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INGÉNU (L’) de Voltaire (résumé & analyse)

Publié le 08/11/2018

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INGÉNU (L’) de Voltaire. Conte, 1767.

 

Ce «roman théologique» (Grimm), agencé comme un drame, met aux prises un homme de la nature avec la religion. C’est aussi un roman philosophique — un Huron découvre un univers inconnu dont il fait ressortir les ridicules et les tares — , un roman d’apprentissage — le contact brutal de la civilisation éduque un être naïf—, et un roman sensible — l’idylle malheureuse de deux cœurs tendres et faits l’un pour l’autre domine la seconde moitié du roman, qui se termine tragiquement. L’Ingénu, jeune Huron venu du Canada, débarque à Saint-Malo, y repousse par son intrépidité un débarquement anglais et conquiert le cœur de Mlle de Saint-Yves; mais sa rude franchise le fait remarquer: on lui interdit d’épouser celle qu’il aime et on l’enferme à la Bastille. La mort de sa fiancée, une héroïne aimante et vertueuse, qui voulait le faire libérer, le laissera désespéré.

L’Ingénu représente cet homme naturel dont Voltaire (1694-1778) se forge l’image dans sa retraite de Ferney, qu’il rencontre dans L’Homme sauvage de Sébastien Mercier, qu’il vient de mettre sur scène dans sa tragédie Les Scythes et qu’il définit dans son Homélie sur l'athéisme comme «ayant reçu de la nature un corps sain et robuste, un sens droit, un cœur honnête ». Ce schéma cher à Voltaire, influencé par les tableaux édifiants brossés par les missionnaires, n’est pas celui de Jean-Jacques Rousseau. Pour l’auteur du Mondain, le héros ne peut que perdre sa rudesse au contact de la culture.

Cet homme moderne — symbole de l’innocence persécutée — porte la marque des premières campagnes de Voltaire contre les erreurs judiciaires : le Traité sur la tolérance a quatre ans de moins, Lally-Tollendal vient d’être mis à la Bastille; plus probant encore paraît le rapprochement entre le héros et le chevalier de La Barre, dont le supplice bouleverse Voltaire. Enfin l’évolution du conte, qui s’achève comme un roman de Richardson, montre la sensibilité de l’écrivain aux nouvelles tendances du goût depuis la parution de Julie ou la Nouvelle Héloïse. Plus vraisemblable que Candide, L’Ingénu est le dernier de ces contes «d’expérience et de confidence » (Jacques Van den Heuvel) qui ont jalonné «l’itinéraire intérieur» de Voltaire depuis Zadig.

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