Jacques PRÉVERT : Paroles

« Jacques Prévert (1900 -1977), né à Neuilly-sur-Seine , enfant des rues qu'il a si bien su évoquer , connut la bohème parisienne et se fit de nom­ breux amis parmi les surréalistes.

Il n'adopta cependant pas leurs théories, trop rigides pour son tempérament épris de liberté , et, homme inclassable, il inventa une poé­ sie entièrement per­ sonnelle.

Le livre Des poèmes qui plaisent à tous C e recueil comporte 95 poèmes dans lesquel s Prévert a versé, avec un humour constant, parfois teinté de violen­ ce, le contenu de ses diverses passions.

Beaucoup de ces textes expriment des phobie s irr éductibles , parmi lesquelles revien­ nent sans cesse l'horreur et l'ab surdité de la guerre (Le Temps des noyaux, Familiale, Barbara), la mi sère et l'injustice socia­ le, et surtout le conformisme bourgeois avec son cortège de valeurs étriquées et périmées (Tentative de description d'un dîner de têtes ...

, Le Cancre, Pat er noster).

Prévert a l'art de dévoiler, dans les spectacles de la rue et les désordres de la soc iété, l'égoïsme des comportements et la lutte inégale des nantis et des deshérité s.

Mai s Prévert sait aussi chanter ce qu'il aime.

Ce pacifi ste est l'ami , le protecteur de l'enfance (Chasse à l'enfant), de l'amour libre poursuivi par la hargne des bien-pen sants, de la paix, de la joi e (Je suis comme je suis, Chanson du geô lier).

Cet anar­ chiste se fait le chantre de la liberté et de la fantaisie la plus débridée .

En art, son modèle est Picasso (Pour faire l e por ­ trait d'un oiseau, Promenade de Picasso).

Une poésie moins facile qu'il n'y paraît C es poème s, apparemment faciles et sans prétention, avaient toutes les qualités requises pour obtenir l'accueil enthousiaste d'un large public .

Les thème s contestataires et l'évocation d'un monde libéré de toutes contraintes sociales assuraient à Prévert l'adhésion d'une jeunesse qui reste encore so us son charme .

Son style simple, qu'il ne dédaigna it pas d'émailler d'expressions argotiques, paraît accessible à tou s.

Mais à y regarder de près , il faut une grande finesse et même quelque culture pour en apprécier tous les effets.

Certains poè­ me s assez longs, écrits comme des contes absurdes, exploitent une veine quasi surr éalis te à laquelle les enfants sont très sen­ sibles.

D'autres utili sent la technique décapante du jeu de mot s, voire du calembour, les effets de caricature, les simplifi­ cations significatives et toute s les ressources du rythme qu 'offre le vers libre.

Mais Prévert savait aussi s'abandonner aux délices du lyris me pour chanter la vie, l'amour , la liberté .... »