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La péninsule ibérique

Publié le 27/02/2008

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On ne saurait comprendre l'évolution de la péninsule Ibérique à l'époque moderne sans se référer à certaines données essentielles qui remontent à la fin du XVe siècle.                La première de ces données, c'est le geste décisif de la Castille dont la situation fait le partenaire privilégié de toute union ibérique. Elle peut la conclure soit avec le Portugal (c'est la perspective d'un avenir atlantique, colonial et marchand) soit avec l'Aragon (c'est l'entrée en Europe par la porte d'une Méditerranée en voie de décadence). Cette seconde solution prévaut et la politique matrimoniale des rois catholiques en accentuera encore les conséquences.                La prépondérance castillane est une autre de ces données. Dans une union dynastique qui laisse leur autonomie aux royaumes concernés, le plus étendu, le plus riche et le plus peuplé d'entre eux, la Castille, va jouer par la force des choses un rôle dominant. C'est à elle que seront demandés les plus gros efforts en hommes et en argent. Mais c'est aussi à travers ses conceptions et ses problèmes que se dégagera une politique commune dont certains traits pèseront durablement sur le destin espagnol : ainsi les mesures d'unité religieuse ­ Inquisition, expulsion des juifs, émigration des conversos ­ aboutiront à priver le pays de ses éléments les plus aptes aux activités économiques et prépareront le blocage d'une société hypnotisée par la " pureté de sang " ; de mettre les dispositions en faveur de l'aristocratie en feront une puissance économique solidement appuyée sur les latifundia  et le gros élevage, au détriment de l'agriculture.  

« On ne saurait comprendre l'évolution de la péninsule Ibérique à l'époque moderne sans se référer à certainesdonnées essentielles qui remontent à la fin du XVe siècle.

La première de ces données, c'est le geste décisif de la Castille dont la situation fait le partenaire privilégié de touteunion ibérique.

Elle peut la conclure soit avec le Portugal (c'est la perspective d'un avenir atlantique, colonial etmarchand) soit avec l'Aragon (c'est l'entrée en Europe par la porte d'une Méditerranée en voie de décadence).Cette seconde solution prévaut et la politique matrimoniale des rois catholiques en accentuera encore lesconséquences.

La prépondérance castillane est une autre de ces données.

Dans une union dynastique qui laisse leur autonomie aux royaumes concernés, le plusétendu, le plus riche et le plus peuplé d'entre eux, la Castille, va jouer par la force des choses un rôle dominant.

C'est à elle que seront demandésles plus gros efforts en hommes et en argent.

Mais c'est aussi à travers ses conceptions et ses problèmes que se dégagera une politique communedont certains traits pèseront durablement sur le destin espagnol : ainsi les mesures d'unité religieuse Inquisition , expulsion des juifs, émigration des conversos aboutiront à priver le pays de ses éléments les plus aptes aux activités économiques et prépareront le blocage d'une société hypnotisée par la “ pureté de sang ” ; de mettre les dispositions en faveur de l'aristocratie en feront une puissance économique solidementappuyée sur les latifundia et le gros élevage, au détriment de l'agriculture.

Avec sa noblesse et ses marranes, le Portugal connaît certes des problèmes analogues.

Mais depuis son échec en Castille, il s'est avant tout lancéà corps perdu dans la grande entreprise coloniale, planifiée par ses rois et chantée par son plus illustre poète, Luis de Camoens L030 .

Sous Manuel le Fortuné P2068 (1495-1521) les voyages de Vasco de Gama E056 et de Cabral E1075 préludent à la fondation de l'empire portugais d'Asie par Albuquerque P1066 , qui draine vers l'opulente Lisbonne une partie du richissime commerce des épices.

Si le rythme de la conquête extrême- orientale faiblit sous Jean III (1521-1557) encore que les Portugais prennent pied en Chine et au Japon, évangélisé par saint Francois-Xavier E1350 - la colonisation du Brésil commence.

Le jeune roi Sébastien P2518 préférera poursuivre en Afrique des chimères qui lui coûteront la vie.

Les quelques décennies qui voient s'élever sur quatre continents un immense et fragile empire sont capitales pour le Portugal : en assurant saprospérité marchande, elles renforcent définitivement la conscience qu'il a de son destin national.

De l'aventure d'outre-mer, la Castille n'est pas absente, grave à l'obstination de Colomb E023 et aux exploits d'une poignée de conquérants.

Mais, si sincère que soit son intérêt pour le sort et la conversion des Indiens, elle considère surtout l'Amérique comme une source de richesses utilisablespour sa politique européenne.

