Sa majesté des mouches
Publié le 30/03/2013
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The Coral Island, roman d' aventures paru au siècle dernier, relatait la réussite de jeunes naufragés rétablissant une société idéale au sein d'une île merveilleuse. Tableau utopique dont Golding s' inspira pour nous livrer, avec Sa Majesté des mouches, une version totalement opposée, un « développement négatif «. Le succès de Lord of the Flies ( 1954) continue d'occulter le reste de l'oeuvre de Golding (né en 1911 ). Fasciné par le comportement humain dans des situations extrêmes, !'écrivain en poursuivit l'exploration dans ses romans suivants: Les Héritiers (1955), Chris Martin (1956), Chute libre (1959). William Golding fut couronné du prix Nobel de littérature en 1983.
«
« Les garço ns dansaient
a utour du feu.
»
EXT R AITS~~~~~~~~
Dè s leur arri vée, les enfant s prennent
possession de leur nouveau territoire
-Dites donc, les gars, on est chez nous!
L'île avait à peu près la forme d'un bateau ;
ramassée sur elle-même du côté où ils se te
naient, elle dévalait derrière eux vers la côte
dans le désordre de ses roches.
Des deux
côtés, des rochers, des falaises, des sommets
d'arbres et des pentes raides ; devant eux,
sur toute la longueur du bateau , une des
cente plus douce, boisée, tachée de rose; en
bas, la jungle plate, d'un vert dense, mais
s'étirant
à l'autre bout en une traînée rose.
L'entretien du
feu, seul moyen
d'attirer
l'attention, est
une entreprise
primordiale
Les garçons dan
saient autour du
feu.
Le bois, sec
comme de l' ama
dou , s' abandon
nait par branches
entières aux flam
mes
jaunes qui
bondissaient et secouaient leur chevelure
à
cinq mètres du sol.
Dans un vaste rayon au
tour du bûcher , la chaleur vous frappait
comme un poing et
la brise était devenue un
torrent d'étincelles.
Les troncs s'effritaient
en poussière blanche.
La rivalité des deux chefs va faire
plusieurs victimes innocentes, dont
Piggy,
« l'intellectuel » mal-aimé
La roche frappa Piggy de plein fouet, du
menton aux genoux ; la conque explosa de
mille morceaux et disparut.
Sans avoir le
temps de pousser
le moindre soupir, Piggy
fut projeté de côté dans
le vide et se retourna
dans sa chute .
(.
..
) Piggy s'écrasa sur le dos,
quinze mètres plus bas, sur une dalle ro- cheuse
entourée d'eau.
Sa tête se fendit et il
en sortit une matière qui rougit aussitôt .
Ses
membres eurent un soubresaut, comme les
pattes d'un cochon égorgé.
La violence, poussée à son paroxysme,
prend heureusement fin avec l'arrivée
des secours
Pour la première fois depuis leur arrivée
dans l'île, il s'abandon nait au chagrin et
des spasmes déchirants le secouaient des
pieds
à l a tête.
Il exhalait son désarroi sous
l a nappe de fumée noire qui recouvrai t
les
ruines fumantes
del' île.
Pri s de contagion,
l e s autres petits garçons commencère nt
à
trembler et à sanglote r.
Au milieu d'eux,
c ouve rt de crasse, la cheve lure emmê lée et
l e nez sal
e, Ralph pleurait sur la fin de l' in
nocence,
la noirceur du cœur humain et la
c hute dans l'espace de cet ami fidèle et avisé
qu 'on appe lait Piggy.
Enveloppé de ces bruits de sanglots, l' offi
cier se sentait ému et un
peu gêné .
Il se
détourna pour donner aux enfants le temps
de se ressaisir et attendit, le regard fixé sur
l e cuirassé aux lignes sobres , immobile au
l o
in.
Traduit de l'an g lai s
par Lola Tranec-Dubled,
Gallimard, 1982
« Enveloppé de
ces bruits de sanglot s, l'officier se sentait ému
et un peu gêné.
»
NOTES DE L'ÉDITEUR
« Golding est un moraliste qui a entretenu
un long
commerce avec les œuvres des
sciences sociales.
Il
en a tiré la certitude du
caractère neutr e o u indifférent des
civilisatio ns
et des socié t és ; nul système
n'est la cau se des maux dont souffre
l'homme, si n on la nature humaine
elle-même ." L'ennemi n'est pas au-dehors,
mais en dedans.
" Dans la notice où il se
présente
par rapport à son ou vrage, ses affirmations
sont sans
équivo qu e : " La
responsabilité du désord re dont so uffre le
monde actue llement n'incombe ni à une
classe ni à une nation ni à un systè me.
Ce désordre n'est que la reprod uction -sur
une plus grande échelle -- des réactions
enfanti n
es quand on lais se à cell es-ci pleine
lib
ert é de s'exprimer, dans les jeux par
exemp le .
" Golding poursuit une sorte de
psychanalyse de
l'espèce ; il est lan cé dan s
l a plus
am biti eu se des exploratio ns, vo ul ant
attei ndre les " é léments de base ", les
" compo santes " d e la nature hum ai ne .
Son livre apparaît comme le fruit d'un e
expérie n
ce proche de la démarche
ethnographique .
Mais il
est davantage :
un excelle nt roman (ma lg ré ses d éfa uts
1 Ga mma 2, 3, 4, 5 dess ins de M ary Fleene r, Tagesanzeige r Magazin, n ° 54 , 1992
du point de v ue de la technique du roman),
où Je lecte
ur se trouve pris au piège, puis
fasci né .» Georges Balandier , «L'Homme
et ses coordo nnées », Cahiers du Sud
n° 343, 1958.
GOLDING02.
»
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