Devoir de Philosophie

ADAM DE LA HALLE ou ADAM LE BOSSU : sa vie et son oeuvre

Publié le 14/11/2018

Extrait du document

ADAM DE LA HALLE ou ADAM LE BOSSU (seconde moitié du xiiie siècle). Adam de la Halle est le témoin d'un monde en crise. L’Église romaine passe par des moments difficiles. Le développement et l'influence des ordres mendiants, dominicain et franciscain, suscitent de violentes réactions dans les universités. Connue maintenant dans son ensemble, l’œuvre d'Aristote, après avoir procuré un instrument de connaissance qui avait servi à explorer les mystères de la nature, à classer et à ordonner les espèces et les genres, fournit une pensée séduisante, de fond antichrétien, que l'Église cherche à contrecarrer. En dépit de Saint Louis, c’est la fin de l’esprit de croisade : à la guerre sainte succède le temps des explorateurs, des commerçants et des missionnaires. Adam est aussi l’héritier de toute la culture médiévale, comme l’attestent des emprunts et des allusions aux œuvres dramatiques (Jeu de saint Nicolas, Courtois d'Arras), lyriques (jeux partis, congés, pastourelles, chansons courtoises), épiques et romanesques, satiriques (Chansons et dits artésiens), mais aussi aux légendes du folklore (repas des fées, chasses infernales) et aux pratiques de la sorcellerie.
 
Une vie obscure
 
Les hypothèses de H. Guy relatives à la biographie d’Adam ont été contestées très tôt, et en particulier par A. Guesnon, si bien qu'il ne semble pas qu’il faille les retenir. Surnommé le Bossu (mais il nie l’être), ce poète, qui fut aussi l’un des plus grands musiciens du Moyen Age, était appelé à l’étranger Adam d’Arras, si l’on en croit le Jeu du pèlerin. Les thèses les plus contradictoires se sont opposées sur ses sentiments à l'égard de sa femme et de son père comme sur la chronologie de son œuvre : il n’est pas sûr que le Jeu de la feuillée, qui date de 1276, soit contemporain des Congés et antérieur au Jeu de Robin et Marion. Il n’est pas du tout prouvé qu’ Adam ait quitté Arras pour Paris, il est très peu probable qu'il ait été exilé. En revanche, le Jeu du pèlerin nous apprend qu’Adam, « aimé et prisé et honoré du comte d’Artois », Robert II, l’accompagna à Naples, où il passa au service de Charles d’Anjou, qu'il chanta dans l’épopée inachevée du Roi de Sicile. Quant à sa mort, on la situe généralement entre 1285 et 1288.

« l'ambiguïté du Jeu de la feuillée Toutefois, l'œuvre capitale d'Adam demeure le Jeu de la feuillée.

écrit sans doute pour une réunion de la Confrérie des jongleurs et bourgeois d'Arras.

Son titre - en picard, li Jeus de le fuellie -évoque aussi bien la folie que la loge de feuillage qui abrite la châsse de la Vierge ou la table des fées dans les fêtes de mai, ou encore la feuillée où le chevalier essaie de séduire la bergère.

La pièce semble, de prime abord, composée d'une succession fiévreuse et incohérente de scènes et de tableaux trüs divers : portrait contrasté de Maroie, la femme d'Adam, qui « estoit blanke et vermeille, rians, amoureuse et deugie » (svelte), et que maintenant il voit « crasse et m;;.utaillie, triste et tenchant » (grincheuse); venue d'un médecin, puis d'un moine chargé des reliques de saint Acaire (qui guérissaient de la folie).

ce qui per­ met de dénoncer 1' avarice, la gourmandise, la luxure et la folie de nombreux Arrageois; élucubrations et cabrio­ les d'un « dervé >>, un fou furieux, encadrant un débat sur les clercs «bigames » (remariés); une « grant mer­ veille de faerie >> : trois fées.

qui s'entretiennent avec un envoyé du roi infernal Hellequin, Croquesot, accordent à deux des acteurs, à Adam lui-même et à Rikier, des dons qui, favorables ou défavorables, aboutissent au même résultat, les enfermant dans leur vie actuelle et les retenant à Arras, qu'Adam voudrait fuir, comme il l'annonce au début de la pièce; elles dénoncent Robert Sommeillon, faux chevalier et détestable amant, et, grâce à l'allégorie c.e la roue de Fortune, la politique injuste du patriciat d'Arras; pour finir, elles s'acoquinent avec dame Douche dans de louches pratiques de sorcellerie.

Dans les deux cents derniers vers, les acteurs se retrou­ vent à la taverne, théâtre de disputes, de tromperies, de nouvelles manifestations du dervé : chacun semble renoncer à es illusions, voire à son idéal.

Très variée et très riche malgré ses dimensions res­ treintes, cette œuvre, où les confidences et la critique d' Arrageois connus se mêlent à la satire de types trad i­ tionnels et à la parodie de genres littéraires (chansons, romans arthuriens, jeux partis), a divisé les critiques : simple revue comique et satirique pour les uns (H.

Guy, H.

Roussel, Crr.

Frank, R.

Berger), jeu à but moral qui raille travers •!t vices sans espoir d'améliorer le monde (J.

Frappier), pièce politique qui exprime le point de vue de J'opposition antipatricienne de la moyenne et petite bourgeoisie arrageoise (M.

Ungureanu), expression des obsessions du poète et de ses efforts pour se reconnaître à travers la laideur qui donne la nostalgie du beau (A.

Adler), alliance inconsciente d'ombres personnelles - hantise de:; mères terribles, angoisse de dépendance et d'abandon, fantaisie de triomphe sur le père ...

- et d'un théâtre profondément comique (Ch.

Mauron).

Pour nous, c'est l'itinéraire moral et spirituel d'un poète qui n'a pas réussi à échapper à la vie arrageoise pour reprendr� ses études à Paris, confession d'un échec que l'auteur. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles