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Alain Borne (« Quand je serai mort... », En une seule injure)

Publié le 24/02/2011

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alain

   Quand je serai mort vous ne penserez plus à moi — silence et absence — un nom sur une marguerite d'os 5 que je ne serai plus là pour effeuiller. Je t'aime un peu beaucoup passionnément    brisez vos douces mains à soulever la dalle soulevez la dalle car je suis là 10 je n'ai plus en guise de lèvres et d'yeux qu'un peu de la terre d'où jaillit le blé.    Le blé est mon regard le blé est mon baiser je suis moins que le coquelicot 15 je suis moins que le duvet du rossignol qui fut l'été.    Été ma grande saison amour ma grande journée et Vous    20 le seul rêve qui ait pu m'éveiller.    Je m'endors et je meurs.    Quand je serai mort vous ne penserez plus à moi avec moi mourra ma musique 25 et si des lèvres vives la chantent encore ce seront elles que vous aimerez.

Vous ferez de ce texte un commentaire composé. Vous pourrez, par exemple, montrer comment l'auteur renouvelle des thèmes de la poésie lyrique.   

alain

« rapproche leur sens.

Le silence est bien la pire chose qui puisse advenir au poète qui chante le monde. C.

Un monde de fragilité - Mais la mort du poète n'est pas un élément isolé dans un monde de vivants.

Le monde lui-même se définit par safragilité. - Le « coquelicot » (v.

14) et le « duvet du rossignol » (v.

15) sont à la fois le signe de la vie de la nature au pleincoeur de l'été, mais aussi la marque du caractère éphémère des choses : le coquelicot à peine cueilli se fripe et sefane, le duvet du rossignol est l'ensemble des plus petites plumes et donc des plus fragiles. - De la même façon, on cueille et on effeuille la marguerite. - La brièveté des éléments de la nature est doublée de celle du souvenir des vivants : « vous ne penserez plus àmoi » (v.

2 et 23), déplore A.

Borne.

C'est l'oubli de ceux qui restent qui tue véritablement le poète (et même, ilsaimeront quelqu'un d'autre, v.

26), puisqu'il condamne son œuvre au silence. - La poésie sera dépossédée de son créateur, puisque dans le poème on aimera, non plus le poète, mais les « lèvresvives » (v.

25) qui le chanteront, c'est-à-dire les vivants. Transition : le poète se voit mort et oublié de tous par le seul pouvoir de l'imagination, mais le plus douloureux pourlui est la perte de ce qui a fait l'essentiel de sa vie : l'amour. II.

La présence de l'amour A.

La présence de l'Autre - L'Autre est présent dans le pronom personnel de la seconde personne : « vous » qui peut renvoyer à plusieurspersonnes dans certains cas (v.

2, 23, 26) parmi lesquelles se trouve le lecteur que le poète interpelle.

Mais il faitaussi référence à une personne unique, l'être aimé, qui apparaît sous la forme de la majuscule : « Vous » (v.

19) querenforce la brièveté du vers qui lui est dédié. - Les « douces mains » (v.

18) font penser à un personnage féminin dont le poète mort aurait besoin pour adoucirsa mort.

Elles sont le signe d'un regret : le souvenir de caresses désormais terminées est douloureux. - Mais cette femme n'est pas nommée, incarnant ainsi une sorte d'idéal féminin dont on peut malgré tout craindre latrahison. B.

Un univers amoureux - Le cadre tout entier du poème est marqué de signes amoureux, dont les plus flagrants sont la fleur et l'oiseau. - La marguerite est traditionnellement associée à l'aveu de la passion : « je t'aime un peu beaucoup /passionnément » (v.

6-7) est une formule attendue dont le dernier terme est mis en valeur par son renvoi sur levers suivant. - Le « rossignol » (v.

15) est lui aussi un élément traditionnel de l'univers amoureux, surtout depuis Romeo etJuliette de Shakespeare.

Dans cette pièce en effet, les amants veulent croire qu'un rossignol chante (ce qui seraitla preuve qu'il fait encore nuit) plutôt que l'alouette (dont le chant est annonciateur du jour et donc de laséparation des jeunes gens). C.

La fragilité de ly amour - Pourtant l'amour est lui aussi éphémère.

Il ne dure guère : l'« amour ma grande journée » (v.18) est plus court quela vie ou même qu'une saison ; l'association « grande » et « journée » forme un oxymore qui souligne la brièveté dusentiment. - D'autre part, A.

Borne souligne avec amertume le caractère interchangeable des amants, dans la fin du texte : « sides lèvres vives » chantent ce qu'a écrit le poète, « ce seront elles que vous aimerez » (v.

26), tandis que seslèvres à lui ne seront plus qu' « un peu de terre» v.

11). - L'amour est illusoire, un « rêve » (v.

20), durant ce sommeil qu'est la mort. - Et tout se fige en définitive dans la mort, même la marguerite qui devient « d'os » (v.

4), ses pétales arrachéss'apparentant au squelette du poète. Transition : la vie semble ainsi vouée à la disparition, dans tout ce qui fait sa beauté.

Pourtant, l'impression finale dupoème est qu'elle triomphe quand même de la destruction, sous une forme transfigurée.. »

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