Devoir de Philosophie

Les frontières

Publié le 30/12/2018

Extrait du document

FRONTIÈRES NATURELLES, FRONTIERES POLITIQUES

 

La notion de frontière renvoie à celle de limite. En géographie, les frontières marquent les limites d'un territoire - par extension celles d'un État Ces frontières sont souvent naturelles, c'est-à-dire matérialisées par des obstacles physiques.

 

Le caractère « naturel » de la frontière peut toutefois aussi provenir d’un « obstacle » ou d’une différence essentielle d’ordre culturel, économique ou social comme la langue, l'activité, l’appartenance ethnique ou religieuse. La « nature » dont se réclament ceux qui tracent - ou rectifient - les frontières peut encore résulter d'une construction purement idéologique. Le concept de frontière est lui-même en perpétuelle évolution : autrefois barrières rigides entre des mondes qui s'ignoraient les frontières sont aujourd'hui devenues de simples lieux de passage au sein d'un monde en interconnexion.

LES FRONTIÈRES PHYSIQUES

• Dans son sens premier, une frontière naturelle constitue un obstacle physique imposé par la nature. La formation du relief a donc déterminé sur le plan géologique la délimitation de frontières.

Les frontières géologiques

 

L'évolution géotectonique de la Terre explique la configuration actuelle

 

de son relief. Les continents se sont formés à partir du continent primitif baigné par un océan unique.

 

Cette évolution résulte du glissement qui se poursuit, de plaque dure sur une couche plus molle, sous l'effet d'amples courants qui agitent le manteau terrestre.

 

Le continent primitif s'est rompu en trois morceaux il y a environ

 

200 millions d'années. Puis l'Amérique et l'Afrique se sont séparées ; par la suite, l'Antarctique, l'Australie et l'Inde se sont désolidarisés de l'Afrique.

Aujourd'hui, les océans forment donc des frontières naturelles entre les continents - sauf les continents européen et asiatique, souvent regroupés pour cette raison sous l'appellation d'« Eurasie ».

 

Peu de pays s'étendent sur plusieurs continents : seules la Russie et la Turquie « eurasiennes » et l'Égypte

 

« afro-asiatique » sont dans ce cas.

Cette même tectonique des plaques explique la formation des montagnes. La percussion des plaques eurasiatique et indo-australienne

 

a ainsi donné naissance à la plus importante chaîne de la Terre, l'Himalaya. Les Alpes en Europe et les Rocheuses en Amérique du Nord, prolongées par les Andes en Amérique du Sud, correspondent à d'autres « frontières » tectoniques.

 

Le ruissellement des eaux sur les versants montagneux donnent naissance aux fleuves dont certains constituent des frontières naturelles indirectement issues du relief.

 

De nombreux États possèdent des frontières politiques correspondant à ces frontières physiques. Les États qui occupent une île en constituent les exemples les plus évidents :

 

de l'Australie à Malte en passant par Madagascar et Cuba. De même, les montagnes séparent le Chili de l'Argentine dans le cas des Andes, la Chine du sous-continent indien pour l'Himalaya, la France de l'Italie ou de l'Espagne pour les Alpes ou les Pyrénées. Enfin, le Rhin, le Danube, le Rio Grande, l'Amour, le Congo ou le Sénégal sont autant de fleuves-frontières - au moins sur une partie de leur cours.

Les frontières climatiques

 

Le climat détermine également des frontières. L'« enfer vert » équatorial, les déserts chauds sud-tropicaux, les régions tempérées et les déserts froids polaires dessinent autant de zones climatiques dont l'équateur, les tropiques et les cercles polaires ne représentent que les frontières fluctuantes et virtuelles.

 

Les caractéristiques de ces zones climatiques influent fortement sur les possibilités de la vie, végétale et animale, notamment sur le peuplement humain et l’activité agricole que l'homme peut

 

y développer.

 

Ainsi le nomadisme pastoral des populations habitant le Sahel s'explique par l'absence de pâtures permanentes pour les troupeaux dans ces zones semi-arides.

Énoncée en 1823, la doctrine Monroe, du nom du président des États-Unis de l'époque, marque un tournant majeur dans la politique étrangère américaine.

