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VICTOR HUGO LES CONTEMPLATIONS (analyse détaillée)

Publié le 19/10/2018

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hugo

Les intentions de Victor Hugo, — Si l'on en croit le poète, les Contemplations seraient « les Mémoires d’une âme », l’histoire de sa vie intérieure, d'abord de 1830 à 1843, la vie d’Autrefois jusqu'à la mort de sa fille ; de 1843 à 1853 ensuite. Aujourd'hui. Mais l’examen des dates du manuscrit ne confirme guère ces déclarations : elles ne concordent pas avec les dates de l'édition imprimée. Ce n’est pas un mensonge prémédité, puisque le poète a demandé par testament que le manuscrit fût déposé à la Bibliothèque nationale. Mais cette « histoire d’une âme » a été calculée et ordonnée après coup. Tandis que dans l’édition la moitié du recueil porte une date antérieure à la mort de la fille du poète, dans la réalité du manuscrit un cinquième seulement des pièces a été composé avant 1843 ; les trois cinquièmes de [‘ouvrage ont été rédigés en dix-neuf mois, en 1854 et 1855. Le recueil est donc surtout l’état de l’âme de Victor Hugo vers 1855. Il est tout au Plus l'histoire de son imagination, et c’est cette histoire qu’il faut suivre.

 

Les poèmes d’amour. — Ils sont nombreux dans Autrefois et ils se ressemblent. Ils sont aimables, ils sont tendres, ils sont merveilleusement harmonieux et pittoresques. Ils ne sont jamais ni très émouvants ni très profonds. L’amour chez Victor Hugo, si sincère qu’il fût, n’était jamais d’une très noble qualité. Car il a juxtaposé, dans le même volume, les pièces écrites pour trois femmes au moins: pour sa femme, pour Mme Biard, pour Juliette Drouet, et quelques autres peut-être, Le lecteur qui ne s'informe pas des travaux érudits peut s'y méprendre ; mais chanter trois femmes comme si elles n'étaient qu'une, c'est ne pas faire entre les femmes de différences essentielles, c'est aimer d'amours médiocres. Il y a d’ailleurs autre chose dans les Contemplations que l'amour ; il y a le plaisir, une sorte de joie naïve et païenne d'aimer, au sens vulgaire du mot. On peut ne pas la reprocher à Victor Hugo ; il a pris soin lui-meme de se justifier contre les « tartuffes » ; mais elle n'est que l'ardeur de vivre et non pas un idéal. Il y a mis avec une allégresse épicurienne quelques lourdeurs parfois et quelques galanteries médiocres. Il n'est le vrai poète d’aucun véritable amour.

Il y a reflété, avec une sincérité profonde, sa stupeur, sa révolte, les souvenirs à la fois délicieux et torturants, puis le lent abandon à la volonté de Dieu, les rechutes du désespoir, l’apaisement mélancolique qui vient du temps et des suggestions de la nature. De sa fille, de ses grâces d'enfant, de ses jeux aimables, de ses tendresses naïves, il a tracé avec une sorte d'ingénuité pathétique des images à la fois si simples et si profondes qu’elles sont comme une résurrection. Et tout le drame de son deuil se déroule avec un accent à la fois si humble et si poignant qu'on oublie l'art, le poète, les mots presque et les images pour se sentir en présence de la douleur nue. Il n'y a pas de plus beau poème d'amour et de deuil paternels.

Victor Hugo n’a été qu’un poète, ou un conducteur d’hommes. Il enseignait la concorde, la justice, les vertus ; il ne cherchait pas les secrets profonds de la création. La mort de sa fille, l’exil, la solitude l’ont mis en présence du mystère et de l’infini ; et les pièces composées à partir de 1854 vont les sonder et les expliquer.

 

Il n’a d’ailleurs fait que suivre une tradition contemporaine. A côté de la littérature réaliste née avec Balzac et Stendhal, se développe toute une littérature métaphysique. La poésie et la philosophie collaborent dans une multitude de cosmogonies, de vagues épopées de la création, qui chantent les destinées des âmes et des mondes. Déjà Lamartine, dans ses Harmonies, avait ébauché une métaphysique comme Vigny dans Eloa. Pierre Leroux écrit la sienne dans l'Humanité (1840). Victor Hugo retrouve Leroux comme compagnon d’exil. Ils devisent sur le rivage, face à l’infini, de l’infini. Ils remuent ces vastes idées que Victor Hugo rencontrait déjà dans le système de Fourier, dans la Création de Boucher de Perthes (1834-1841), dans le Terre et Ciel de Jean Reynaud (1854), sans parler de doctrines ou de livres que Victor Hugo avait effleurés ou lus, Pythagore, l'Apocalypse, etc... 

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