BEAUMARCHAIS (Pierre Augustin Caron de)
Publié le 16/02/2019
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BEAUMARCHAIS (Pierre Augustin Caron de), écrivain français (Paris 1732 - id. 1799). L'essentiel de sa vie est extérieur à la littérature. Ce jeune bourgeois, fils d'un artisan horloger, s'essaya aux activités les plus diverses pour faire fortune et carrière. Il perfectionna le mécanisme des montres, pénétra à la Cour, puis dans le milieu des grands financiers, devint professeur de harpe des filles de Louis XV, puis l'associé du richissime Pâris-Duvemey, acheta une charge anoblissante et se fit appeler de Beaumarchais. Chacune de ces occupations fut l'occasion de déployer son charme, son sens de l'intrigue et son goût des affaires. Il joua de ses pouvoirs de séduction, en faisant appel à l'opinion publique ou en épousant celle qui l'avait fait parvenir à la Cour, mais de tels pouvoirs se heurtaient aux pesanteurs
des anciens privilèges et aux enjeux d'intérêts économiques opposés. Sa vie se poursuivit de coups d'éclat en scandales. Les moments principaux en furent un voyage en Espagne qui tenta de concilier souci familial, entreprise financière et mission diplomatique, un procès avec les héritiers de sa première femme morte trop tôt, un second procès avec les héritiers de Pâris-Duvemey qui rebondit en une nouvelle affaire avec l'un des juges, le conseiller Goezman, qu'il accusa de corruption, des missions secrètes pour empêcher la diffusion de libelles injurieux envers le vieux Louis XV puis le jeune Louis XVI, des ventes d'armes aux insurgents américains, ensuite à la République française en guerre contre les monarchies européennes. Jusqu'à sa mort, il multiplia les projets économiques et financiers qui le firent témoin et acteur des principaux événements marquant la fin de l'Ancien Régime et les années révolutionnaires. L'histoire n'aurait retenu son nom que comme celui des nombreux intrigants du siècle, s'il n'avait croisé son activisme financier et mondain avec une réflexion d'homme des Lumières et ajouté à ses activités celle d'homme de lettres. Il étaye en effet ses hasardeuses entreprises bancaires et commerciales sur la conviction d'œuvrer pour le bien public et le progrès de son pays. Il mène conjointement une volonté d'ascension personnelle dans la France d'Ancien Régime et une volonté de réformes et de transformation de ce régime. D'où son engagement en faveur de la révolution américaine et l'ambiguïté de ses positions à l'égard de la Révolution française. Ses critiques des abus de la monarchie, ses emprisonnements l'inscrivent dans le sens d'une action révolutionnaire, ses compromissions avec les élites aristocratiques et financières, sa fortune rapide et parfois tapageuse le rendent suspect aux yeux des révolutionnaires intransigeants.
Cette question prit une tout autre dimension à cause du Mariage de Figaro. C'est d'abord son existence mondaine et ses démêlés avec la justice qui l'amenèrent à l'écriture et à la littérature. Pour

«
le
financier Lenonnant d'Étioles, mari
c o mpl aisant de Mm• de Pompadour, il
comp os a des parades, pièces de théâtre
volontiers gn>ssières et scatologiques qui
jouaient d'un comique prétendument
populaire pour des pri vil égi és .
Plus tard,
il rédigea des mémoires et des factums
qui alertèrent l'opinion publique et firent
pression sur ses juges.
Ses mémoires de
l'affaire Goezman, en 1 773· 74, par la
vivacité de leur style, mirent les rieurs
de son côté.
C'est ensuite l'aspect écono·
mique de l'activité littéraire qui sollicita
son attention.
n s'intéressa au genre
dramatique nouveau, promu par les
effons théoriques et pratiques de Dide·
rot, lancé surtout par le succès du
Philosophe sans le savoir de Sedain e en
1765.