Sous couvert de protéger les Amériques du Nord et du Sud d'éventuelles visées coloniales européennes, les États-Unis s'érigent en protecteurs de l'ensemble du continent, déclarant abandonner toute volonté d'influence en Europe. Cette doctrine justifiera en pratique la domination de Washington sur l’Amérique latine qu'elle considérera dès lors comme son « arrière-cour », mettant en place des régimes et des circuits économiques à son avantage.

 

Dans les années 1930, les nazis au pouvoir à Berlin commencent à mettre en application leur théorie du Lebensraum - de l'« espace vital » -selon laquelle tout espace nécessaire au développement démographique

 

et économique d'un pays doit lui être rattaché. Les frontières du « Grand

« • L'un des éléments du processus d'élaboration des États-nations, au cours de l'époque moderne, consiste à surveiller et à défendre le « front » militaire.

Afin d'être hermétiques aux invasions, les frontières se couvrent de places fortes qui servent à la fois de barrière et d'abri pour les garnisons chargées de les défendre.

·Au XVII' siècle en France, Louis XIV assisté de Vauban entreprend de délimiter matériellement l'espace de la souveraineté royale en construisant une série de citadelles chargées d'en défendre l'accès.

• Les frontières évoluent au gré des conflits et des négociations diplomatiques qui les suivent Elles sont fixées par les traités qui suivent les armistices.

• Le bornage et la cartographie des frontières résultent donc du contrôle militaire d'un territoire et de la représentation de celui-ci que l'état de la science autorise.

L'ESPACE FIONTAUU • L'espace frontalier présente des caractéristiques différentes selon la légitimité et la nature de la frontière considérée.

• Les espaces frontaliers internes à l'Union européenne ne sont pas ou sont peu matérialisés.

On passe ainsi insensiblement de France en Belgique ou d'Allemagne en Autriche et la liberté de circulation est totale dans les limites de l'Union.

Les espaces frontaliers intereuropéens sont devenus de véritables aires de développement économique qui bénéficient de mesures d'harmonisation.

Les eurorégions de l'Union poursuivent ainsi l'objectif de développer des politiques globales au sein d'un même bassin de vie.

par-dela les frontières étatiques.

• Même s'ils sont matérialisés par des postes-frontières, d'autres espaces frontaliers constituent des lieux d'échanges très actifs.

Les circulations des travailleurs frontaliers qui habitent dans un pays et travaillent dans un autre pour profiter de meilleurs salaires en sont une preuve.

De même, la frontière entre les États-Unis et le Mexique, qui met en contact une hyperpuissance économique et un pays en développement, est continuellement franchie par les Mexicains qui vont travailler clandestinement aux États-Unis.

Cette interdépendance des intérêts économiques se traduit surtout par l'existence des maquilladol'tls, ces ateliers de main-d'œuvre au service de clients américains qui sont installés au Mexique.

Cette frontière est en soi créatrice de richesse : source de revenus clandestins pour les uns, d'avantages fiscaux pour les autres.

• En revanche, certains espaces frontaliers demeurent des zones interdites.

La frontière entre les deux (orées, qu'aucun traité de paix n'est venu officialiser à l'Issue de l'armistice de juillet 1953, dessine un no man's land de plusieurs kilomètres de large surveillé par les armées des deux pays.

Tout aussi militarisé était l'espace frontalier traversé par le "rideau de fer" qui a séparé l'Europe communiste de l'Europe occidentale entre 1946 -date à laquelle Churchill inventa l'expression -et 1989.

LES FRONTIÈRES IDÉOLOG IQUES FRONTIÈRE ET IDENTirt • Si les deux termes de « frontière » et d' « identité » paraissent indissociables, la question se pose de savoir lequel précède l'autre.

· Lors de la décolonisation de l'Afrique, les frontières des nouveaux États ont épousé les contours des possessions coloniales, qui résultaient eux-mêmes de considérations principalement militaires et diplomatiques.

Les ethnies ancestralement implantées sur ces territoires se sont trouvées partagées par ces frontières entre les nouveaux États indépendants.

