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POLYEUCTE. « Tragédie chrétienne » en cinq actes et en vers de Pierre Corneille (résumé de l'oeuvre & analyse détaillée)

Publié le 07/11/2018

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corneille

POLYEUCTE. « Tragédie chrétienne » en cinq actes et en vers de Pierre Corneille (1606-1684), créée à Paris par la troupe du Marais sans doute au début de 1643, et publiée à Paris chez Som-maville et Courbé la même année.

 

Corneille écrivit sa première tragédie religieuse (il donnera par la suite Théodore en 1646) à une époque où le genre connaissait un réel développement et suscitait des polémiques, en particulier

 

sur les libertés qu'un dramaturge peut ou non prendre lorsqu'il s'inspire de la Bible ou d'un récit hagiographique : Corneille, lui, s'octroie une certaine latitude dans le maniement de multiples sources. L'aspect religieux de la pièce provoqua d'ailleurs des critiques, et ce sont les amours de Pauline et de Sévère qui firent surtout son succès, au point que l'on préféra longtemps s'en tenir à une lecture déformée de la tragédie. De fait, il faut voir dans Polyeucte une œuvre issue du climat de la Contre-Réforme, l'œuvre d'un ancien élève des jésuites, qui vise à concilier humanisme et christianisme. La tragédie elle-même, qui a soulevé force discussions (sur la nature des sentiments de Pauline et sur l'orthodoxie de Po-lyeucte en particulier), peut se lire dans la continuité des trois grandes pièces précédentes, le *Cid, *Horace et *Cinna, ce qui ne fait que renforcer son ambiguïté : aboutissement ou rupture ?

 

Pauline, fille de Félix, sénateur romain et gou verneur d'Arménie, vient d'épouser Polyeucte, un grand seigneur arménien : son père, qui l'a autrefois obligée à renoncer à Sévère, un Romain trop obscur, le lui a ordonné, et l'amour est né peu à peu. Elle a vu en songe la mort de son époux et elle le presse de rester dans le palais. En vain : Néarque, un chrétien, pousse Polyeucte à ne pas retarder le baptême auquel il aspire secrètement ; Polyeucte le suit Félix apprend alors à sa fille l'arrivée de Sévère : longtemps passé pour mort, il est devenu le favori de l'empereur Décie ; Félix craint qu'il ne vienne pour Pauline et redoute sa colère. Il presse sa fille de l'apaiser (Acte 1). Elle demande à Sévère de renoncer à la voir. Polyeucte, qui a embrassé la foi chrétienne, doit se rendre au temple pour en briser les idoles au cours d'un sacrifice. Néar que lui reproche d'aller à la mort délibérément mais Polyeucte le convainc : en dépit de sa peur, Néarque marche au martyre avec lui (Acte 11). Pauline s'inquiète pour Polyeucte : elle craint la jalousie de Sévère. On lui annonce alors que son époux a renversé les idoles ; elle réaffirme son amour. Félix fait exécuter Néarque sous les yeux de Polyeucte, espérant de celui ci une abjuration qui ne viendra pas. Pauline plaide pour son époux ; Félix va lui parler (Acte Ill). Inutile démar che : Polyeucte l'a repoussé et mande Sévère. Seul, il fortifie son cœur avant l'arrivée de Pauline. Face à elle, il réaffirme sa foi ; elle lui reproche de l'abandonner. Il la « donne » alors à Sévère. Pauline refuse et prie Sévère d'intercéder auprès de Félix en faveur de Polyeucte. Sévère, qui admire les chrétiens et ne croit pas aux dieux romains, accepte : il montrera ainsi sa générosité (Acte IV). Mais Félix ne voit dans ses propos qu'un piège pour se venger de lui et redoute l'empereur. Il fait croire à Polyeucte qu'il aspire lui aussi au christianisme et l'incite à vivre pour lui montrer la voie ; Polyeucte comprend son jeu, le repousse, puis invite une nouvelle fois Pauline à épouser Sévère ; elle préfère mourir. Félix envoie Polyeucte à la mort. Pauline, qui a été aspergée du sang de son époux. s'est convertie et requiert le supplice. Sévère reproche à Félix de l'avoir cru fourbe et promet de le perdre. À son tour Félix annonce qu'il s'est lui aussi converti et s'offre au martyre. Sévère décide que les chrétiens ne seront plus poursuivis ; il plaidera leur cause auprès de l'empereur et confirme Félix dans son poste de gouverneur (Acte V).

 

«Je n'ai point fait de pièce où l'ordre du théâtre soit plus beau et l'enchaînement des scènes mieux ménagé » ( \"Examen\" de 1660) : d'un point de vue dramaturgique, Polyeucte est un accomplissement. Corneille y atteint une pleine maîtrise, notamment dans l'utilisation des entractes pour faire rebondir l'action et plus encore dans la construction des actes : au monologue de Pauline (III, 1) répond celui de Poly-eucte (IV, 2), les rencontres entre les époux (1, 2; Il, 4; IV, 3 ; V, 3), entre Pauline et Sévère (Il, 2; IV, 5), entre Polyeucte et Sévère en présence de Pauline (IV, 4) ponctuent la pièce autour de l'acte III, celui du récit du renversement des idoles et des premières réactions de Pauline et surtout de Félix. Cette construction rigoureuse va de pair avec le développement conjoint de deux passions, l'« amour humain » et l'aspiration au martyre, qui explique un certain mélange des genres (galan

corneille

« qui ne viendr a pas.

