Les Guêpes d'ARISTOPHANE
Publié le 28/03/2013
Extrait du document

Cette comédie s'inscrit dans la vaste campagne qu 'Aristophane entreprit de mener contre la pourriture du régime politique de l'époque. «Il faut, disait-il, soumettre Athènes à un lavage de cerveau pour la guérir de Cléon. « Un démagogue, dans !'Antiquité grecque, était un chef du parti populaire; ce n'est que plus tard que le terme prit le sens péjoratif qu'on lui connaît.

«
« C'est cela que tu vas
chanter ? Tu périras
sous les huées .•.
,.
EXTRAITS ----- --~
Philocléon est fier de sa fonction
de juge, qui lui
confère, croit-il,
une autorité absolue
sur le peuple
d'Athènes
PHILOCLÉON.
- Eh bien, dès le début et
l'entrée en carrière, je prouverai que ce
commandement, le nôtre, ne le cède à
aucune royauté.
Quel bonheur y a-t-il,
quelle félicité plus
grande maintenant
que celle
d'un di
caste?
Quelle existence
plus délicieuse, quel
être
plus redouté,
en dépit de la
vieillesse ? ( ...
)
Puis, entré au
tribu
nal, après qu'on
m'a bien supplié et
qu'on a effacé ma
colère, une fois à
l'intérieur, de toutes mes promesses
je n'en
tiens aucune, mais j'écoute les accusés
em
ployer tous les tons pour obtenir l'acquitte
ment.
Car, voyons, quelle flatterie un dicaste
n'est-il pas dans le cas d'attendre ? Les uns
déplorent leur pauvreté et y ajoutent ; les
autres nous content des fables, d'autres,
quelque facétie d'Ésope; tel autre plaisante
pour me faire rire et déposer ma colère.
Si
rien de tout cela ne nous touche, aussitôt il
fait monter ses marmots, filles et garçons,
les traînant
par la main ; et moi j'écoute ;
et eux, baissant la tête ensemble, poussent
des bêlements.
( ...
)
Et nous alors en sa faveur
nous relâchons un peu
la cheville de
notre colère.
N'est-ce pas là un grand
pou
voir et la dérision de la richesse ?
Bdélycléon essaye de faire comprendre
à son père qu'il est
le jouet
des démagogues
BDÉLYCLÉON.
- N'est-ce donc pas un grand
esclavage à voir tous ces gens-là investis de
magistratures, eux et leurs flatteurs
sala
riés ? Toi, pourvu qu'on te donne les trois
oboles, tu es content; ces oboles que
mate
lot, fantassin, soldat assiégeant, tu gagnas
au prix de tant de peines.
Et
par là-dessus
tu marches au commandement
et c'est ce
qui me suffoque, lorsque entrant chez
toi, un
blanc-bec débauché, le fils Chéréas, mar
chant comme ceci, les jambes écartées, le
corps dandinant et l'air efféminé, t'enjoint
d'aller juger dès le matin et à l'heure fixée :
« car quiconque de vous arrivera après le
signal ne touchera pas
la triobole ».
Mais
lui, il reçoit, comme synégore, un drachme,
même
s'il arrive en retard; il prend pour
compère un de ses collègues, et si un accusé
fait un présent, ils
arrangent l'affaire à eux
deux en un
tour de main, comme deux
scieurs de long dont l'un tire et l'autre prend
la pareille ; et toi tu bâilles après le
cola
crète sans t'apercevoir du manège.
PHILOCLÉON.
-C'est ainsi qu'ils me traitent ?
Ah que dis-tu ? Comme tu remues le fond de
mon être et entraînes mon esprit de plus en
plus
! Je ne sais pas ce que tu me fais.
Traduction de H.
Van Daele,
Les Belles-Lettres, 1938 Peinture murale :
feston avec masques
de théâtre
NOTES DE L'ÉDITEUR
« Racine a imité les Guêpes dans ses
Plaideurs.
( ...
)La comédie d' Aristophane
est une satire politique où il critique une
institution
d'État; celle de Racine, une
satire sociale où il raille la chicane de son
temps ; aux mœurs
d'un peuple entier de
juges, à la pratique collective, le poète
français a substitué deux manies
individuelles : juger et plaider.
»
Écrite en 422 avant J.-C., la comédie des
Guêpes est parfois traduite dans un style
populaire, allant parfois
jusqu'à la
grossièreté, plus proche de
ce que devait
être la langue
d' Aristophane.
Ainsi, certains
auteurs ont traduit Philocléon par
Chéricléon et Bdélycléon par Vomicléon.
Cela dit, il est bien difficile de s'imaginer
comment une telle comédie pouvait être
jouée, puisqu'elle était accompagnée de
musique et de chants, et qu'elle était donnée
en partie dans une sorte de récitatif soutenu
par
un instrument de musique.
« En faisant remplir par ses héros leurs
fonctions officielles dans le privé, il
[Aristophane,
ndlr] avoue son peu de
confiance dans la vie publique et sa tristesse
devant la faillite de la vie sociale.
Si nous
ne nous corrigeons pas, semble-t-il dire à
ses compatriotes, il
n'y a qu'un salut:
revenir à la vie primitive, que chacun fasse
chez lui ce
qu'il lui plaît et que nous soyons
tous contents.
» A.
Solomos, Aristophane
vivant,
Éditions Hachette, 1972.
H.
Van Daele, préface aux Guêpes,
Les Belles-Lettres, 1938.
1 Musée du Louvre I Alinari-Viollet 2, 3, 4 Naples, Musée archéologique/ Giraudon ARISTOPHANE 03.
»
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