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Aube de Rimbaud Illuminations

Publié le 18/09/2018

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rimbaud

Aube

Illuminations

J’ai embrassé l’aube d’été.

 

Rien ne bougeait encore au front des palais. L'eau était morte. Les camps d’ombres ne quittaient pas la route du bois.J’ai marché, réveillant les haleines vives et tièdes, et les 5 pierreries regardèrent, et les ailes se levèrent sans bruit.

 

La première entreprise fiit, dans le sentier déjà empli de frais et blêmes éclats, une fleur qui me dit son nom.

 

Je ris au wasserfall blond qui s’échevela à travers les sapins: à la cime argentée je reconnus la déesse.

 

10 Alors je levai un à un les voiles. Dans l’allée, en agitant les bras. Par la plaine, où je l’ai dénoncée au coq. À la grand’ville elle fuyait parmi les clochers et les dômes, et courant comme un mendiant sur les quais de marbre, je la chassais.

 

15 En haut de la route, près d’un bois de lauriers, je l’ai entourée avec ses voiles amassés, et j’ai senti un peu son immense corps. L'aube et l’enfant tombèrent au bas du bois.

 

Au réveil il était midi.

Le projet poétique qui consiste à saisir ce moment fugace qu'est l’aube n’est certes pas nouveau. Ni dans la tradition de la poésie classique, ni dans le projet proprement rimbaldien. Du Bellay (15221560) et Vincent Voiture (1597-1648), après Pétrarque (1304-1374), se sont emparés du thème de« la belle matineuse » pour chanter le lever d’une femme dont la beauté éclipse celle de l’aube. Dans le poème de Rimbaud, l’aube et la femme se confondent et le poète, loin d’en décrire la beauté, tente simplement de la saisir. Il le fait en abandonnant la « vieillerie poétique », en renonçant au vers rimé ou

Il s'agit dans « Aube » d'« embrasser » (l. 1), d'« entreprendre » (I. 6), d’« entourer » (l. 16). C'est là le seul moyen de saisir l'aube, de la « sentir un peu » (l. 16). Seul le passé composé pouvait dire la délicatesse et la fugacité du geste amoureux: il n’énonce pas un résultat, il décrit une action passée dont on ne sort pas indemne. L’enfant, parce qu’il a saisi dans le bref temps d’une illumination le corps de l'aube, sans pour autant en pénétrer les mystères, n'est plus un enfant. Il est devenu le « je » du sujet lyrique qui seul peut à nouveau embrasser l'aube entre deux octosyllabes (l. 1 et 18).

rimbaud

« assonancé auquel il avait eu recours en 1872 dans un poème intitulé " Bonne pensée du matin , où il s'agissait déjà de dire " cette heure indicible, première du matin , {lettre à Delahaye de juin 1872).

La prose, quand elle est si simple qu'elle en devient poétique, a sans doute seule le pouvoir de dire l'indicible, de saisir la fugacité.

Récit et description se mêlent inextricablement.

Dans " Aube "• cinq paragraphes sont encadrés en un geste d'embrassement par deux vers blancs qui tendent vers l'octosyllabe.

Le vers embrasse la prose et cette structure reflète à la fois l'étreinte et le dégagement.

PREM IER AXE DE LECTURE L' ÉTREINTE AMOUREUSE Le texte de " Aube , se présente comme un récit, scandé par le passé simple et l'imparfait et constitué de plusieurs paragraphes.

Mais la syntaxe fort simple se révèle paradoxalement être pour le lecteur facteur de déception.

Il faut être particulièrement attentif à la délicate chronologie du texte et à son apparente structure narrative pour comprendre que le poème en prose ne peut être lu comme le récit d'une conquête ou d'un échec amoureux.

" Aube , dit à la fois la satisfaction du désir et sa persistance.

Une chronologie délica te Comment lire les deux phrases liminaires du poème? S'inscrivent­ elles dans la chronologie du texte ou constituent-elles toutes deux des décrochages temporels? A lire " Aube , comme un récit, on pourrait être tenté d'interpréter la première phrase comme l'annonce d'un retour en arrière et la phrase finale comme le terme d'une ellipse tempor elle: la chute qui figure le péché originel, mais aussi le sommeil, est suivie immédiatement du " réveil "· L'aube et le midi tracent les limites temporelles de l'événement raconté.

L'adverbe " alors , (1.

1 0), à valeur temporelle et causale, marque dans le texte une nouvelle rupture qui divise le texte en deux mouvements.. »

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