Pauline plaide pour son époux ; Félix va lui parler (Acte Ill).

Inuti le dém ar che : Polyeucte l'a repoussé et mande Sévère.

Seul, il fo rtifie son cœur avant l'arrivée de Pauline.

Face à elle, il réaffirme sa foi ; elle lui reproche de l'abandonn er.

Il la « donne » alors à Sévère.

Pa uline refuse et prie Sévère d'intercé der aupr ès de Félix en faveur de Polyeuc te.

Sévère, qui adm ire les chrétiens et ne croit pas aux dieux ro mai ns, accepte : il montrera ainsi sa génér osité (Acte IV).

Mais Félix ne voit dans ses propos qu 'un piège pour se venger de lui et redoute l'empereur .

Il fait croir e à Polyeucte qu'il aspire lui aussi au christ ianisme et l'inc ite à vivre pour lui mon trer la vo ie ; Poly eucte comprend son jeu, le repousse, puis invite une nouvelle fois Pa uline à épouser Sévère ; elle préfère mourir.

Félix envoie Polyeucte à la mo rt.

Pauline, qui a été aspergée du sang de son épou x.

s'est convertie et req uiert le suppl ice.

Sévère reproche à Félix de l'avoir cru fo urbe et promet de le perdre.

À son tour Félix anno nce qu'il s'est lui aussi converti et s'off re au mart yre.

Sévère décide que les chréti ens ne seront plus pour suivis ; il plaider a leur cause auprès de l'empereur et confirme Félix dans son poste de gouv erneur (Acte V).

«J e n'ai point fait de pièce où l'ordre du thé âtre soit plus beau et l'encha îne­ ment des scènes mieux ménagé » ( « Examen >> de 1660) : d'un point de vue dram aturgique, Polyeucte est un accomplissement.

Corneille y atteint une pleine maîtrise, notamment dans l' utilisation des entractes pour faire rebondir l'action et plus encore dans la con struction des actes : au monol ogue de Pauline (III, 1) répond celui de Poly­ eucte (IV, 2), les rencontres entre les épou x (1, 2; Il, 4; IV, 3 ; V, 3), entre Pauline et Sévère (Il, 2; IV, 5), entre Polyeucte et Sévère en présence de Pau­ line (IV, 4) ponctuent la pièce autour de l'acte III, celui du récit du renverse­ ment des idoles et des premières réac­ tions de Pauline et surtout de Félix.

Cette construction rigoureuse va de pair avec le développement conjoint de deux passions, l'« amour humain » et l'aspiration au martyre, qui explique un certain mélange des genres (galan- teries de Sévère, protestati ons d'amour de Pauline à Polyeucte, lyrisme de la foi) .

Double orientation qui s'incarne pl einement en Polyeucte, dont tout le problème consiste à résoudre le conflit qui naît entre ces deux désirs.

« Les tendre sses de l'amour humain y font un si agréable mélange avec la fermeté du divin que [la] représentation [de la piè ce] a satisfait tout ensemble les dévots et les gens du monde » ( « Exa­ men ») : l' « agréable mélange >>, moins apprécié que Corneille le dit (il s'a vance beaucoup sur le jugement des « dévots »), est une formule trompeuse.

Elle autorise indirectement une lecture qui dénature la tragédie en la réduisant à l'un de ses éléments -sa part pure­ ment humaine sous l'aspec t de l' amour -alors même que tout dit la liaison intime des deux perspective s.

Félix occupe le centre du dispo sitif (l'a cte III, après le monolog ue de Pau­ line et le récit du renversement des ido­ les au temple, est le sien) ; c'est le seul personnage qui soit en marge parce qu'il rompt le noble climat instauré par les autres protagonistes -mais son nom engage à ne pas croire qu'il soit condamné au mauvais rôle.

Incarna­ tion d'un pouvoir politique qu'il n' exerce que par délégation (et dans la crainte perpétuelle de l'empereur ou de son envoyé, Sévère), il est à la fois l'être le plus faible d'un point de vue éthi­ que, et celui qui gouverne.

Par contraste, il fait valoir la grandeur des autres personnages : lui seul s'abaisse à raisonner en terme de basse politique (il envisage même un moment, à la scène 5 de l'acte III, l'avantage qu'il y aurait pour lui à remarier sa fille au favori de l'empereur, mais repousse bientôt cette tentation) et d'intérêt person nel.

Opposé par sa fonction même à son gendre, qu'il essaie pour­ tant de sauver, il l'e st aussi politique­ ment à Sévère qui, lui, incarne une. »

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