Devoir de Philosophie

La mise à sac de la manufacture Réveillon

Publié le 30/08/2013

Extrait du document

Dans cette atmosphère explo¬sive, on ne retient des propos des deux patrons que ceux qui visent les salaires. Dans la nuit du 26 au 27 avril, des manifes¬tants se dirigent en cortège du faubourg Saint-Marcel vers la Seine aux cris de : « Mort aux accapareurs ! Le pain à deux sous ! « Ils brandissent une potence à laquelle ils ont accroché des mannequins re¬présentant Henriot et Ré¬veillon, qu'ils brûlent en place de Grève. Ces incidents se déroulent « sous les fenêtres de l'Hôtel de Ville, sous les yeux de l'autorité municipale, qui ne s'émeut pas. Cette auto¬rité et les autres, si éveillées tout à l'heure, semblent endor¬mies. Le lieutenant de police, le prévôt des marchands Fles¬selles, l'intendant Berthier, tous ces agents de la Cour, qui naguère entouraient les élec¬tions de soldats, ont perdu leur activité «, remarque Jules Michelet dans son Histoirè de la Révolution française.

« nants affluent vers le faubourg Saint-Antoine : « La bande a dit tout haut qu'elle irait le lende­ main faire justice chez Ré­ veillon.

Elle tient parole.

La po­ lice, si bien informée, ne prend nulle précaution.

C'est le colo­ nel des gardes françaises qui, de lui-même, envoie trente hommes, secours ridicule ; dans une foule compacte de mille ou deux mille pillards et de cent mille curieux, les sol­ dats ne veulent, ne peuvent rien faire», constate Michelet.

RÉVEILLON : UN PATRON ESTIMÉ La manufacture Réveillon, fabrique de papiers peints sise à l'hôtel Titon faubourg Saint-Antoine, est en 1789 la plus importante de la capitale.

Son patron, un ancien ouvrier, connaît bien les difficultés du petit peuple confronté à la misère et verse à son personnel des salaires très convenables.

La crise l'ayant forcé à débaucher des employés, il leur attribue des allocations de chômage d'un montant relativement élevé.

Il est alors l'un des seuls chefs d'entreprise à s'astreindre à cette mesure sociale.

Ce sont pourtant les déclarations de cet homme estimé qui sont en grande partie responsables du déclenchement de l'émeute la plus grave de ces jours agités.

A l'assemblée électorale du district de Sainte-Marguerite, il suggère de baisser le prix du pain, ce qui permettrait de réduire les salaires et de fabriquer ainsi des produits manufacturés moins chers et accessibles à un plus grand nombre.

Les ouvriers retiennent de ses propos ceux qui mettent leur rémunération en péril.

Brûlé en effigie, Réveillon ne subit aucun dommage physique, mais sa fabrique est entièrement ravagée.

La thèse du complot Dans la soirée, les émeutiers profitent de ce que les gardes françaises s'écartent pour lais· ser passer Je carrosse du duc d'Orléans, qui rentre des cour­ ses à Vincennes, pour envahir l'hôtel Titon.

Tandis que le duc est acclamé et distribue le contenu de sa bourse, « la maison est forcée, on brise, on casse, on brûle tout.

Rien ne fut emporté, sauf cinq cents louis en or.

Beaucoup s'établi­ rent aux caves, burent le vin et les couleurs de la fabrique, qu'ils prirent pour du vin ( ...

).

Chose incroyable, cette vilaine chose dura tout le jour.

Remar­ quez qu'elle se passe à l'en­ trée même du faubourg sous le canon de la Bastille, à la porte du fort.

Réveillon, qui y était caché, voyait tout des tours.

On envoyait de temps à autre des compagnies de gar­ des françaises, qui tiraient, à poudre d'abord, puis à balles.

Les pillards n'en tenaient pas compte.» Néanmoins, les émeutiers ne sont pas armés et la troupe finit par l'emporter.

· On relève officiellement vingt-cinq morts et vingt-deux blessés, en réa­ lité sans doute plus.

Louis XVI ordonne une enquête, qui se soldera par deux condamna­ tions à mort.

Ce pillage et la passivité des autorités susci­ tent des interrogations.

Alors que le roi et la Cour évoquent un complot du duc d'Orléans, le peuple, lui, dénonce le « com­ plot aristocratique » : si les exactions s'étaient générali­ sées, la Cour aurait pu y trou­ ver un motif pour remettre à plus tard les états généraux.

« L'affaire venait tellement à point [pour la Cour) qu'on pourrait l'en croire auteur.

Il est néanmoins plus probable qu'elle ne la commença point, mais la vit avec plaisir et ne fit rien pour l'empêcher», com­ mente Michelet.

L'ensemble des ouvriers des faubourgs n'a cependant pas suivi les émeu­ tiers.

Dès le 29 avril au matin tout est rentré dans l'ordre, et la préparation des états géné­ raux peut continuer.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles