Devoir de Philosophie

Chapitre 18 : « Ce qu'ils virent dans le pays d'Eldorado » (l.81 à 114) - Voltaire (Candide)

Publié le 07/10/2011

Extrait du document

voltaire

Deuxième lieu emblématique du roman, Eldorado est une sorte « d'anti-Thunder-ten-tronckh «, le propulsant dans une seconde phase de son éducation qui correspondra à son retour en Europe. Satire constructive de la société de l'époque, Eldorado ne propose pas d'idéal absolu mais jette plutôt les bases d'un modèle politique et social axé sur la culture et le progrès, valeurs centrales du combat des Lumières.

voltaire

« PROPOSITION DE CORRIGE du COMMENTAIRE COMPOSEExtrait n°5.

Chapitre 18 : « Ce qu’ils virent dans le pays d’Eldorado » (l.81 à 114) Voltaire n’a jamais reconnu la paternité littéraire de Candide ou l’optimisme, publié en 1759.

C’est pourtant,notamment, par ce conte philosophique atypique et rocambolesque que les idées de cette grande figure desLumières nous sont les mieux parvenues.

L’extrait proposé nous décrit la visite de Candide et de son valet Cacambodu pays d’Eldorado.

L’auteur y présente sa version d’un des mythes les plus célèbres du Nouveau Monde et marqueune étape importante du voyage initiatique du héros éponyme du roman, ainsi qu’une pause dans le récit de sestrépidantes aventures.

Après le bannissement du « paradis » qu’était pour lui le château du Baron, l’expérience de laguerre dans l’armée bulgare (chap.

1 et 2), les tremblements de terre et l’auto-da-fé de Lisbonne (chap.

5 et 6),Candide retrouve enfin Cunégonde et tue pour elle (chap.

8 et 9).

Ils embarquent alors tous deux, accompagnés de« la vieille » qui les a reccueillis pour l’Amérique et arrivent en Argentine.

Une fois de plus Candide doit se séparer del’élue de son cœur pour fuir l’Inquisition qui le recherche (chap.

13 à 15).

Accompagné de son valet Cacambo, ilpasse par le Paraguay, où il retrouve et tue le frère de Cunégonde, avant d’arriver au pays mythique d’Eldorado.

Unsage leur en apprend l’origine Inca et le total isolement, secret de sa félicité.

Ils sont ensuite reçus par le Roi eteffectuent une visite de la ville, objet de l’extrait proposé.

Au travers d’une description fantaisiste de la cité perdue,Voltaire relativise le mythe de l’Utopie et nous trace les grands traits de l’idéal socio-politique des Lumières enapprofondissant sa critique de la monarchie absolue. Le passage est marqué par de nombreux procédés d’exagération.

Hyperboles (« deux files de chacune millemusiciens » (l.85, 86), « les édifices publics élevés jusqu’aux nues, les marchés ornés de mille colonnes » (l.95, 96)),redondances (« les grands officiers et les grandes officières » l.83, 84, le nombre « mille » revient à trois reprises,l.85, 96, 105) et formules superlatives (« jamais on ne fit meilleure chère, jamais on n’eut plus d’esprit » l.109, 110)nous peignent un tableau aussi flatteur que fantaisiste.De même la rencontre avec le Roi se fait sur un mode plaisant et peu crédible : « Candide et Cacambo sautèrent aucou de Sa Majesté » (l.92, 93).Cette amplification a pour but d’inscrire Eldorado dans le mythe de l’Utopie tout en dévalorisant celui-ci par soncaractère exagéré, marqué par la surenchère jusqu’au cliché.

Voltaire fait là une référence directe à L’Utopie deThomas More, publié en 1516, dont il semble se démarquer, ne croyant pas à la possibilité d’un monde parfait etrejetant par là-même toute forme d’idéalisme.Le ton général de ce passage est donc volontairement exagératif et comique, Voltaire jouant sur la naïveté deCandide et son empressement enfantin pour rendre le lecteur complice de son humour.

Il empêche ainsi ce dernierd’adhérer à cette féerie de conte oriental en la privant de sens par la surenchère qu’il pratique.

Cette description,faussement idyllique, contient une critique vis-à-vis de la société du XVIIIème siècle ainsi que certains éléments del’idéal politique des Lumières. Voltaire procède en effet à une mise en évidence des imperfections de la société d’ancien régime via sa descriptionde la monarchie libérale et éclairée d’Eldorado.

Par la bouche de Cacambo qui demande comment saluer le Roi (« sion se jetait à genoux ou ventre à terre (…) si on léchait la poussière de la salle » (l.88-90)), il stigmatise lesprotocoles de la monarchie absolue et la tyrannie qui en découle.

Il en dénonce par ailleurs certaines insuffisances ;en nous décrivant les attraits d’Eldorado, il critique indirectement les mœurs de son temps.

Ainsi, l’égalité entre lessexes (« grands officiers et grandes officières » (l.83, 84)), ou le climat de fraîcheur et de propreté (« les fontainesd’eau pure » (l.96, 97)) se font par opposition au sexisme et à l’anarchisme de l’urbanisme parisien de l’époque.Il en va de même concernant le pouvoir judiciaire d’Eldorado où palais de justice et prisons n’existent pas (l.101 à103).

On peut supposer que Voltaire dénonce ainsi l’arbitraire de la justice royale dont il fut, lui-même, victime.Enfin, l’intérêt que porte Eldorado aux sciences (« une galerie de deux mille pas, toute pleine d’instruments demathématique et de physique » (l.

105, 106)) a pour but de réaffirmer l’attachement de l’auteur, comme de tous lesencyclopédistes, au développement de la culture et de l’esprit scientifique.Tous ces éléments contrastent avec l’état de la monarchie française d’alors et révèlent au lecteur de l’époque lesnouvelles valeurs que véhiculait l’idéal des Lumières. Voltaire, en s’attardant sur cette étape du voyage de son héros, révèle son importance ; située au milieu du récit,elle offre à Candide un nouveau point de vue sur le monde.

Deuxième lieu emblématique du roman, Eldorado est unesorte « d’anti-Thunder-ten-tronckh », le propulsant dans une seconde phase de son éducation qui correspondra àson retour en Europe.

Satire constructive de la société de l’époque, Eldorado ne propose pas d’idéal absolu maisjette plutôt les bases d’un modèle politique et social axé sur la culture et le progrès, valeurs centrales du combatdes Lumières.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles