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JEAN-PAUL SARTRE : Huis clos (analyse littéraire et philosophique)

Publié le 22/02/2012

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La pièce évolue très efficacement par sa construction et un talent strictement et évidemment dramaturgique autour de l'idée capitale pour Sartre que nous n'existons qu'en fonction du regard qu'autrui porte sur nous. Mais les moyens qu'elle emploie sont justement dramaturgiques, et comme tels, Huis clos ne fait pas tant oeuvre de démonstration, que de présentation persuasive, et de telle sorte qu'elle peut très bien être vue aujourd'hui par des publics qui en retirent moins l'impression d'assister à une des pièces défendant et illustrant les thèses existentialistes, qu'a une pièce qui dénude la psychologie humaine.
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« Il était important de préciser tout cela avant de s'interroger sur la pièce de Sartre proprement dite.

Car, c'est unfait, la notoriété et même la mode de l'existentialisme ont été plus certainement assurées par les spectateurs deHuis clos et des Mouches, et les lecteurs de La Nausée, que par les lecteurs de L'Être et le Néant.

Et si ces œuvresont répandu quelque chose, il faudra se demander au juste quoi.

Est-ce une pensée, ou son spectacle ? Ou bienencore, est-ce un spectacle qui vaut en tout et pour tout pour ses qualités spécifiques, bien plus que commevéhicule d'une pensée philosophique ? Ce qui nous amène à la question essentielle : dans quelle mesure cescréations esthétiques (roman et théâtre) dérivent-elles d'un travail de recherche philosophique, et dans quellemesure y conduisent-elles ?Doit-on considérer qu'assister à Huis clos est une introduction scénique à l'approche de la réflexion sartrienne, ouune illustration scénique de la thèse ? Dans ce dernier cas, la pièce exigerait la lecture préalable de la thèse, et l'onpeut craindre de devoir passer par un mode d'emploi de ce qu'on va voir.

S'agissant de Huis clos, on peut êtrerassuré.

La pièce se défend toute seule.

Il faudra alors se demander si ce n'est pas par des qualités qui doivent plusau théâtre en lui-même qu'à la thèse que le théâtre est censé véhiculer. Résumé UNE PIÈCE FERMÉE SUR UNE PIÈCE FERMÉEHuis clos se déroule en cinq scènes, très inégales en longueur, les quatre premières ne servant qu'à amener les troispersonnages qui vont occuper, dans la scène cinquième et pour ainsi dire unique, la quasi-totalité du temps de lareprésentation. SCÈNE IUn homme, Garcin, est introduit dans un salon second Empire par un préposé, visiblement affecté à la tâche deguider les nouveaux venus.

Garcin se conduit comme s'il se savait condamné à quelque peine, assigné à résidence,et pose au garçon des questions de quelqu'un qui s'attend à être tourmenté et torturé physiquement.

On ledétrompe : il ne lui est réservé aucune des souffrances qu'il imaginait. SCÈNE IIGarcin, tout seul, appelle le garçon sans succès. SCÈNE IIIInès, une nouvelle venue dans le salon, adresse au garçon des questions et des remarques assez semblables àcelles de Garcin.

Manifestement, elle sait elle aussi être arrivée dans un endroit destiné, à ce qu'elle en pense ou cequ'on en dit, à la souffrance, au châtiment, à l'expiation.

On nous laisse deviner qu'elle est séparée d'une compagneà laquelle elle tient.

Les répliques qu'elle échange avec Garcin établissent un climat tendu, comparable à celui desinconnus en compagnie forcée, par exemple celle des détenus.

Mais de plus, tous deux font allusion à un certainétat antérieur au leur à présent, qui laisse comprendre qu'ils ont franchi une sorte de seuil irréversible. SCÈNE IVLe garçon introduit une nouvelle venue, Estelle, etannonce qu'il ne viendra plus personne.

On décide de faire connaissance, comme le font les gens polis et civilisésdans un salon. SCÈNE V, DERNIÈRE ET PRINCIPALEAu comportement singulier d'Estelle, qui semble contempler comme dans une sorte d'état de voyance une scène defunérailles, qui sont les siennes mêmes, puis aux répliques des trois personnages qui savent à l'évidence trèsclairement leur sort que nous ne faisons que découvrir, nous apprenons qu'ils sont ce que nous appelons morts, etqu'ils se trouvent dans ce que nous pensions, et eux aussi, devoir appeler l'enfer.Déconcertés de ne pas rencontrer un endroit ou une situation qui ressemble même de loin avec les représentationsqu'on en donne, surtout dans les religions, ils vont s'apercevoir successivement, non seulement que l'enfer est pired'être banal et ordinaire, mais encore qu'à l'inverse, c'est le plus ordinaire et continuel de cette vie, de la vie desvivants eux-mêmes qui peut non pas seulement représenter, mais encore constituer ce qui mérite le nom d'enfer.De cet enfer qui montre que tout l'« au-delà» imaginable est contenu pour l'homme dans l'ici-bas, on ne sortira pas.La confrontation forcée, permanente et inévitable, des trois personnages, qui va former toute la suite de la scèneet toute la pièce, nous montrera cependant pourquoi notre ici-bas mérite d'avoir le nom qu'on donne à la versionhorrible de l'au-delà : il est inévitablement insupportable.

Si on peut le dire « infernal », ce n'est pas parcomparaison avec l'enfer imaginaire des hommes de foi, mais par expérience directe de ce qui fait l'existencehumaine même, sans précédent et sans suite, sans rien d'autre que le présent et le souvenir qu'en donne lamémoire, et sans aucune suite dans aucun au-delà. Les trois personnages vont tout à la fois retracer leur vie, nous la faire découvrir, mais aussi la redécouvrir.

Et cela,non seulement en même temps que nous et avec nous, mais pour ainsi dire par nous, comme ils la redécouvrent aufil des répliques ou questions que les deux autres personnages leur posent : et ce, soit dans l'espoir de les aider,soit dans l'intention délibérée de les faire souffrir.. »

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