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Commentaire Scapin Scène Acte 2 - Scène 7

Publié le 22/12/2012

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Ainsi, cette scène, célèbre, met en oeuvre divers procédés comiques, comique de geste, de situation, de

langage, comique lié à la double énonciation théâtrale. Le comique est surtout lié à la construction et à la

progression du dialogue, où l’on voit les deux personnages tenter l’un l’autre de se manipuler, pour arriver

à leurs fins – Géronte ne pas donner l’argent, Scapin obtenir cet argent. Ce dialogue reflète ainsi le

dilemme de l’avare, déchiré entre son vice et son amour, et chez lequel l’amour finit par l’emporter.

Molière va donc plus loin que nous faire rire par la farce et la mécanique : il nous met face aux défauts

des hommes, à leurs contradictions, à la complexité de leur âme.

Boileau, pourtant ami de Molière, avait mal jugé cette pièce : « Dans ce sac ridicule où Scapin

s’enveloppe/ Je ne reconnais plus l’auteur du Misanthrope. «. L’art de Molière ne consiste-t-il pas

justement à amener toujours la comédie à un degré de finesse, et à savoir faire cohabiter tous les

héritages de la comédie?

« cent écus ? » (l.44) Le comique repose aussi sur le langage, par les ruptures de rythme ( décalage entre le long récit de Tartuffe et l’exclamation brève de Géronte citée précédemment), les répétitions qui scandent la scène, dont le fameux « que diable allait-il faire dans cette galère ? », et, surtout, le décalage entre les propos des deux personnages. Le ressort comique de la scène repose en effet sur la progression du dialogue, ou plutôt sa difficulté à progresser, les deux personnages refusant d’entendre les propos de l’autre, et cherchant toujours à dévier les idées qu’il avance pour le ramener à sa propre logique, et le manipuler. Scapin manipule Géronte dès le début de la scène en essayant de toucher son cœur, jouant des registres pathétique et tragique, comme nous l’avons vu plus haut.

Il joue plus tard sur l’affect de son interlocuteur : ainsi tente-t-il de la faire culpabiliser en soulignant la tristesse dans laquelle se trouvait son fils au début de cette aventure imaginée.

« je l’ai trouvé tantôt, tout triste de je ne sais quoi que vous lui avez dit, où vous m’avez mêlé assez mal à propos » (l.28/29).

Puis la longueur du récit complètement fantaisiste s’attarde sur des détails hors de propos, compte tenu de la situation : « nous avons mangé des fruits les plus excellents qui se puissent voir et bu du vin que nous avons trouvé le meilleur du monde »( L 35-36). Ils cherchent à distraire Géronte, à exciter son impatience, et à lui faire croire à l’histoire, et mettent en valeur sa chute qui frappera d’autant plus vivement l’avare, détournant son attention de l’irréalité du récit. Le refus de Géronte de donner l’argent lui fait répondre toujours de manière décalée aux propos de Scapin.

Ainsi, répond-il au danger de mort de son fils par l’ampleur de la somme demandée et se fait-il toujours l’unique victime du récit : « Ah ! Le pendard de turc, m’assassiner de la façon.

»(l.47).

L’utilisation de l’hyperbole, en même temps qu’elle fait rire, souligne sa souffrance.

Le personnage opère un glissement du danger du fils à sa position de victime, liée à son obligation de père de verser cinq cent écus (la répétition de « cinq cent écus »scande aussi le dialogue).

Et, de fait, Géronte ne répond jamais à la demande de Scapin de donner rapidement l’argent, puisqu’il s’enferme dans une sorte de monologue d’avare touché dans sa chair.

Un des éléments de sa tactique est de refuser de rentrer dans le raisonnement de Scapin, par la question répétée « que diable allait-il faire dans cette galère ? » qui lui évite de répondre en posant une autre question, à laquelle Scapin répond toujours de la même manière, même si la formulation varie, invoquant l’impossibilité de prévoir le cours du destin, jusqu’à finalement s’énerver : « Vous avez raison. Mais hâtez -vous » (l.113).

Outre ces tentatives d’échappatoire, Géronte tente aussi de manipuler Scapin, d’abord pour l’envoyer à la place de son fils, prétextant qu’il gagnera ainsi du temps pour rassembler la somme nécessaire (dont on découvrira finalement à la fin de la scène qu’il l’avait sur lui).

Ensuite, en l’envoyant vendre des hardes dans son armoire, jouant lui aussi de l’art de la chute et du ménagement du suspense, puisque Scapin et le spectateur croient qu’il lui indique l’endroit où est caché son argent.

Scapin défait une à une les tentatives de fuite de Géronte, en fin connaisseur de son maître.

Par un froid raisonnement , il réfute les arguments spécieux de l’avare, montrant l’impossibilité du fils d’anticiper sur l’avenir, de la justice d’aller en pleine mer en moins de deux heures, de vendre les « hardes « et d’obtenir la somme nécessaire.

Et chaque fois, il ramène le dialogue à l’argument sentimental :-« sauver des fers un fils que vous aimez avec tant de tendresse » (l.49 -50), « mais le ciel me sera témoin que j’ai fait tout ce que j’ai pu, et que si tu manques à être racheté, il n’en faut accuser que le peu d’amitié d’un père.

»-, et rappelant le peu d’heures dont il dispose pour se décider. Finalement, Scapin l’emporte et la scène s’achève sur cette réplique qui fait triompher. »

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