Ce succès, Beaumarchais tenta de
le renouveler : il y parv int presque en
1767 avec sa première pièce Eug�nie,
accompagnée d'une longue pré fa ce inti·
tulée Essai sur le genre dramatique
s�rieux, mais échoua avec la seconde en
1770, les Deux Amis ou le N�gociant de
Lyon.
La rentabilité de l'écriture théà·
tr aie était alors limitée par les privilèges
des comédiens-français.
Beaumarchais
s'attaqua donc à leur mono pole en
cherchant à unir les auteurs dramati
ques et en fondant en 1777 une société
qui est à l'origine de l'actu ell e Société des
auteurs.
De telles revendications ne
trouvèrent leur aboutissement que sous
la Révolution, avec la libération du
théâtre et la création des droits d'auteur.
La littérature est encore opération
économique dans l'entreprise conçue
par Beaumarchais au lendemain de la
mort de Voltaire, celle d'une édition des
œuvres complètes du patriarche (1779).
Po ur ce monument à la gloire des
Lumières et du nouvel esprit économi·
que, il créa la société typographique qui
é di ta la collection à Kehl, à l'abri de
poursuites de la part du gouvernement
français.
L'étude de l'œuvre littéraire de
Beaumarchais est inséparable de ces
réalités marchandes.
Ses premières productions, les para
des, des tin ées à des théâtres privés (les
Bottes de sept lieues, Zirzabelle mann e
quin, Jean Béte à la foire), lui pennirent
d'expérimenter les pouvoirs et les for· mes
du langage drama tiqu e.
Leur effet
c om ique reposait sur des jeux de mots
et de corps : certaines scènes ne sont que
quiproquos, à-peu-près et coups de
bâton.
Beaumarchais ne semble pas
avoir délaissé ce type d'écriture après la
représentation de ses premières pièces
officielles.
U continua à composer des
parades ou à le s remanier.
Vers 176 5 ,
il rédigea le Sacristain, histoir e d'un
amant déguisé en sacristain pour parve
nir jusqu'à la jeune femme, insatisfaite,
d'un bar bon .
Le manuscrit découvert
récemment représente la première ver
sion de ce qui est devenu le Barbier de
Sévill e.
Mais, avant de se lancer dans la
tril og ie de Figaro, l'auteur composa deux
drames qui, après les ressources du
comique, lui permirent de se familiariser
avec les possibilités du path étiq ue.
Eugé
nie est l'histoire d'une jeune fille séduite
par un courtisan qui a fe in t un mari ag e
secret pour l'o btenir : elle découvre
qu'elle est enceinte et que son prétendu
mari va épouser une riche héritière;
diverses péripé tie s donnent à l'aristo
crate le temps de revenir à de meilleurs
sentiments et au rideau de se baisser sur
la morale rétablie.
On retro uve des
questions d'enfant illégitime dans les
Deux Amis ou le Négociant de Lyon,
mais ce sont des mouvements d'argent
qui constituent le fond de l'intrigue : un
n égoc i
an t risque en toute innocence la
faillite, son ami receveur des fermes
comble secrètement son déficit et
devient victime de son dévouement ; une
fois encore, tout finit par s'arranger.
Ces
deux pièces laborieusement composées
selon les principes du drame larmoyant
sont aujourd'hui peu convaincantes.
C'est dans la gaie té du Barbier et du
Mariage que Beaumarchais atteint son
plein épan ouiss ement dramatique.
Le Barbier tire son pouvoir théâtral de
l' allian ce entre le comte Almaviv a,
séducteur momentanément moral, et
so n valet Figaro, le barbier de Séville.
Us
incmnent les forces de la vie et du
progrès qui l'emportent sur le vieux
bourgeois Bartholo.
Le désir d'e x plo iter
ce succès auss i bien que l'ins tabili té des
compromis idéologiques sur lesquels
repose le dé nou eme nt du Barbier amenè·.
»
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