Les Plaideurs de Racine
Publié le 10/04/2013
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A l'époque de Racine, la première représentation des Plaideurs a été assez mal accueillie du public. Ce n'est que lorsque la pièce fut jouée devant le roi et que celui-ci laissa échapper son rire qu'elle remporta l'estime des spectateurs. Dans sa préface, Racine déclare avoir emprunté à Aristophane et à sa pièce Les Guêpes le sujet des Plaideurs. Il en reprend la scène du procès du chien, et à ce sujet Racine considère que son devancier a eu «raison de pousser les choses au-delà du vraisemblable«.
«
.-----------EXTRAITS
« LÉANDRE.
- Vous montrez cependant / Pour tous les gens
de robe un mépris
évident.»
Le procès du chien Citron commence.
Petit-Jean
se lance dans l'accusation
DANDIN.
- Couvrez-vous, vous dis-je.
Léandre cherche à convaincre son père qu'il juge
beaucoup trop.
Sans succès
LÉANDRE.
-Mais où dormirez-vous, mon père?
DANDIN.
-Al' audience.
LÉANDRE.
-Non, mon père : il vaut mieux que vous ne sortiez pas.
Dormez chez vous.
Chez vous faites tous vos repas.
Souffrez que la raison enfin vous persuade ;
Et pour votre santé ...
DANDIN.
- Je veux être malade.
LÉANDRE.
- Vous ne l'êtes que trop.
Donnez-vous du repos;
Vous n'avez tantôt plus que la peau sur les os.
DANDIN.
- Du repos ? Ah! sur toi tu veux régler ton père.
Crois-tu qu'un juge n'ait
qu'à faire bonne chère,
Qu'à battre le pavé comme un tas de galants,
Courir le bal
la nuit, et le jour les brelans ?
L'argent ne nous vient pas si vite
quel' on pense.
Chacun de tes rubans me coûte une sentence.
PETIT-JEAN.
-Oh! Monsieur,je sais bien à quoi l'honneur m'oblige.
DANDIN.
-Ne te couvre donc pas.
PETIT-JEAN se couvrant.
-Messieurs ...
Vous, doucement;
Ce que
je sais le mieux, c'est mon commencement.
Messieurs, quand
je regarde avec exactitude.
L'inconstance du monde et sa vicissitude ;
Lorsque
je vois, parmi tant d'hommes différents,
Pas une étoile fixe, et tant d'astres errants ;
Quand
je vois les Césars, quand je vois leur fortune;
Quand je vois les États des Babiboniens
Transférés des Serpans aux Nacédoniens;
Quand
je vois les Lorrains, de l'état dépotique,
Passer au démocrite, et puis au monarchique;
Quand
je vois le Japon ...
L'INTIMITÉ.
- Quand aura-t-il tout vu ?
« Nous sommes
orphelins ; rendez nous notre père.
»
PETIT-JEAN.
-Oh! Pourquoi celui-là m'a-t-il interrompu ?
Je ne dirai plus rien.
LÉANDRE.
-Achève, Petit-Jean : c'est fort bien débuté.
Mais que font là tes bras pendants à ton côté ?
DANDIN.
-Avocat incommode,
Que ne lui laissez-vous finir sa
période?
Te voilé sur tes pieds droit comme une statue.
Dégourdis-toi.
Courage! Allons, qu'on s'évertue.
PETIT-JEAN, remuant les bras.
- Quand ...
je vois ...
Quand ...
je vois ...
Je
suais sang et eau, pour voir si du Japon
Il viendrait à bon port au fait de son chapon,
Et vous l'interrompez
par un discours frivole.
Parlez donc, avocat.
PETIT-JEAN.
-J'ai perdu la parole.
LÉANDRE.
-Dis donc ce que tu vois.
PETIT-JEAN.
- Oh dame! on ne court pas deux
lièvres à la fois.
/
OTES DE L'EDITEUR
« On discerne dans la pièce quatre intrigues :
la folie de Dandin, le mariage de Léandre et
Isabelle, la dispute de Chicanneau et de
la
Comtesse, et le procès du chien Citron.
La
folie de Dandin constitue évidemment
l'action principale ; la dispute de
Chicanneau et de la Comtesse y est liée,
puisque ces deux plaideurs veulent se faire
juger par Dandin ; mais l'intérêt de cette intrigue
secondaire est épuisé
à la fin de
l'acte II, après une discussion amusante et
mouvementée, qui d'ailleurs n'aboutit
à
rien, puisqu'on ne sait ce que devient
ensuite la Comtesse.
C'est pourquoi Racine
lui substitue l'intrigue du chien Citron,
annoncée
à la dernière scène de cet acte II.
Quant à l'intrigue amoureuse, elle pourrait
se terminer
à la scène 6 de l'acte II, qui
montre la signature du contrat de mariage
de Léandre et d'Isabelle.
Il y a donc de
1 déta il du portrait de Racine par Riga ud / ERL / Sipa Icono 2, 3, 4 grav.
sur bois de G.
Leroux , La Belle Edition, Paris
nombreuses fautes contre les règles de
l'unité d'action, dont pourtant Racine
avait montré par
Andromaque qu'il les
connaissait aussi bien que personne.
Mais
il
n'y en a pas contre l'unité d'intérêt, car
ces intrigues mal liées et mal conduites
servent toutes
à montrer la folie du juge
Dandin.» Jacques Scherer, La Dramaturgie
Classique en France,
Paris, Librairie Nizet,
1986.
RACINE 07.
»
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