L'instabilité politique de nombre d'États africains n'est pas étrangère à cette absence d'homogénéité ethnique qui rend difficile l'émergence d'un sentiment national.

• Les royaumes d'Italie n'ont été politiquement unifiés qu'en 1870.

Leurs sujets n'en étaient pas moins conscients, dès avant cette date, de partager une même culture et d'appartenir à une même communauté de de st in .

· L'empire d'Autriche-Hongrie était composé, jusqu·� sa disparition en 1918, d'u ne mosaïque de peuples aux identités très marquées et très différentes.

Les Serbes comme les Hongrois, pour ne citer qu'eux.

ont ainsi toujours revendiqué leur spécificité.

Les États créés sur les ruines de l'empire ne sont jamais parvenus à regrouper des communautés homogènes.

Ils n'ont cessé, en conséquence, d'être agité de revendications nationales.

L'édifice artificiel de la Yougoslavie n'a dû qu'aux régimes autoritaires qui l'ont dirigé de ne pas éclater plus tôt En 1991, les querelles nationalistes et religieuses ont repris le dessus, conduisant à un conflit long et meurtrier qui traduisait les volontés contradictoires d'établir des frontières respectant les identités.

Les Tchèques et les Slovaques, qui formaient des communautés géographiquement homogènes, se sont séparés pacifiquement en 1993.

US EXTENSIONS TERRITORIAlES • L'idéologie a toujours servi à justifier les conquêtes ou les prises de contrôle territoriales.

• Énoncée en 1823, la doctrine Monroe, du nom du pnsident des lttds-Unis de l'époque, marque un tournant majeur dans la politique étrangère américaine.

Sous couvert de protéger les Amériques du Nord et du Sud d'éventuelles visées coloniales européennes, les États-Unis s'érigent en protecteurs de l'ensemble du continenL déclarant abandonner toute volonté d'influence en Europe.

Cette doctrine justifiera en pratique la domination de Washington sur l'Amérique latine qu'elle considérera dès lors comme son « arrière-cour», mettant en place des régimes et des circuits économiques à son avantage.

• Dans les années 1930, les nazis au pouvoir à Berlin commencent à mettre en application leur théorie du Lebensraum -de l'• espace vital » - selon laquelle tout espace nécessaire au développement démographique et économique d'un pays doit lui être rattaché.

Les frontières du « Grand Reich » sont ainsi définies comme les frontières naturelles de l'espace communautaire aryen.

De la réoccupation de la Rhénanie en 1936 à l'invasion de la Tchécoslovaquie puis de la Pologne en 1939 en passant par I'Ansch/ IISS et l'occupation des Sudètes en 1938, cette expansion conduira au déclenchement de la Seconde Guerre mondiale.

• En 1945, l'URSS entreprend d'établir, dans la partie de l'Europe qu'elle a contribué à libérer de l'occupation allemande, un « glacis » protecteur destiné à protéger son flanc ouest.

La Pologne, laT chécoslovaquie, la Hongrie, la Roumanie, la Bulgarie, la Yougoslavie et l'est de l'Allemagne, bientôt séparés du reste de l'Europe par le « rideau de fer », forment un tampon stratégique.

LES FRONTIÈRES NATURELLES: UN CONCEPT PERTINENT ? LA DOOJ111A11SATION DES FRONTihES • Certaines frontières ont disparu, tel le rideau de fer en 1989 .

D'autres s'estompenL comme les frontières internes de l'Union européenne, afin de permettre la libre circulation des personnes, des biens et des capitaux.

D'autres marchés régionaux s'organisent sur tous les continents.

Dans le cadre de la mondialisation, les frontières douanières internationales tombenL sous le contrôle de l'Organisation mondiale du commerce (OMC).

Les nouveaux enjeux -lutte contre la pauvreté ou contre le terrorisme, prévention des catastrophes naturelles ou de la dégradation du climat- donnent lieu à des politiques qui dépassent les cadres nationaux.

Plus généralemenL depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, un certain nombre de questions concernant l'humanité sont traitées au niveau de l'ONU.

• La technologie contribue également à abolir les frontières : de la généralisation des transports aériens à l'essor des télécommunications qui, via les Slltellites et l' lnterneL place 1-------------...1.--------------! le monde« en réseau».

