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Commentaire : La Princesse de Clèves (Mme de la Fayette): le vol d'une portrait de la princesse par le Duc

Publié le 01/04/2012

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  La Princesse de Clèves est l'œuvre la plus connue de Mme de la Fayette, une romancière du XVIIeme siècle qui articule son écriture autour de trois grandes notions : le classicisme, la préciosité et la galanterie. L'action de ce roman se déroule à la cour d'Henri II, et nous offre la vision d'une Cour aux histoires troubles et aux passions ravageuses. Parmi elles, celle qui lie le Duc de Nemours, un noble aux allures de Don Juan, et la Princesse de Clèves, une jeune fille d'une grande beauté récemment mariée. L'extrait étudié est issu du deuxième tome ( le roman en compte
 
quatre ), et narre le vol d'une portrait de la princesse par le Duc, de plus en plus amoureux et victime de la jalousie. Il s'agira dès lors de se demander dans quelles mesures ce texte rejoint l'idéal de l'esthétique classique : pour cela, nous nous pencherons tout d'abord sur le lien qui unit les différents sentiments ressentis par les protagonistes, puis nous analyserons le caractère théâtral de cet extrait.
 

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« Un consensus tacite semble donc avoir eu lieu entre les deux personnages, accompli uniquement par un échange de regards.

Il aura permis le vol d'un portrait, acte qui pourrait revêtir une connotation quelque peu ambiguë dans la suite de l' œuvre.

Mais cette dépossession s'est faite d'une manière bien particulière. Nous assistons en effet à une scène qui demeure très théâtralisée, tant au point de vue de son intrigue ou de sa situation que du comportement des personnages ou de leurs actions. En premier lieu, notons que l'extrait présente des circonstances propices à la dissimulation. L'action se déroule chez les Clèves, ainsi que le prouve le relevé suivant « Le jour qu'on achevait celui de Mme de Clèves, Mme la Dauphine vint passer l'après-dînée chez elle », précisément dans une chambre, puisque la romancière évoque un lit (l.19) et des rideaux, qui jouent ici un rôle capital, puisque ce sont eux qui permettront l'échange de regards entre le Duc et la Princesse ( alors qu'ils servent à l'origine à voir sans être vu et inversement ).

Ces derniers jouent donc le rôle d'écran entre deux mondes, deux situations : l'essentiel même de la scène se passe dans un espace clos, qui semble coupé du monde extérieur.

Le portrait, principal enjeu scénique, est posé sur une table tout contre le lit, et Nemours se trouve à son côté.

Toutes ces localisations sont en fait résumées dans la description des lignes 17 à 19 ( « Mme la Dauphine était assise sur le lit (...) le dos contre la table, qui était au lit » ).

Enfin, toutes les personnes présentes dans la pièce sont occupées, soit à discuter, à peindre ou tout simplement à figurer à ce rendez-vous.

Donc cette situation, tout à fait dûe au hasard, n'est pas sans rappeler le concept du crime parfait, et le Duc l'a bien compris, puisqu'il profite de l'occasion pour dérober l'une des choses qu'il convoitait depuis longtemps. Nous pouvons également remarquer que même la présence des personnages semble obéir à une logique calculée : une sorte de loi du triangle, où l'on dénombre la femme, l'amant et le mari. Bien que Mr de Clèves n'apparaisse réellement qu'à la fin du passage, son souvenir est sans cesse rappelé tout au long du texte, que ce soit par la conscience de Nemours ou les paroles des autres protagonistes.

D'ailleurs, son intervention finale mérite d'être analysée : il est « affligé » ( émotion que l'on peut alors opposer à la joie ressentie par le Duc suite au vol du portrait, ainsi que le démontre la ligne 34 ), mais est bien obligé de se rendre à l'évidence : il ne retrouvera jamais le portrait ( Malgré de soigneuses recherches ).

L'allusion qui clôture l'extrait, celle de l'amant qui aurait dérobé la peinture, paraît très étrange : l'auteur nous précise que Mr de Clèves constate cela sans le penser, mais est-ce réellement la vérité ? C'est donc sa naïveté et sa confiance aveugle (bien qu'il semble à un moment douter, idée que nous pouvons souligner grâce au relevé de l'expression « qu'elle avait sans doute quelque amant caché à qui elle avait donné ce portrait ou qui l'avait dérobé » ) envers sa femme qui apparaissent ici toutes entières.

De plus, la seule parole de l'extrait, prononcée au discours direct, met en exergue la dimension théâtrale de la scène : Mr de Nemours se déplace silencieusement jusqu'à son aimée, lui murmure quelques mots puis sort, dignement, sans attendre sa réponse.

Le paragraphe suivant nous révèle enfin ses pensées ( « Il sentait tout ce que la passion peut faite sentir de plus agréable (...) dans l'innocence de la première jeunesse » ), et nous amène à penser que le vol de ce portrait est un tournant supplémentaire dans l'évolution de sa passion. Pour conclure, nous pouvons donc affirmer que cet extrait correspond bel et bien à un idéal d'esthétique classique, étant donné qu'il réunit toutes les composants nécessaires à sa caractérisation : règles de bienséance, analyse précise des sentiments amoureux, galanterie, style précieux, orné et brillant.

La passion qui unit le Duc et la Princesse est délicatement exprimée, et le vol de ce portrait n'est en effet qu'une simple étape sur le long chemin qu'il leur reste à parcourir. Ce texte possède également une visée particulière, celle de plaire et d'instruire. En guise d'ouverture, nous pouvons proposer un autre extrait de l' œuvre, la scène de l'aveu ( Troisième tome ) , où la Princesse finit par révéler à son mari qu'elle éprouve une passion violente pour un autre que lui, répondant ainsi aux doutes et aux interrogations exprimées par ce dernier dans cet extrait.. »

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