Dans les Lettres de Dupuis et de Cotonet, Alfred de Musset se moque du romantisme. Son clerc d'avoué le définit ainsi : « Le romantisme, mon cher Monsieur! Non, à coup sûr, ce n'est ni le mépris des unités, ni l'alliance du comique et du tragique, ni rien au monde que vous puissiez dire; vous saisiriez vainement l'aile du papillon : la poussière qui le colore vous resterait dans les doigts. Le romantisme, c'est l'étoile qui pleure, c'est le vent qui vagit, c'est la nuit qui frissonne, la fleur qui vole et l'oiseau qui embaume ; c'est le jet inespéré, l'extase alanguie, la citerne sous les palmiers, et l'espoir vermeil et ses mille amours, l'ange et la perle, la robe blanche des saules; ô la belle chose, Monsieur! C'est l'infini et l'étoile, le chaud, le rompu, le désenivré, et pourtant en même temps le plein et le rond, le diamétral, le pyramidal, l'oriental, le nu à vif, l'étreint, l'embrasé, le tourbillonnant. » Sans aucun doute la raillerie de Musset atteint des défauts réels du romantisme. Mais ne pourrait-on pas dire que l'admiration du clerc d'avoué est en partie justifiée et qu'il discerne plus ou moins confusément la nouveauté et la valeur de la poésie romantique ?
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Dans ce fragment, volontairement confus, Musset reproche en somme au romantisme quatre choses : la recherche des émotions mélancoliques et gémissantes qui ne sont chez eux qu'une convention : « l'étoile qui pleure, le vent qui vagit, la nuit qui frissonne « ; — la recherche des sentiments exceptionnels, singuliers jusqu'à l'absurdité : « la fleur qui vole et l'oiseau qui embaume..., le désenivré..., l'embrasé, le tourbillonnant ; — ce qu'on a appelé le « bric-à-brac « romantique : « la citerne sous les palmiers..., le pyramidal, l'oriental « — et, par-dessus tout, l'entassement confus et incohérent de toutes ces choses, la prétention de composer une œuvre d'art sans choix, en suivant au hasard le désordre de leur prétendue inspiration.
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- Étudiez cette définition du romantisme que Musset met ironiquement dans la bouche d'un clerc d'avoué : «Non, le romantisme, mon cher monsieur, à coup sûr, ce n'est ni le mépris des unités, ni I' alliance du comique et du tragique, ni rien au monde que vous puissiez dire ; vous saisirez vainement l'aile du papillon, la poussière qui le colore vous resterait dans les doigts. Le romantisme, c'est l'étoile qui pleure, c'est le vent qui vagit, c'est la nuit qui frisonne, la fleur qui vole et l'oiseau qui embaume : c'est le jet inespéré, l'extase alanguie, la citerne sous les palmiers, et l'espoir vermeil et ses mille amours, monsieur ! c'est l'infini et l'étoile, le chaud, le rompu, le désenivré, et pourtant en même temps le plein et le rond, le diamétral, le pyramidal, l'oriental, le nu à vif, l'étreint, l'embrassé, le tourbillonnant ; quelle science nouvelle !» (Lettres de Dupuis et Cotonet, première lettre, 1836.)
- Victor Hugo écrit : «La nature procède par contrastes. C'est par les oppositions qu'elle fait saillir les objets. C'est par leurs contraires qu'elle fait sentir les choses, le jour par la nuit, le chaud par le froid, etc.; toute clarté fait ombre. De là le relief, le contour, la proportion, le rapport, la réalité. La création, la vie, le destin, ne sont pour l'homme qu'un immense clair-obscur. Le poète, ce philosophe du concret et ce peintre de l'abstrait, le poète, ce penseur suprême, doit faire comme la nature. Procéder par contrastes. Soit qu'il peigne l'âme humaine, soit qu'il peigne le monde extérieur, il doit opposer partout l'ombre à la lumière, le vrai invisible au réel visible, l'esprit à la matière, la matière à l'esprit; rendre le tout, qui est la création, sensible à la partie, qui est l'homme, aussi bien par le choc brusque des différences que par la rencontre harmonieuse des nuances. Cette confrontation perpétuelle des choses avec leurs contraires, pour la poésie comme pour la création, c'est la vie.» (Extrait de Tas de pierres, in Post-scriptum de ma vie, recueil de notes jetées au hasard par Hugo, de 1825 à 1880, sur des carnets et des bouts de papier et regroupées par son ami Paul Meurice en 1901; le fragment que nous citons date sans doute des années 1840-1844.) En prenant des exemples précis chez les poètes de votre choix, vous direz ce que vous pensez de cette esthétique et de cette technique du contraste.
- Alfred de Musset, Lettres de Dupuis et Cotonet
- « Il y a du peintre chez Victor Hugo, de l'orateur chez A. de Musset, du philosophe chez Alfred de Vigny, Lamartine est un pur poète. Il ne suit pas de là qu'il soit le premier de tous, mais à coup sûr, il est unique. » Expliquer et discuter ces lignes de Paul Bourget ?
- Ecrit par Alfred de Musset en 1835, La Nuit de Mai est un poème issu du courant du romantisme.