En effet, prisonnier des choix de ses prédécesseurs, Charles Quint P065 (1516-1556) tourne le dos à l'Océan pour vaquer aux choses sérieuses, celles du continent où, par le jeu des héritages, il possède non seulement les royaumes espagnols avec leursprolongements méditerranéens, mais aussi les États austro-bourguignons.

Certes, c'est l'occasion pour l'Espagne, et en particulier la Castille, de s'ouvrir aux grands courants culturels qui agitent l'Europe : l'humanisme etl'érasmisme pénètrent dans les foyers intellectuels de Salamanque et d'alcalá.

Mais l'élection de 1519 marque bien le caractère traditionnel desambitions d'un prince qui se croit destiné à édifier enfin le Saint Empire.

Pendant que, au-delà des mers, Cortés E027 et Pizarro E110 conquièrent le Mexique et le Pérou, en Europe, le vieux rave médiéval se heurte aux réalités d'un monde moderne en gestation : la France s'oppose à l'hégémonieimpériale, la Réforme KW159 rompt l'unité de la Chrétienté, que menace par ailleurs l'expansion ottomane.

Durant quarante ans, à la tête de troupes aguerries dont l'infanterie espagnole forme l'élite, Charles Quint P065 s'épuise dans un combat gigantesque pour forcer le destin.

Une série de succès souvent impressionnants lui permettent tout juste de contenir ses adversaires ligués entre eux pour mieux le combattre.

Découragé, ilpartage ses États entre son frère et son fils et abdique.

Délivré du poids de l'empire, Philippe II P2320 (1556-1598), loin de se replier sur ses royaumes, se voue à la mission de défendre et de propager à travers le monde la foi catholique dont le concile de Trente P4T01M1 , fortement influencé par les théologiens espagnols, vient de donner une définition rajeunie et purifiée (1542-1563).

Cette foi, aux yeux du monarque, constitue l'essence même de l'unité d'une Espagne dont il fait le quartiergénéral de la lutte contre l'hérésie : il fixe sa résidence au centre de la péninsule, organise une bureaucratie tentaculaire, isole le pays desinfluences délétères, prépose l' Inquisition L218M1 à la surveillance des activités intellectuelles, encourage le mouvement religieux lié à la Contre- Réforme KW159 , et en particulier les progrès de la jeune Compagnie de Jésus.

Cette politique d'une sévérité souvent excessive porte cependant ses fruits.

Tout en favorisant une magnifique éclosion spirituelle et culturelle- c'est l'époque de sainte Thérèse, de saint Jean de la Croix L1476 , de Luis de León L1541 , du Greco A053 , de l'Escorial L029M1 elle met l'Espagne à l'abri des dissensions religieuses qui déchirent l'Europe et lui permet de consacrer toutes ses énergies à la défense de l'orthodoxie.

Tandis quel'Évangile est prêché dans le Nouveau Monde, l'infidèle est refoulé en Méditerranée (Lépante, 1571), l'hérésie traquée en Flandre, le particatholique soutenu en France.

La “ prépondérance espagnole ” culminera en 1580 quand Philippe II P2320 montera sur le trône de Portugal.

Non seulement l'unité de la péninsule se réalise, mais les richesses des deux plus grands empires du monde semblent réunies pour leur assurer une hégémonie que ne parviendront pasà mettre en cause les échecs de la fin du règne : l'invincible Armada P098M2 , le triomphe de Henri IV P139 , le succès des révoltés flamands.

Ces revers sont pourtant graves puisqu'ils marquent la naissance de la puissance maritime anglaise, le relèvement de la France, la rupture de lavieille solidarité économique Castille-Flandre au profit de l'axe Séville-Gênes.

Ils sont inévitables si l'on considère la fragilité de l'économieespagnole.

L'ambition des souverains, la dispersion et l'éloignement des théâtres d'opérations, la quantité et la variété des besoins, tout exigeaitdes ressources énormes.

Charles Quint P065 les obtient d'abord d'une Castille prospère, au prix de l'écrasement des dernières libertés bourgeoises. Il les accroît en prof tant de l'exploitation progressive des richesses du Nouveau Monde, grâce à des procédés vivement dénoncés par une éliteéclairée.

Jusque vers le milieu du siècle, l'afflux de l'or à Séville, lié à une conjoncture de hausse, donne un coup de fouet à l'économie castillane.Mais celle-ci ne bénéficie pas vraiment de ces trésors.

La part du roi est engagée d'avance, comme certains impôts, à des financiers internationaux,surtout génois, seuls capables par leur crédit et leur réseau bancaire d'effectuer aux endroits et aux temps fixés les paiements indispensables.Quant aux capitaux des particuliers, ils s'investissent dans des dépenses somptuaires et nullement dans l'agriculture ou l'industrie dont les prix en. »

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