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Le Vieil Homme et la mer - Ernest Hemingway

Publié le 22/02/2012

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Roman paru en 1952; traduit de l'anglais par Jean Dutourd, Gallimard, Folio, 149 pages. L'AUTEUR Le 28 octobre 1954, le Prix Nobel fut décerné à l'écrivain «pour le style puissant et nouveau par lequel Ernest Hemingway avait maîtrisé l'art de la narration moderne comme venait de le prouver Le Vieil homme et la mer ». Ce livre mettait fin à quelques années de disgrâce auprès des critiques, d'abord enthousiastes dans les années 40, puis, semble-t-il, déçus, ou hostiles à sa popularité de « star de cinéma». Était-ce sa faute si on parlait moins de ses livres, alors, et plus de ses amours tumultueuses, ses pêches sportives, son goût pour l'alcool, son individualisme qui séduisait les uns, irritait les autres ? Il est né le 21 juillet 1899 à Oak Park (Illinois). Mère musicienne, père médecin, passionné de pêche et de chasse, qui se suicidera en 1928. Famille aisée et pieuse. Même s'il est peu assidu à l'école, celle-ci lui donne le goût de la lecture et du sport. Dès la fin de ses études, il se lance dans le journalisme au Kansas City Star.
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« Il s'agit plus d'une longue nouvelle que d'un bref roman.

Concentration sur un seul drame et, presque, unité detemps, de lieu, d'action.

Organisation très classique du récit : maturation sourde d'une crise (les quatre-vingt-quatre jours), crise (l'engagement du combat), dénouement.

Dans la nouvelle vraiment classique, toutefois, uneseconde crise marque le tournant décisif du récit.

Cette seconde crise n'est pas aisément repérable ici.Il importe de noter, aussi, une structuration en contrepoint : le cours des pensées du pêcheur interfère avec lasimple narration des épisodes de la lutte.

En particulier par des flash-backs (épisode fameux de la partie de bras defer où Santiago fut sacré champion, souvenir lié à la lutte contre l'espadon, menée elle aussi à la force du poignet),ou encore par des rêves (le rêve réitéré des lions). Enfin des repères temporels servent à situer avec précision les événements dans le temps.

La pêche commenceavant le jour (le vieux ne distingue les poissons volants qu'à leur sifflement).

Première journée jusqu'à l'auberenaissante.

Deuxième journée plus longue («Il faisait nuit», p.

87).

La troisième journée est celle de la capture del'espadon et de retour au port.

Le vieil homme rentre quand tout le monde dort.

Les « informants » qui, dans laterminologie de Roland Barthes, rendent réalistes le récit, ne manquent pas. Les significations Simple, donc, dans son organisation d'ensemble, le récit permet des lectures multiples, suivant le « principe del'iceberg » cher à Hemingway : le texte n'est que la partie émergée d'un ensemble plus vaste.Certains lui ont trouvé une signification chrétienne.

Plusieurs fois, d'ailleurs, le vieil homme prie ou invoque Dieu ouJésus.

Il y a plus important : ses mains blessées; ses évocations du Christ lorsqu'il rentre chez lui en chancelantsous le poids du mât, et en tombant à plusieurs reprises.

Symbolisme inconscient : dans ses pensées conscientes,cet individualiste agnostique que fut Hemingway était à mille lieux de Bernanos ou de Mauriac.

On est bien loin aussi,avec lui, du Moby Dick de Melville, malgré les points communs (acharnement du capitaine Achab à capturer labaleine blanche, comme de Santiago à vaincre l'espadon).

Cependant, Melville confère une signification religieuse aucomportement d'Achab : il s'identifie de façon satanique à Dieu, et paiera de sa mort une telle transgression.

Laseule religion de Hemingway est celle de l'individu humain : il exalte son courage, sa possibilité de dire non au destin.D'autres ont proposé une psychanalyse du récit.

Les relations de Santiago avec Manolin montreraient qu'il arégressé au stade de latence (onze à douze ans).

Une régression semblable chez le lecteur permet l'empathie decelui-ci.

Santiago ne doit pas triompher : sinon, il rendrait le père jaloux.Le redoutable requin, le Mako dentuso, ne serait-il pas, lui, la mère castratrice? Seul son âge permet à Santiagod'affronter cet adversaire sans crainte.

Plus convaincant semble le rapprochement fait parfois entre Santiago et untype d'êtres appelés par Freud « ceux qui échouent devant le succès» (Santiago ne cesse de douter de sa réussite,de voir même parfois en elle une hallucination).Mais la mise en question, chez le vieil homme, de sa prouesse, est plus profonde et autorise une autre interprétationplus « écologique » : il se reproche d'avoir « péché », s'interroge sur sa faute.

Il affirme son respect de sonadversaire (le poisson est un ami, un frère).

On dirait qu'il a conscience de l'identité de tous les vivants, de façonquasi bouddhiste.

Pour se rassurer sur son acharnement à tuer, Santiago le rapproche d'une simple prouessesportive (d'où l'évocation constante, chez lui, du champion de base-ball, Di Maggio).

Que symbolisent, d'ailleurs, surce plan, les lions dont il rêve : la pureté impossible, l'absolu inaccessible à l'artiste (ils jouent sur des plagesblanches ou dorées).

On en est réduit, sur ce plan aussi, aux questions.Le mouvement circulaire du récit (retour au port, mais aussi, au début et à la fin, la merveilleuse amitié entre legosse et le vieux) suggère une dernière interprétation.

Jusqu'ici Hemingway n'avait qu'une religion, celle de l'Individu.Même ses engagements politiques étaient ceux d'un aventurier plus que d'un militant (pour reprendre une distinctionde Roger Stéphane, distinction faite à propos de Malraux).

La Cause importait moins que le Moi.

Cet égotismes'élargit ici aux dimensions d'une fraternité cosmique.

Avec les animaux : «nous deux le poisson on navigue enfrères», au point que « ça m'est égal lequel de nous deux tue l'autre».

Avec l'océan : quelques pêcheurs en parlentau masculin, disent el mar, en font un adversaire, mais pour le vieux l'océan c'était toujours la mar, quelque chosequi dispense ou refuse de grandes faveurs, une mère.

La grande leçon, qu'il découvre et qu'il regrette de ne pouvoirfaire partager à Manolin, c'est que nul n'est jamais seul en mer.. »

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