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Commentaire : article « Torture » de Voltaire, Dictionnaire philosophique

Publié le 15/09/2011

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L’émotion contenue de Voltaire, ainsi que la façon dont il expose le sujet sont donc des procédés efficaces pour laisser le lecteur suivre son instinct et adhérer à la cause. Notre auteur ne laisse pourtant pas son auditoire sans filets et le guide implicitement dans son raisonnement.    « Torture «, même si le thème de cet article est explicité dès le titre et répété sous différentes formes à l’intérieur même du texte comme aux lignes 1, 6 et 26 « la torture « « la grande et la petite torture « ou aux lignes 15 et 18 « la question «, la thèse, elle, reste à soulever par le lecteur lui-même.

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« comme un livre d'histoires au même titre que L'Odyssée d'Homère, voire même inférieure ; pour lui, c'est tout sauf unlivre sacré (à l'article Salomon, il nous dit « un ouvrage pour être authentique est-il divin ? »).

On peut dire que laBible est pour lui « le point faible de l'ennemi » parce qu'elle montre de nombreuses invraisemblances qui ladémystifient et qui prouvent qu'elle ne peut pas être lue à la lettre ni prise comme référence tant elle estromanesque.

Il souligne d'ailleurs que « quelques célèbres Pères de l'Église ont eu la prudence de tourner toutes ceshistoires en allégories [...] » (article Genèse), faisant remarquer par ailleurs que ce n'est pas le cas de tous, et ce,de son point de vue, bien malheureusement. * ** L'Ancien Testament, pour Voltaire, est à lire comme on lirait un livre d'histoires.

Pour autant, peut-on se permettredès lors de ne plus attacher aucune importance à son contenu ? Voltaire décide de ne pas s'arrêter là, et ils'attache à démontrer qu'en plus d'être invraisemblable sur beaucoup de points, et donc réduite à n'être plus qu'unsimple livre d'histoires, la Bible est aussi parfois immorale, et ne correspond pas à l'idée que l'on se fait d'un Dieuvecteur de tolérance et de paix, ce même Dieu qui livra à Moïse le Décalogue.

Absurde mais aussi atroce, cemauvais roman est en plus un roman dont le contenu n'est pas toujours chaste, au sens premier du mot : Voltairene fait absolument aucun cadeau à ses ennemis, et réduit leur livre sacré au néant.Pour Voltaire, l'Ancien Testament contient des atrocités qui vont à l'encontre de la morale classique, morale qui estaussi religieuse, et qui est censée être portée par l'Église : il met ici en évidence une grande contradiction entre lestextes qui sont censés être lus à la lettre et l'Église qui évidemment ferme les yeux sur ces atrocités et même prôneune morale qui va donc à l'encontre d'une lecture littérale.

En effet, Voltaire nous montre clairement que de grandspersonnages bibliques sont en réalité des criminels, et que Dieu lui-même les a parfois incités à commettre descrimes.

Ainsi en est-il de David : dans son article du même nom, Voltaire (qui signale d'ailleurs son engagement enécrivant son article à la première personne du singulier) nous dit par exemple « Je suis un peu scandalisé que David,l'oint du Seigneur, l'homme selon le cœur de Dieu, révolté contre Saül, autre oint du Seigneur, s'en aille avec quatrecents bandits mettre le pays à contribution, aille voler le bonhomme Nabal, qu'immédiatement après Nabal se trouvemort et que David épouse la veuve sans tarder.

» Ici Voltaire juge David selon la morale du XVIIIe (la moraleuniverselle, prônée par Bayle, dont nous parlerons plus loin), et déforme le récit de façon tendancieuse, mais il veutmettre en avant ce qui est dit à demi-mots dans l'Ancien Testament : David tue un homme parce qu'il désire safemme, il s'entoure de « bandits » pour son bien personnel, et, ce qui scandalise Voltaire plus que tout, c'estsurtout que cet homme est « l'homme selon le cœur de Dieu », c'est-à-dire que Dieu lui-même a cautionné cesécarts pourtant inadmissibles d'un point de vue moral.