D'AUTRES FRONTIÈRES, ETHNIQUES, CULTURELLES, ÉCONOMIQUES ...

• Des frontières séparent les membres d'une même nation ou les groupes d'États selon des critères ethniques, culturels, économiques, qui relèvent souvent d'une idéologie présentée comme un critère « naturel » de distinction.

• La ségrégation raciale justifiée par des considérations religieuses ou pseudoscientifiques a longtemps été pratiquée dans des pays comme les États-Unis ou l'Afrique du Sud.

Elle se matérialisait dans l'espace par des frontières, que celles-ci délimitent les quartiers noirs des grandes villes américaines ou les townships et les bantoustans sud-africains, ou encore les zones �aux différentes« races » dans les transports ou les restaurants.

• Des frontières spatiales continuent également d'être établies entre les membres de différentes religions.

Les juifs ont longtemps été contraints, notamment en Europe centrale, de vivre dans des quartiers réservés, les ghettos, qu'ils devaient regagner pour la nuit Les « infidèles » sont toujours interdits d'accès dans les mosquées et dans certaines villes saintes de l'Islam comme La Mecque ou Médine.

La « Bible Belt >> -ou « ceinture de la bible » -délimite aux États-Unis les États du Sud dans lequels les préceptes religieux constitutifs de la nation américaine sont particulièrement observés et qui sont donc peuplés de citoyens plus conservateurs en moyenne que dans le nord du pays.

• Les catégories sociales peuvent aussi donner lieu à des ségrégations spatiales.

La secte des intouchables en Inde comme les burakumins au Japon -fossoyeurs, cordonniers, tanneurs, bouchers ou équarisseurs, qui travaillent au contact de choses mortes et donc impures -vivent à l'écart du reste de la population dans des villages ou des quartiers spéciaux -les burakumins sont pour cela surnommés le « peuple des hameaux ».

• Des frontières économiques, non matérialisées sur le terrain mais actives dans le milieu des relations internationales, séparent le Nord du Sud, les pays industrialisés -représentés par le Gl- des pays en développement - représentés par le G 15.

• La nature des «valeurs » qu'un pays doit respecter et l'interprétation de celles-ci par les gouvernements tracent également des frontières.

Le Conseil de l'Europe est ainsi une organisation dont les membres sont sélectionnés en fonction de leur degré de respect des droits de l'homme et de la démocratie.

Le débat sur l'adhésion de la Turquie à l'Union européenne repose sur la capacité de ce pays à partager les mêmes valeurs que les Vingt-Cinq.

Au-delà, ce débat pose la question de la nature des frontières de l'Europe : géographique, religieuse, politique, éthique ...

De l'empire de Charlemagne à la chrétienté médiévale, de l'Europe des nations aux deux Europes de la guerre froide et jusqu'à l'Union européenne d'aujourd'hui, les critères de définition ont évolué.

�--� • L'industrie du tourisme, enfin, constitue aujourd'hui l'une des causes premières de l'ouverture des frontières.

LA PERMANENCE DES FIONTIÈRES ·Toutefois, de nombreux conflits récents dans le monde restent liés à des questions de frontières : guerre entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan, guerre entre l'Irak et le Koweit, guerre en Bosnie, guerre entre l'Éthiopie et l'Érythrée, conflit israélo-palestinien, sans parler des multiples guérillas indépendantistes en cours, des Kurdes aux Papous et des Tchétchènes aux Casamançais.

• Certaines frontières se renforcenL à l'Image de l'édification d'un .,, de sépflrtlfion entre Israël et les territoires palestiniens.

Il en est de même des frontières migratoires comme la frontière extérieure de l'Union européenne- ou plutôt celle de l'• espace Schengen »­ au-delà de laquelle les immigrés clandestins sont repoussés.

• La mondialisation elle-même crée de nouvelles frontières.

Des processus de replis identitaires, terreaux de tous les extrémismes, se développent parmi les laissés pour compte d'un mouvement de globalisation qui diffuse le modèle économique, politique et social de l'Occident Ceux qui ne s'y adaptent pas lui tournent le dos.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles