DOON DE MAYENCE (Geste de) : Fiche de lecture

DOON DE MAYENCE (Geste de). L’un des trois grands cycles de chansons de geste (avec le cycle du roi [voir Charlemagne] et le cycle de Guillaume d’Orange [voir Garin de monglane]). C’est de très loin le plus hétéroclite. La parenté entre les héros des chansons qui le composent est soit inexistante, soit artificielle et imaginée postérieurement aux versions primitives.

Deux sujets y sont abordés : la révolte du vassal contre un souverain tantôt abusif, tantôt impuissant, et la guerre féodale. Les œuvres les plus illustres en sont : Ogier le Danois, Girart de Roussillon, Raoul de Cambrai, Garin le Loherain, Renaud de Montauban, Gaidoti et l’une de nos plus anciennes chansons de geste, Gormont et Isembart (fin du XIe siècle). L’unité du cycle ne va guère au-delà de son caractère extrêmement sombre; les événements relatés couvrent toute la période carolingienne, de Charles Martel (Girart de Roussillon) à Louis IV d’Outremer (Raoul de Cambrai).

Si la geste du roi exalte généralement la gloire de Charlemagne, si celle de Guillaume d’Orange exalte celle du lignage qui soutient et fortifie, envers et contre tout, la jeune monarchie, celle de Doon de Mayence est d’une idéologie moins saisissable. Son ambiguïté rend même la critique intarissable. Première constatation : le roi, soit faible, soit tyrannique, est fréquemment à l’origine du conflit (les Lorrains ont une place à part : seuls deux lignages s’affrontent). Dans Girart de Roussillon, Charles Martel exige de Girart un échange de leurs fiancées et promet de transformer le fief de ce dernier en alleu (terre libre), puis cherche à revenir sur cette promesse : le baron se défend. Dans Ogierje Danois, Charlemagne protège injustement son fils coupable et néglige les intérêts supérieurs du pays. Dans Raoul de Cambrai, c’est encore une injustice royale qui déclenche une guerre féodale. Chacun ne songe plus qu’à ses propres intérêts; tout grand projet ou principe politique a disparu.