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BAUDELAIRE: Elévation.

Publié le 15/02/2011

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baudelaire

   Au-dessus des étangs, au-dessus des vallées, Des montagnes, des bois, des nuages, des mers, Par delà le soleil, par delà les éthers, Par delà les confins des sphères étoilées,    Mon esprit, tu te meus avec agilité, Et, comme un bon nageur qui se pâme dans l'onde, Tu sillonnes gaîment l'immensité profonde Avec une indicible et mâle volupté.    Envole-toi bien loin de ces miasmes morbides, Va te purifier dans l'air supérieur, Et bois, comme une pure et divine liqueur, Le feu clair qui remplit les espaces limpides.    Derrière les ennuis et les vastes chagrins Qui chargent de leur poids l'existence brumeuse, Heureux celui qui peut, d'une aile vigoureuse, S'élancer vers les champs lumineux et sereins !    Celui dont les pensers, comme des alouettes, Vers les cieux le matin prennent un libre essor, — Qui plane sur la vie et comprend sans effort Le langage des fleurs et des choses muettes !

Toute une série de poèmes des « Fleurs du Mal « est groupée sous le titre significatif de « Spleen et Idéal «. Ce qui s'y exprime, c'est le sentiment douloureux de la déchéance, du péché, de l'ennui... et un besoin impérieux de relèvement ou d'évasion. C'est à la recherche de l'Idéal qu'appartient le poème d'Elévation où Baudelaire, grâce à des symboles et à la musique de son vers, nous suggère ce que sont les joies supérieures de l'esprit, de la poésie, « loin des miasmes morbides « de la vie. (Lecture du texte).     

baudelaire

« Qu'un gibet symbolique où pendait mon image.— Ah ! Seigneur, donnez-moi la force et le courageDe contempler mon cœur et mon corps sans dégoût. ou ces vers de Recueillement : Pendant que des mortels la multitude vileSous le fouet du plaisir, ce bourreau sans merci,Va cueillir des remords dans la fête servile... Ici, au contraire, impression d'aisance, signe de force : « avec agilité...

», « tu sillonnes...

» Cette joie est ainsi savourée de tout l'être qui en est pénétré, exalté.

Les termes sont forts : « se pâme » «gaiement » « indicible...

volupté », et de nombreux mots sont dits avec vénération (Mon esprit) ou effusion,notamment « Au-dessus...

au-dessus...

Par delà...

Par delà...

et le vers 8 où toutes les syllabes se détachent :Avec une indicible et mâle volupté. 4° Les strophes 3 et 4.

— Elles sont bâties toutes deux sur une antithèse.

La strophe 3 oppose aux « miasmesmorbides » (qui suggèrent, avec la consonne m réitérée, le dégoût qu'inspirent les plaisirs de la « fête servile ») «purifier », « l'air supérieur », « pure et divine liqueur », « le feu » (qui purifie, ou qui est pur), « espaces limpides »,qui font sentir la pureté des plaisirs de l'esprit.

L'aspiration à la purification se sent au mouvement qui lance lastrophe : « Envole-toi...

va » et à l'effusion qu'on sent dans chaque mot des trois derniers vers de la strophe.

Même antithèse dans la strophe 4.

Dans les deux premiers vers on reconnaît l'auteur de Spleen à son insistance surl'ennui et aux images « Qui chargent de leur poids l'existence brumeuse » qui rappellent celles du vers : « Quand le ciel bas et lourd pèse comme un couvercle...

» Dans les vers 3 et 4 l'aspiration aux joies de l'esprit estrendue par l'accentuation affective de « Heureux...

» sur la première syllabe.

(Dire le mot avec une conviction totale; aucune nuance de nostalgie). Le v de vigoureuse peint l'envol, ainsi que la sifflante de « s'élancer », les deux mots étant accentués sur lapremière syllabe.

Le dernier vers, après un départ vif, (s'élancer), s'achève sur un ralentissement majestueux etheureux : S'élancer//vers les champs lumineux et sereins. 5° Strophe 5.

— Dans le finale, deux vers reprennent le thème de l'envol, la reprise de « Celui » soulignant la liaison.La comparaison avec l'alouette, l'oiseau des tableaux champêtres purs et heureux, donne une impression defraîcheur et de joie : l'image « qui plane sur la vie » prolonge la précédente, consacre la réussite de l'effortd'élévation, et amorce l'explication du sens de cette élévation : la poésie implique la supériorité sereine del'intelligence.

La fin est encore plus nette : « qui comprend sans effort » (la poésie est connaissance intuitive) Le langage des fleurs et des choses muettes.

Entendons que la poésie est intelligence du monde, et surtout de labeauté (symbolisée par les fleurs) et du mystère des choses, de ces « choses muettes » qu'entend quand même lepoète : La Nature est un temple où de vivants piliers Laissent parfois sortir de confuses paroles... ( Correspondances ). Conclusion. Par la « sorcellerie évocatoire » de son art Baudelaire nous a transportés dans les espaces célestes de la pureté etnous a fait oublier un instant les « miasmes morbides » de l'existence.

La purification, c'est bien ce qu'il demandaitlui-même à la poésie, si nous nous rappelons ce passage des Poèmes en prose : « Mécontent de tous et mécontentde moi, je voudrais bien me racheter et m'enorgueillir un peu dans le silence et la solitude de la nuit.

Ames de ceuxque j'ai aimés, âmes de ceux que j'ai chantés, fortifiez-moi, soutenez-moi, éloignez de moi le mensonge et lesvapeurs corruptrices du monde ; et vous, Seigneur mon Dieu, accordez-moi la grâce de produire quelques beauxvers qui me prouvent à moi-même que je ne suis pas le dernier des hommes, que je ne suis pas inférieur à ceux queje méprise.

» (À une heure du matin).. »

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