonali té trop es pa gn ole à un moment critiqu e de la guerre de Trente Ans ; en revanche, la peinture d'un héros prenant la téte de la noblesse pour servir son roi corres­ pondait parfaitement aux vu es du cardi­ nal.

La querelle s'e n ve nim ant, Richelieu demanda le silence aux adversaires et aux partisans de la pièce.

Les Sentiments de l'Académie, rédigés par Chapelain, ne parurent qu'e n 1638 : ils notent avec exactitude les désaccords entre la doc­ trine classique et la pièce de Corneille.

C'était la revanche de l'ordre sur le désordre, et la preuve qu'on voulait absolument, en haut lieu, éviter le retour du « bizarre >>.

On comprend les réti­ cences de Corneille pour admettre que seule une académie officielle puisse déci­ der où commence le « dé so rdr e >> et à partir de quand il peut être dit > : mais, touché par ces crit iq ue s, il parut renoncer un mome nt au théâtre, et tint compte, dès Horace, des remarques de ses détrac te urs .

Le Cid avait moins assuré le succès de la tragédie classique qu'il n'en avait un mom ent compromis l'avènement.. »

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