De plus, Voltaire cite ses sources : il nous donne le moyen devérifier que ce qu'il dit est vrai, et même s'il en rajoute, ce n'est que pour rendre son argumentation encore pluspercutante.

On peut encore citer l'article Abraham où Voltaire présente ce dernier comme un menteur qui, en plus,offre sa femme à un autre homme contre des présents : dans le langage moderne, Abraham est un proxénète ! « Unroi de ce désert ne manqua pas d'être amoureux de Sara […].

Le père des croyants fit le même mensonge qu'enÉgypte : il donna sa femme pour sœur, et eut encore de cette affaire des brebis, des bœufs, des serviteurs et desservantes.

» Avec ironie, Voltaire souligne que « cet Abraham devint fort riche du chef de sa femme », et bien sûr,par « chef », il faut entendre « sexe » : Abraham désobéit à lui seul à plusieurs commandements à savoir leNeuvième de la tradition juive (« tu ne feras pas de faux témoignage ») ou encore de Dixième de la traditioncatéchistique (« Bien d'autrui ne convoiteras pour l'avoir malhonnêtement »), et pourtant, Abraham est l'envoyé deDieu (« Dieu voulait qu'il fit ce voyage », dans le Dictionnaire Philosophique).

Voltaire sous-entend donc que c'estDieu qui demande à ses élus de se comporter de façon criminelle, ou en tout cas, il souligne que c'est ce qu'il estécrit dans l'Ancien Testament.

Une telle attitude ne correspond pas à la morale chrétienne, et lire la Bible de façonlittérale sans tenir compte de ces évènements tendancieux, ou en tout cas fermer les yeux sur ce qui n'est pasacceptable tout en demandant d'appliquer le reste à la lettre semble jouer en la défaveur de l'Église qui apparaîttout à coup très hypocrite.

Et, plus simplement, on peut dire que « la Bible est le point faible des ennemis », quandon voit quelles idées elle véhicule, idées que même Voltaire, qui n'est pourtant pas un fervent admirateur de latradition judéo-chrétienne, ne juge pas acceptables ne serait-ce que du point de vue de la morale universelle. * **Pour Voltaire, nous l'avons vu, la Bible n'est qu'un mauvais roman, qui, en plus d'être plein d'invraisemblances, estvecteur d'atrocités et d'immoralité : pour lui, la lire à la lettre est une absurdité, et il compte bien démontrer qu'ellen'est pas toujours au service de ceux à qui elle sert, puisqu'elle dévoile des parts sombres et particulièrementlointaines de la pensée catholique formelle.

Mais ce qui met Voltaire hors de lui, ce sont les théologiens, qui ont créédes dogmes à partir de cette Bible et qui ont entrainé une grande intolérance ainsi qu'une incompatibilité entre cettethéologie et la façon de lire la Bible qu'elle demande et la philosophie et l'histoire profane.

Si la théologie, tirée de laBible, est considérée comme faisant partie du « point faible de l'ennemi », c'est qu'elle va à l'encontre de la raison,et que Voltaire sait que seule une pensée fondée sur l'exercice de la raison a du sens, et il espère en tout cas quela philosophie vaincra sur la théologie et qu'alors la Bible pourra reprendre un sens allégorique et léger, être vuecomme une simple histoire culturelle romancée ; à ce moment-là, peut-être que « l'ennemi », l'Infâme, ne sera plustout-puissant au sein de la société.

Évidemment, l'Histoire lui donnera raison : en attendant, nous allons voircomment il met en évidence l'absurdité et la dangerosité des théologiens, comment ils vont à l'encontre du principede morale universelle, et surtout, puisque tel est notre sujet, comment la Bible leur sert d'instrument.La théologie ne va pas de soi : elle est fondée sur la parole divine, et a été inventée par Saint Paul.

Non seulementles théologiens prônent une lecture littérale de la Bible, mais en plus la plupart des dogmes de l'Église catholique nesont même pas dans l'Ancien Testament, à savoir l'histoire originelle du peuple juif.

Ils apparaissent en nombre dans. »

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