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De Gaulle et le pouvoir

Publié le 17/01/2022

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Parce qu'il est, en dépit de tout, imprégné d'histoire militaire et de souvenirs où les héros comptent plus que les juristes; parce qu'il est nourri d'une littérature politique qui, de Chateaubriand à Barrés, ne s'est jamais embarrassée de l'équilibre des pouvoirs; parce que l'autorité suprême lui est échue par une série d'événements plus ou moins fabuleux où le droit n'a joué que le rôle d'un témoin discret; parce qu'il est un tempérament d'une vigueur et d'une audace singulières, et parce que s'il pratique la consultation, il supporte mal la contradiction, de Gaulle est, dans le plein sens du terme, un chef monarchique.

« Ministre, qui le nomme ainsi que les autres membres du Gouvernement, qui a la faculté de le changer, soit parce que se trouve accomplie la tâche qu'il lui destinait et qu'il veuille s'en faire une réserve en vue d'une phaseultérieure, soit parce qu'il ne l'approuverait plus; le président qui arrête les décisions prises dans les Conseils, promulgue les lois, négocie et signe les traités, décrète, ou non, les mesures qui lui sont proposées, est le chefdes Armées, nomme aux emplois publics; le président qui, en cas de péril doit prendre sur lui de faire tout ce qu'il faut; le président est évidemment seul à détenir et à déléguer l'autorité de l'État.

[...]...

Il doit être évidemment entendu que l'autorité indivisible de l'État est confiée tout entière au président par le peuple qui l'a élu, qu'il n'en existe aucune autre, ni ministérielle, ni civile, ni militaire, ni judiciaire, qui ne soitconférée et maintenue par lui, enfin qu'il lui appartient d'ajuster le domaine suprême qui lui est propre avec ceux dont il attribue la gestion à d'autres.

»Conférence de presse, 31 janvier 1964. « Le chef de l'État a usé simplement des moyens que la Constitution lui donne pour faire en sorte, qu'en de graves circonstances, la Nation elle-même décide de son propre sort et pour assurer le bon fonctionnement et lacontinuité des pouvoirs publics; cela à l'encontre de quelques-uns qui pensent, comme le faisait Chamfort, que « la souveraineté réside dans le peuple mais que le peuple ne doit jamais l'exercer.

»On a parlé de « pouvoir personnel ».

Si l'on entend par là que le président de la République a pris personnellement les décisions qu'il lui incombait de prendre, cela est tout à fait exact.

Dans quel poste, grand ou petit, celuiqui est responsable a-t-il le droit de se dérober? D'ailleurs, qui a jamais cru que le général de Gaulle, étant appelé à la barre, devrait se contenter d'inaugurer les chrysanthèmes?...

Mais si l'on veut dire que le président s'est isolé de tout et de tous et que, pour agir, il n'écoutait que lui-même, on méconnaît l'évidence.

De combien d'avis et de consultations ne s'est-il pas entouré! Jusqu'à présent,au cours du septennat, le chef de l'État a réuni 302 fois le Conseil des ministres, 420 fois des Conseils interministériels restreints, reçu dans son bureau 605 fois le Premier Ministre, 78 fois les présidents des Assemblées,près de 2 000 fois l'un ou l'autre des membres du gouvernement, plus de 100 fois les présidents ou rapporteurs des Commissions parlementaires ou les présidents de Groupe, environ 1 500 fois les principauxfonctionnaires, experts, syndicalistes, le tout sans préjudice des lettres, notes, rapports qui lui ont été adressés par l'un ou l'autre des responsables et de l'étude des dossiers.Encore, pour ce qui est des problèmes extérieurs, quelque 600 heures de conversation avec des chefs d'État ou de gouvernement étrangers et un millier d'entretiens avec leurs ministres ou leurs ambassadeurs, ont-ilslargement complété l'information du président.

En tout cas, aucune mesure importante n'a été prise à son plan qu'après qu'ait eu lieu autour de lui la délibération de ceux qui en connaissaient les éléments et enassureraient l'exécution.

C'était d'ailleurs tout naturel.Car les affaires publiques sont aujourd'hui trop variées et trop compliquées pour être traitées autrement.

En ce qui les concerne, le risque réside beaucoup moins dans des ukases lancés du haut d'une tour d'ivoire quedans des examens sans fin dont aucune décision ne sort.

»Conférence de presse, 9 septembre 1965 « ...

Il y a eu 1914 : désastre initial auquel nous avons échappé par une chance inouïe, par un sursaut de tréfonds national qui nous a permis de nous en tirer, Dieu sait d'ailleurs avec quelles pertes! et encore de nous entirer en 14-15 grâce au « pouvoir personnel » du père Joffre et puis, en 17-18, à la fin, où ça devenait dramatique et infiniment grave de nouveau, grâce au « pouvoir personnel » de Clemenceau! [...]Une fois de plus, je vous répondrai sur le pouvoir personnel : quand quelqu'un a des responsabilités — ce qui est mon cas — à cause de l'Histoire et aussi à cause du fait que je suis là et que je suis là de par la volonté dupeuple jusqu'à présent, alors, naturellement, il y a des responsabilités et je vous prie de croire qu'elles sont lourdes.

U faut qu'il les porte lui-même.

Pourquoi les passe- rait-il à d'autres? Mais je ne suis pas tout seul, biensûr! J'ai un Gouvernement.

J'en ai eu deux successivement, pendant le septennat.

Ce n'est pas beaucoup par rapport à d'autres régimes.

Enfin, il y a tout de même des ministres! je vous prie de croire que je ne fais pastout; du reste je ne pourrais pas.

Il y a un Parlement, qui a été élu par le peuple, qui fait les lois! Et puis, c'est lui qui les fait les lois le Parlement, ce n'est pas moi! Alors, voilà ce que c'est que le « pouvoir personnel »! Cesont des expressions qu'on peut employer comme cela, par démagogie, mais qui, en réalité, sont de mauvaise foi.

Voilà la vérité! [...]...

J'ai rendu les libertés publiques, je ne les ai pas détruites.

La liberté de la presse, est-ce qu'elle n'existe pas? Presque toute la presse m'est hostile et je ne l'en empêche pas! Et la liberté syndicale, est-ce que jel'empêche? Pas le moins du monde! Bien au contraire, je fais tout pour essayer d'associer les syndicats au développement en commun de la France.

Et quelles autres libertés ai-je détruites? La liberté de vote? Vous voyezbien ce qui se passe! Le 1er juin 1958, — j'étais revenu la veille, c'est la veille que j'avais reçu l'investiture, que j'étais devenu président du Conseil avant d'être président de la République —, j'ai rétabli la liberté de lapresse que le régime des partis, les jours d'avant, parce qu'il mourait de peur, avait supprimée.

J'ai supprimé la censure, je ne l'ai jamais rétablie! Voilà la réalité.

Alors, il faudrait que les plaisanteries soient plus courtes,parce que ce sont les meilleures, mais quand elles sont très longues, elles sont très mauvaises, les plaisanteries! »Interview radiotélévisée, 15 décembre 1965.. »

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